Année politique Suisse 1970 : Infrastruktur und Lebensraum / Energie
 
Energie nucléaire
Le développement projeté de centrales nucléaires suisses le long du Haut-Rhin et des ses affluents —Beznau II (AG), Kaiseraugst (AG), Leibstadt (AG), Stein am Rhein (SH), Rüthi (SG), Rheinklingen (TG), Gösgen (SO) et Mühleberg (BE) [23] — pose le problème du réchauffement des eaux et de leur équilibre biologique. Tandis que la commupe de Leibstadt, comme celle de Kaiseraugst en 1969, approuvait l'installation de la centrale sur son sol, l'opposition qui s'était déjà manifestée précédemment 'dans les régions rhénanes contre les deux centrales s'est amplifiée. Quatorze recours et plaintes contre l'utilisation des eaux du Rhin pour le refroidissement des réacteurs ont été déposés devant le Conseil d'Etat du canton d'Argovie. Celui-ci les a rejetés en bloc [24]. Deux autres recours totalisant 3700 signatures et émanant des cartels syndicaux de Bâle-Ville et Bâle-Campagne sont parvenus au Conseil fédéral qui était invité à interdire toute construction de centrale nucléaire dans les régions à forte densité démographique. Beznau, Kaiseraugst et Leibstadt étaient visés. Le conseiller fédéral Bonvin, chef du DFTCE, a répondu que la sécurité était assurée et que les craintes de la population ne se justifiaient pas [25]. Celles-ci avaient été suscitées par la chute au début de l'année d'un appareil de la Swissair à proximité du réacteur atomique de Würenlingen. La construction souterraine des installations nucléaires et de plus amples garanties contre les dangers de radioactivité ont été demandées au gouvernement argovien. Ce dernier a exprimé une fin de non-recevoir en déclarant qu'il ne fallait pas confondre centrale nucléaire et bombe atomique [26]. La radioactivité et le réchauffement des eaux ont particulièrement inquiété les milieux médicaux rhénans. En réponse à une démarche effectuée auprès de l'Office fédéral de l'économie énergétique, celui-ci, après les avoir rassurés, s'est déclaré prêt à débattre avec eux, sous forme de colloque, des problèmes soulevés [27]. Déclarations alarmantes voire alarmistes d'un côté, trop ou trop peu rassurantes de l'autre, bref un besoin généralisé d'explication a été ressenti par toutes les couches de la population, comme le montrent les nombreuses conférences et tables rondes organisées dans le pays sur le thème des centrales nucléaires, ainsi que les innombrables articles parus dans la plupart des journaux [28].
Les réactions extérieures au pays enregistrées en 1969 à propos de l'utilisation des eaux rhénanes se sont poursuivies. A la suite d'une démarche du Bade-Wurtemberg, le Gouvernement fédéral allemand a engagé des pourparlers avec la Suisse. Successivement à Bonn et à Aarau, les délégations des deux pays ont discuté d'une clé de répartition des droits au réchauffement du Rhin. L'année s'est achevée sans qu'une solution ait été trouvée [29]. Le projet d'un accord bilatéral a été d'ailleurs critiqué et certains ont soutenu la nécessité d'une convention internationale que signeraient tous les pays rhénans dans le cadre d'une planification de l'énergie atomique. Cela d'autant plus que les spécialistes prévoient pour l'an 2000 une centrale nucléaire tous les 17 km le long du Rhin [30].
Les difficultés entre la Suisse et sa voisine dans le domaine énergétique n'ont pas empêché le projet de Kaiseraugst de progresser, ni même l'Allemagne d'y collaborer. Des journaux ont annoncé en décembre la clôture heureuse de négociations germano-franco-suisses entamées il y a trois ans en vue de la construction en commun de cette,centrale. La répartition des parts n'est pas encore nettement fixée, mais il semble que la Suisse en détiendra la majorité. L'autorisation d'utiliser les eaux du Rhin, qui dépend des instances officielles, fait néanmoins encore défaut [31].
 
[23] Respectivement TAW, 20, 19.5.70; NZ, 164, 12.4.70; NZZ, 262, 10.6.70; APS, 1969, p. 93; NZZ, 327, 17.7.70; TAW, 32, 11.8.70; Bund, 135, 14.6.70.
[24] Approbation de Leibstadt: NZ, 336, 26.7.70; de Kaiseraugst: APS, 1969, p. 93. Recours (Bâle-Ville, Bâle-Campagne, commune de Birsfelden, direction du barrage de Birsfelden, Association suisse de navigation, Société de pêche, Hardwasser AG Pratteln, Forces motrices de Rheinfelden, Comité d'action contre la centrale nucléaire de Kaiseraugst): AZ, 81, 10.4.71; NZ, 225, 22.5.70; NZZ, 165, 11.4.70; 234, 25.5.70; GdL, 120, 27.5.70. Rejet du gouvernement argovien: NZ, 420, 13.9.70; TdG, 213, 12./13.9.70. Manifestations de 1969: APS, 1969, p. 92 s.
[25] NZ, 233, 27.5.70; NZZ, 238, 27.5.70.
[26] Interpellation Meier au Grand Conseil argovien: NZ, 117, 12.3.70. Réponse du Conseil d'Etat: NZ, 235, 28.5.70; AZ, 278, 30.11.70.
[27] NZ, 321, 17.7.70.
[28] Cf. entre autres, table ronde de Rheinfelden (NZ, 491, 25.10.70) et celle de I'USS (AZ, 248, 26.10.70), ainsi que les journées d'information de l'Association suisse pour l'énergie atomique à Zurich et Berne (AZ, 269, 19.11.70; 278, 30.11.70; Lb, 259, 6.11.70; NZZ, 516, 5.11.70; gk, 41, 12.11.70). Quelques articles de presse: NZZ, 94, 26.2.70; 216, 13.5.70; 238, 27.5.70; NZ, 122, 16.3.70; 227, 23.5.70; 321, 17.7.70; 336, 26.7.70; 443, 27.9.70; BN, 260, 26.6.70; 262, 27./28.6.70; 268, 1.7.70; 270, 2.7.70; 404, 26./27.9.70; GdL, 98, 29.4.70; JdG, 164, 17.7.70; Lib., 141, 21./22.3.70; Tw, 170, 24.7.70; 244, 19.10.70; AZ, 4, 8.1.70; 248, 26.10.70.
[29] NZZ (dpa), 34, 22.1.70; GdL (ap), 17, 22.1.70; NZ, 51, 1.2.70; 56, 4.2.70; NZZ, 53, 3.2.70; GdL, 27, 3.2.70; JdG (ais), 27, 3.2.70; Bund, 230, 2.10.70. Cf. supra, p. 40, ainsi que APS, 1969, p. 93.
[30] NZ, 51, 1.2.70; GdL, 22, 28.1.70.
[31] Le Figaro repris par NZZ, 586, 16.12.70 (part de la Suisse: 65 %); JdG, 295, 18.12.70 (50 %).