Année politique Suisse 1970 : Infrastruktur und Lebensraum / Energie
Politique énergétique
A considérer la seule législation fédérale, 1970 ne marque pas une année importante dans ce domaine de l'infrastructure économique. Les Chambres n'ont pris aucune décision et aucun projet ne leur a été soumis concernant l'aménagement énergétique du pays. Le rapport promis en 1968 par le gouvernement et destiné à préciser de façon concrète « les grandes lignes » de sa politique jusqu'en 1971, n'a pas encore paru
[1]. La nécessité d'une politique nettement définie apparaît pourtant d'autant plus évidente que l'année 1970 a souligné la complexité croissante des problèmes relatifs à l'énergie. Le pays ne se préoccupe plus seulement de son approvisionnement, mais encore et de plus en plus des dangers de pollution et de contamination que lui font courir les diverses sources d'énergie. La question se pose en termes antinomiques: alors que les besoins en énergie vont grandissants, l'homme se sent de plus en plus menacé dans sa santé et son environnement
[2]. Cette prise de conscience, jointe à l'importance des réalisations techniques menées à chef, entreprises ou seulement projetées en 1970 dans le secteur énergétique, explique la multiplication et l'intensification des conflits entre certains impératifs de l'économie et ceux de l'hygiène publique.
Il est compréhensible qu'un pays hautement industrialisé tel que la Suisse se préoccupe de son
approvisionnement en énergie. Une étude prospective accomplie à l'Institut pour l'aménagement du territoire à l'EPF de Zurich prévoit qu'en l'an 2000 les besoins seront 2,5 fois plus grands que ceux d'aujourd'hui et que la production, pour les couvrir, devra être trois fois supérieure
[3]. C'est dire le rôle que doit jouer la planification dans l'économie énergétique. Elle s'impose particulièrement pour la Suisse qui, a déclaré le Conseil fédéral en 1968, dépend de plus en plus de l'étranger pour son approvisionnement. En 1970, personne n'a contesté la volonté gouvernementale de limiter cette dépendance. Chose plus curieuse, personne non plus n'a critiqué fondamentalement le moyen préconisé à cette fin, à savoir un meilleur équilibre entre les diverses sources d'énergie, en particulier par le développement de l'électricité d'origine nucléaire et du gaz
[4]. Peut-être attend-on pour cela le rapport du Conseil fédéral. Toujours est-il que la solution proposée ne résoudra que très partiellement le problème, puisque les centrales nucléaires ont besoin de combustibles importés (uranium, plutonium) et que le gaz naturel arrive déjà en Suisse de l'étranger par gazoduc
[5]. La chose n'a d'ailleurs pas échappé aux autorités qui prévoient de diversifier sur le globe la provenance de certaines importations
[6].
Cette double
diversification de la forme et de la provenance des sources d'énergie devrait encore avoir des conséquences économiques et se répercuter favorablement sur les prix, ceux des produits pétroliers et du courant électrique surtout. Pour l'instant il n'en est rien et, loin de baisser, ils sont en train d'augmenter. Les hausses annoncées par deux grandes sociétés d'électricité, NOK (Nordostschweizerische Kraftwerke) et BKW (Bernische Kraftwerke) ont frappé l'opinion, s'agissant d'entreprises en possession de centrales nucléaires et susceptibles donc de produire un courant meilleur marché. Les causes invoquées à cette modification se résument à trois: frais accrus de production, hausses des salaires et du taux d'intérêt
[7]. Dès janvier, il a été question d'un renchérissement de la benzine et du mazout, à la suite de l'annonce par la Libye et l'Algérie d'une hausse sur le pétrole brut
[8]. Le cours mondial des produits pétroliers est effectivement passé en un an (septembre 1969/septembre 1970) de 89,3 à 236,9 (indice 1949=100)
[9]. En Suisse, le prix du mazout a fortement augmenté, 25 % par exemple dans l'agglomération bâloise entre janvier et décembre
[10]. D'où l'alarme de ceux qui ont incriminé le prix du mazout comme facteur primordial d'inflation
[11]. La hausse, faible et non généralisée, du prix de la benzine a permis de constater que la Suisse bénéficiait toujours de l'essence la meilleur marché d'Europe
[12]. Une affirmation identique a porté sur le prix de l'électricité dont on a vanté la relative stabilité en regard de la dévaluation de l'argent et de l'ascension de l'indice du coût de la vie
[13].
La
sécurité de l'approvisionnement du pays en électricité s'est consolidée par la mise en exploitation, sur son axe principal Laufenburg-Italie, du réseau à 380 kV, tension la plus élevée connue actuellement dans le groupe européen dont la Suisse fait partie aux c8tés de l'Allemagne, de la France et de l'Italie
[14]. En effet, selon l'Office fédéral de l'économie énergétique, la collaboration internationale simplifie grandement la production d'électricité et constitue une garantie par la solidarité qui en découle
[15]. Elle existe aussi au niveau de la construction et de l'exploitation de centrales électriques. Mais ces dernières ne sauraient se multiplier indéfiniment, surtout les centrales hydroélectriques, tributaires des barrages et des cours d'eau. L'année 1970, il est vrai, ne correspond pas encore avec le point de saturation: au ler janvier, douze centrales en voie de construction ou d'extension étaient dénombrées
[16]. Toutefois il faut signaler que, dans le canton de Schaffhouse, le projet visant à interdire désormais toute nouvelle installation de centrale a été accepté en votation populaire. Le résultat du scrutin a été interprété comme une victoire des défenseurs de la nature et de l'environnement
[17].
[1] Cf. APS, 1968, p. 81.
[2] Cf. infra, p. 124 ss.
[4] Cf. FF, 1968, I, p. 1250 (« grandes lignes »).
[6] Réponse du Conseil fédéral à une petite question Bommer (ccs, TG): NZZ, 523, 27.11.70.
[7] NZZ, 115, 10.4.70; Lb, 168, 23.7.70; GdL, 181, 6.8.70.
[9] Rapport de la Commission de recherches économiques, 205, p. 8, supplément de La Vie économique, 43/1970, novembre.
[11] Lb, 290, 12.12.70. L'Association des utilisateurs industriels de combustibles a déclaré que cette augmentation conduira nécessairement à une hausse importante des frais de production (ldG. 224, 26./27.9.70).
[12] NZZ, 378, 17.8.70; Weltwoche, 39, 25.9.70.
[14] NZZ, 266, 12.6.70. Détails sur le réseau, cf. APS, 1969, p. 91.
[15] Conférence de presse de H. R. Siegrist, directeur de l'Office en question: Bund, 77, 5.4.70.
[16] Archiv für schweizerische Wirtschaft und Wirtschaftspolitik (ASW), 11/1970, p. 60. Nous ne comptons pas les centrales nucléaires.
[17] Lb, 17, 22.1.70; NZZ, 47, 29.1.70; cf. aussi APS, 1969, p. 92.
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