Année politique Suisse 1968 : Wirtschaft / Allgemeine Wirtschaftspolitik
 
Politique structurelle
Les modifications structurelles de l'économie suisse se sont poursuivies parallèlement à la reprise conjoncturelle. Les efforts de rationalisation ont accéléré le processus de concentration. Des fusions ou des accords limitant les programmes de production afin de diminuer les coûts, sont intervenus dans la grande industrie aussi. L'exemple le plus spectaculaire de ce genre de démarches est l'accord passé entre les groupes Brown Boveri/Oerlikon d'une part et Sulzer/Escher Wyss de l'autre, qui prévit la fondation d'une entreprise commune pour la fabrication de certains types de turbines, mais n'inclut encore aucune alliance financière [22]. Des mouvements de concentration se dessinèrent de façon évidente dans l'industrie horlogère [23]. Ces mouvements furent encore encouragés par les nouveaux statuts de la Fédération horlogère, qui, en admettant les entreprises comme membres de plein droit, accordent aux groupes les plus forts sur le marché une influence plus grande sur la politique de la Fédération [24].
Dans certaines industries, où des difficutés d'écoulement et des pressions concurrentielles sur les prix se sont alliées aux problèmes de structure, la nécessité de rationaliser a conduit parfois à des licenciements de personnel [25]. Ainsi 800 ouvriers et employés de la fabrique de chaussures Hug AG, à Kreuzlingen et à Herzogenbuchsee, perdirent leur emploi. Dans ce cas comme dans la plupart des autres, les problèmes de prévoyance sociale purent être résolus de façon satisfaisante, et le personnel retrouva du travail sans difficultés [26]. On fit cependant des réserves, dans les milieux syndicaux, à l'égard des fortes concentrations. Le retard dans la rationalisation et l'expansion forcenée que l'admission sans frein de main-d'oeuvre étrangère avait entraînés se vengeraient aujourd'hui. Les déplacements de personnel exigeraient des sacrifices. Les sécurités de l'emploi seraient insuffisantes pour les travailleurs. C'est pourquoi il conviendrait d'accorder à ceux-ci un droit plus étendu à la conduite des entreprises; il faudrait aussi créer une loi-cadre pour la protection nécessaire en raison des mesures de rationalisation [27]. On répondit à ces revendications en faisant valoir que la Suisse, en comparaison avec le reste de l'Europe et l'Amérique, en est encore au premier stade de concentration industrielle. De plus, aussi longtemps qu'à chaque fusion répondrait la naissance de nombreuses petites entreprises, le degré de concentration resterait en définitive faible [28]. Le chômage structurel aurait pris des proportions beaucoup plus fortes à l'étranger. Il conviendrait au contraire d'augmenter la mobilité professionnelle et géographique de la main-d'oeuvre [29].
Le commerce de détail a souffert de véritables problèmes de structure. Malgré l'augmentation globale du chiffre d'affaires de 3,9 % (4,3 % en 1967), des modifications importantes sont survenues. L'introduction partielle des ventes en soirée, la création de nouveaux centres d'achats, et surtout l'ouverture de magasins « cash and carry » ou « super-discount » où l'on trouve dans des locaux simplement aménagés des marchandises non périssables à des prix très bas, ont contraint les détaillants à prendre d'énergiques contre-mesures [30]. La chute des prix imposés pour les spiritueux, pour l'essence et pour les articles de parfumerie, fut le résultat d'une lutte concurrentielle menée par des maisons isolées. La coopérative d'achats USEGO en ressentit l'effet; pour la première fois en plus de 60 ans d'existence, elle enregistra une perte. La direction de la coopérative fut remplacée, afin de maîtriser la situation et de procéder aux mesures d'économie et de réorganisation nécessaires, par un comité dont le conseiller national P. Bürgi (rad., SG), prit la tête en tant que président du conseil d'administration [31]. De même, la puissante Union suisse des coopératives de consommation a jugé que son éparpillement en quelque 430 coopératives devait être revu [32].
 
[22] Cf. Bund, 31, 7.2.68; TdG, 45, 22.2.68; NZZ, 107, 18.2.68; autres accords: NZZ, 207, 2.4.68 (Contraves et Dornier System); NZZ, 244, 22:4.68 (Escher Wyss et English Electric); TdL, 121, 30.4.68 (Giovanola acquiert Zwahlen et Mayr); JdG, 32, 8.2.68 (Hoffmann-La Roche prend une participation importante à la SIP).
[23] Cf. GdL, 74, 28.3.68 (Ernest Borel et Cyma Watch); 76, 30./31.3.68; TdG, 215, 13.9.68 (Bulova et Ebauches exploitent en commun des brevets); 221, 20.9.68; 233, 4.10.68; 306, 30.12.68; TdL, 328, 23.11.68 (fondation de la Pierres Holding); PS, 297, 24.12.68.
[24] Cf. NZ, 149, 29.3.68; TdG, 70, 22.3.68; JdG, 150, 29./30.6.68; NZZ, 188, 25.3.68; sur d'autres efforts de l'industrie horlogère cf. p. 64.
[25] Cf. PS, 83, 9.4.68 (Balcana, Chiasso); 139, 20.6.68 (Cima Norma au Tessin); 152, 5.7.68 (Textilfabrik Lotzwil); 261, 12.11.68 (Zementfabrik Därligen BE); 281, 5.12.68 (Mahalla, Richterswil ZH); GdL, 257, 2./3.11.68 (Ecisa, Nyon); 256, 1.11.68 (Variel, Bösingen FR); NZZ, 793, 23.12.68 (Madega).
[26] Cf. NZZ, 662, 25.10.68; 664, 28.10.68; 696, 11.11.68; 691, 7.11.68; NZ, 496, 26.10.68; GdL, 252, 28.10.68; gk, 46, 21.11.68.
[27] Cf. gk, 42, 31.10.68; 46, 21.11.68; 48, 5.12.68 (interpellation du CN Wüthrich, soc., BE); Vr, 63, 15.3.68; 259, 4.11.68; PS, 73, 28.3.68.
[28] Cf. TdG, 88, 13./14./15.4.68; Dov., 290, 17.12.68; Bulletin d'information du délégué aux questions conjoncturelles, 24/1968, p. 3 ss. Cf. les conférences du prof. Schaller (Vat., 262, 9.11.68) et du prof. Sidjanski (TdG, 244, 17.10.68).
[29] Cf. wf, Dokumentation- und Pressedienst, 13, 10.1.69.
[30] Cf. La Vie économique, 42/1969, p. 51; NZ, 33, 21.1.68; Vr, 55, 6.3.68; NZZ, 386, 26.6.68; Schweizerische Gewerbe-Zeitung, 15, 12.4.68; GdL, 113, 15.5.68 (critique des magasins discount par Veledes); Vat., 127, 31.5.68 (action de l'Union suisse des détaillants).
[31] Cf. BN, 175, 26.4.68; NZZ, 630, 11.10.68; 631, 13.10.68; Tat, 119, 22.5.68; 232, 3.10.68; JdG, 299, 21./22.12.68; NZ, 288, 26.6.68; 455, 2.10.68; Schweizerische Gewerbe-Zeitung, 40, 4.10.68.
[32] Cf. Genossenschaft, 38, 1.9.68.