Année politique Suisse 1970 : Wirtschaft / Landwirtschaft / Production animale
print
Lait
Deux séries de mesures, au printemps et en automne, constituent les charnières autour desquelles s'est déroulée la politique laitière de 1970. Au début de l'année, les agriculteurs demandèrent le relèvement, jusqu'à 26 millions de quintaux, de la quantité de lait à produire, ainsi qu'un supplément de prix d'un centime par litre sur la totalité du lait transformé en fromage. Des assemblées [52], une démarche parlementaire [53], l'envoi d'une délégation et d'une pétition au DFEP [54] ont été parmi d'autres les moyens d'expression de la paysannerie. Le 29 avril, le Conseil fédéral donna connaissance des dispositions qu'il mit en vigueur dès le ler mai. Tandis que le centime du lait à fromage était accordé, le contingent fut relevé jusqu'à 25,75 millions de quintaux seulement [55]. Dans l'ensemble, cette solution de compromis parut acceptable aux consommateurs, peu satisfaisante aux producteurs [56].
L'attention se détourna cependant très vite de ces mesures pour se concentrer sur l'avant-projet de l'arrêté destiné à régir l'année laitière 1970/71 qui allait débuter le let novembre. Il laissait entrevoir entre autres un assouplissement du contingent, mesure de libération compensée par une augmentation des frais à la charge des producteurs en cas de dépassement du maximum fixé; il prévoyait aussi, sous réserve de l'approbation du Parlement, de biffer le solde passif du compte laitier s'élevant à environ 46 millions de francs [57]. Les milieux consultés ne manquèrent pas de prendre position, ni la presse de commenter longuement le futur arrêté [58]. Les grandes associations paysannes et laitières se montrèrent d'abord plutôt réservées puis, sous l'impulsion de l'Union centrale des producteurs de lait, revendiquèrent une augmentation de deux centimes sur le prix de ce produit de base et la fixation du contingent à 26 millions de quintaux [59]. En juin, deux motions de 1969 visant à radier le solde du compte laitier furent adoptées par les Chambres. Mais alors que la motion Leu (ccs, LU) passait sans difficulté au Conseil des Etats [60], celle présentée par Etter (PAB, BE) au Conseil national affronta l'opposition des socialistes et des indépendants qui estimèrent qu'on ne pouvait effacer une loi par une motion, qu'il s'agissait là d'un fâcheux précédent et qu'il y avait trahison à la doctrine schaffnérienne selon laquelle les paysans doivent participer à l'orientation et à la rationalisation de l'agriculture. La motion. fut votée par 79 voix contre 39 [61]. Les associations de défense des consommateurs [62], les organisations ouvrières et syndicales [63] ne se déclarèrent pas hostiles par principe à une augmentation du revenu paysan, mais bien à une hausse des prix dont ils auraient à subir les conséquences.
Les mesures entrant en vigueur le lu novembre parurent le 21 octobre. Le prix du lait était majoré de 2 centimes, passant de 56 à 58 centimes le litre, mais le contingent de base et la charge à supporter par les producteurs au cas où ce dernier serait dépassé demeuraient inchangés [64]. L'augmentation ressentie par les consommateurs alla jusqu'à 5 centimes par litre de lait, ce qui provoqua chez eux un certain mécontentement [65], moindre toutefois que celui des paysans, ulcérés de ne pas voir satisfaites toutes leurs revendications face à une vague de renchérissement qui engloutissait au fur et à mesure les améliorations consenties par le Conseil fédéral. En décembre, qualifiant la situation de grave, l'Union suisse des paysans décida l'envoi d'une pétition au gouvernement en faveur d'une meilleure compensation au coflt de la vie [66]. L'Union des producteurs suisses, organisation à majorité romande, menaça de faire la grève du lait et accusa l'Union suisse des paysans de jouer le jeu des autorités et de sacrifier la paysannerie aux intérêts de l'industrie [67].
 
[52] Entre autres à Zurich (NZZ, 125, 16.3.70), Kirchberg (SG) et Lucerne (cf. supra, note 5).
[53] Petite question urgente Barras (css, FR) et réponse du CF: Lib., 134, 13.3.70.
[54] Délégation: NZZ, 148, 1.4.70. Pétition: Vat., 77, 4.4.70.
[55] JdG, 99, 30.4.70; Lib., 173, 30.4.70; NZZ, 197, 30. 4.70; Ostschw., 99, 30.4.70.
[56] Approbation de I'USS: NZZ, 200, 1.5.70. Insatisfaction des paysans: JdG, 99, 30.4.70; 102, 4.5.70; Vat., 101, 2.5.70. Inaugurant à cette occasion ses contacts avec le CF Brugger, nouveau chef du DFEP, l'USP a déclaré les mesures satisfaisantes: GdL, 105, 8.5.70.
[57] GdL, 97, 28.4.70; NZZ, 193, 28.4.70; TdG, 98, 28.4.70; Vat., 97, 28.4.70.
[58] Discussion générale: Bund. 186, 12.8.70; 187, 13.8.70; 188, 14.8.70; 243, 18.10.70; NZZ, 387, 21.8.70; 397, 27.8.70; 446, 25.9.70.
[59] TLM, 237, 25.8.70; 238, 26.8.70; NBZ, 198, 26.8.70; NZZ, 394, 26.8..70; 397, 27.8.70; TdG, 199, 26;8.70.
[60] Délib. Ass. féd., 1970, I, p. 42; NZZ, 250, 3.6.70; Ostschw., 126, 3.6.70.
[61] Délib. Ass. féd., 1970, I, p. 26; JdG, 127, 4.6.70; NZ, 248, 4.6.70; NZZ, 253, 4.6.70.
[62] Fédération suisse des consommateurs: NZZ, 443, 24.9.70; Fédération romande des consommatrices et Forum des consommatrices de la Suisse alémanique et du Tessin: GdL, 244, 20.10.70; NZZ, 490, 21.10.70.
[63] USS: NZZ, 399, 28.8.70; FSE: NZZ, 289, 25.6.70; Confédération des syndicats chrétiens de Suisse: Vat., 179, 5.8.70.
[64] RO, 1970, p. 1291 s.; NZZ, 491, 22.10.70; Lb, 246, 22.10.70.
[65] AZ, 245, 12.10.70; PS, 248, 29.10.70; Tat, 248, 22.10.70; Tw, 247, 12.10.70.
[66] GdL, 300, 24./25.12.70; NBZ, 302, 29.12.70; NZZ, 603, 29.12.70; 9, 7.1.71.
[67] GdL, 285, 7.12.70; NZZ, 600, 25.12.70.