Année politique Suisse 1966 : Grundlagen der Staatsordnung / Institutionen und Volksrechte / Gouvernement
Il n'y a pas eu d'élections générales fédérales cette année. Pourtant, la proximité du renouvellement du Conseil national, qui doit avoir lieu en automne 1967, a exercé une influence notable sur le comportement des partis. La participation de quatre partis au gouvernement a été une source de tensions, d'autant plus que le système ne repose pas sur une coalition, mais sur une simple formule proportionnelle. En l'absence d'une opposition parlementaire de poids, et devant la faiblesse de l'opposition de principe communiste, on ne peut guère parler en Suisse que d'opposition de secteur; celle-ci se manifeste au travers des partis gouvernementaux
[1]. Ce malaise a été ressenti par le Parti radical notamment, qui détient au Conseil fédéral deux départements plus exposés à la critique que d'autres, le DEP et le DMF. Le parti a jugé bon de prendre ses distances à l'égard. de la «formule magique » de représentation proportionnelle et de proposer aux autres partis gouvernementaux l'élaboration d'un programme minimum commun, qui constituerait 'en quelque sorte la base d'une coalition
[2].
La
démission du conseiller fédéral Paul Chaudet n'est pas sans rapports avec cette insatisfaction, comme d'ailleurs avec les pressions exercées par les représentants d'autres partis à la suite de l'affaire du « Mirage ». Le bureau du groupe parlementaire radical a refusé de proposer M. Chaudet à la vice-présidence du Conseil fédéral pour 1967, comme le «turnus» des charges l'aurait voulu; c'était au moins une invitation directe à se démettre de son mandat pour la fin de 1967. M. Chaudet a préféré la retraite immédiate
[3].
L'élection de son successeur a été très ouverte. Les radicaux vaudois, qui disposaient d'un candidat de valeur en la personne de G.-A. Chevallaz, syndic de Lausanne et conseiller national, ont immédiatement revendiqué le siège vacant. Cette candidature n'a pourtant pas joui de l'appui unanime des radicaux romands: la candidature de Pierre Glasson a été soutenue par les Fribourgeois, les Genevois se sont groupés derrière Henri Schmitt, alors que les Neuchâtelois restaient sur la réserve. Le Tessin fit valoir des prétentions anciennes, renforcées par la disponibilité de trois personnalités de premier plan. C'est enfin la candidature de
Nello Celio, ancien conseiller d'Etat, conseiller national et administrateur de sociétés influent, qui se dégagea et obtint l'appui du groupe radical des Chambres, par 39 voix contre 20 à M. Chevallaz, au second tour
[4]. Le 14 décembre, l'Assemblée fédérale élut M. Celio conseiller fédéral, au premier tour, par 136 voix contre 73 à M. Chevallaz
[5]
. Ainsi, la tradition accordant un siège aux Vaudois était rompue, et la Suisse italienne reprenait une place perdue depuis le départ de M. Lepori en 1959: c'est sur ce terrain-là, à qualités égales des candidats, que le choix se fit, mais il ne faut pas exclure des considérations d'affinités et de caractère qui ont pu jouer un rôle.
Le même jour, l'Assemblée fédérale élut Roger Bonvin président de la Confédération, par 181 voix sur 235 votants. Willy Spühler fut désigné comme vice-président, mais par 124 voix seulement, 102 députés lui ayant refusé leur suffrage; cette élection a été interprétée comme un vote de méfiance à l'égard des positions politiques personnelles du chef du DPF. On y a vu d'ailleurs une manière de rappeler à celui-ci qu'il est le doyen d'âge du collège exécutif.
[1] Voir ROLAND RUFFIEUX, « La contribution de la science politique à la réforme de ('Etat », in La Suisse, Annuaire de la NS H, 1967, p. 82 ss.
[2] Cf. NZZ, 2269, 23.5.66. Voir l'opinion contraire du socialiste P. Graber, in PS, 260, 10.11.66: 261, 11.11.66. Cf. NZZ, 5569, 23.12.66.
[3] Cf. NZZ, 5147, 28.11.66; NZ, 553, 29.11.66: BN, 507, 29.11.66; Lib., 277, 29.11.66; GdL, 279, 29.11.66; PS, 276, 29.11.66: Vat., 277, 29.11.66.
[4] Au premier tour, 28 voix à M. Celio, 24 à M. Chevallaz, 7 à M. Glasson. Cf. GdL, 291, 13.12.66; JdG, 291, 13.12.66.
[5] M. Glasson obtenait 16 voix, d'autres noms en tout 7; il y avait 236 votants. Cf. NZZ, 5439, 14.12.66; 5445, 15.12.66; Vat., 290, 15.12.66; JdG, 293, 15.12.66; GdL, 293, 15.12.66; BN, 533, 15.12.66.
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