Année politique Suisse 1966 : Grundlagen der Staatsordnung / Rechtsordnung
 
Droits fondamentaux
Les droits fondamentaux des citoyens sont considérés par de nombreux observateurs comme l'un des domaines où une révision est nécessaire, soit parce que la Constitution contient encore, et les institutions avec elle, des prescriptions jugées discriminatoires, soit parce qu'elle n'offre pas les garanties de protection nécessaires. L'accession de la Suisse au Conseil de l'Europe a posé le problème de notre souscription à la Convention européenne des droits de l'homme. La législation en vigueur empêche cette souscription sans réserves, car elle ignore encore le suffrage féminin et contient des articles religieux d'exception. Une motion Eggenberger acceptée comme postulat au Conseil national, a demandé au Conseil fédéral un rapport sur les conditions juridiques à réunir en vue de notre adhésion à la Convention, posant par-là la question de réserves à formuler éventuellement. Deux opinions se sont manifestées à l'occasion: pour les uns, l'adhésion avec réserves stimulerait les révisions nécessaires du droit fédéral; pour les autres, ces réserves endormiraient le zèle des réformateurs [3].
Dans le domaine de la protection des individus, l'opinion a été agitée au sujet de l'utilisation faite des possibilités d'écoute téléphonique. Le nombre des ayants droit a paru considérablement étendu, et le Conseil fédéral a entrepris de le réduire [4]. La protection de la « sphère intime », de la vie privée, a suscité un postulat réclamant des mesures contre la prolifération des appareils permettant l'espionnage sous toutes ses formes, et en particulier de ceux dont la sensibilité acoustique perce les murs les plus épais [5].
L'abolition des articles d'exception de la Constitution fédérale n'a guère avancé au cours de l'année. Le rapport demandé par le Conseil fédéral au professeur Kägi n'a pas pu être remis. Pourtant, des efforts ont été fournis, sur une base privée, par un groupe présidé par le journaliste Reto Caratsch, et réunissant des personnalités de tous les bords. Ce groupe a préparé une nouvelle rédaction des articles 49 et suivants, a diffusé son projet et tenu une conférence de presse [6]. Cette initiative a rencontré un écho favorable auprès des organismes politiques, mais les résistances populaires semblent encore être assez vives [7]. Cependant l'opinion qui veut faire de l'abolition des articles un préalable à la révision totale s'est maintenue.
 
[3] Cf. Bull. stén. CN, 1966, p. 406 ss.; ainsi que NZZ, 40, 12.1.66; GdL, 10, 13.1.66; Bund, 251, 30.6.66.
[4] Cf. Postulat Huber (ind., BE) au CN le 15 mars et réponse de M. von Moos; cf. TdL, 75, 16.3.66; Bund, 74, 22.2.66; 7.4.66; Tat, 78, 1.4.66. Voir aussi interpellation Mossdorf le 4 octobre; NZ, 458, 4.10.66; 460, 5.10.66.
[5] Postulat Müller (ccs, LU); cf. NZZ, 3011, 9.7.66; NZ, 312, 10.7.66; Bund, 269, 13.7.66.
[6] Cf. NZZ, 2420, 1.6.66; 2441, 3.6.66; Lib., 127, 3.6.66; TdL, 156, 5.6.66; GdL, 150, 30.6.66.
[7] Voir en particulier NZZ, 2249, 21.5.66, compte rendu de l'assemblée du « Protestantischer Volksbund ». — Les partisans de la révision ont pu s'appuyer sur un article du professeur K. Guggisberg, diffusé par la Correspondance politique suisse, (NBZ, 43, 21.2.66), ainsi que sur ceux du professeur D. SCHINDLER, « Rechtliche Würdigung der konfessionellen Ausnahmeartikel » in Civitas, 21/1965-66, p. 594 ss., et du professeur J. F. AUBERT « Les articles confessionnels de la Constitution fédérale », ibid., p. 715 ss. Sur l'attitude des partis, cf. Vat., 247, 24.10.66; TdL, 183, 2.7.66.