Année politique Suisse 1972 : Grundlagen der Staatsordnung
Politische Grundfragen und Nationalbewusstsein
Der Anfang der neuen Legislaturperiode steht angesichts dringlicher Aufgaben im Zeichen erhöhter Anstrengungen der Behörden — Breiter Konsens auf verschiedenen Gebieten, Spannungen in Fragen der Landesverteidigung — Fortgang der Auseinandersetzungen über Grundfragen der Staatsordnung und der nationalen Existenz — Wachsendes Interesse für die Schweiz im Ausland — Diskussionen über Zukunft und Planung.
1972 marqua le début d'une nouvelle législature fédérale. L'obligation qu'avait l'exécutif d'élaborer les Grandes lignes de sa politique gouvernementale, et la tentative parallèle des partis au pouvoir de s'entendre sur des objectifs communs pour la durée de la législature contribuèrent à faire sortir l'activité politique des chemins battus
[1]. Par ailleurs, l'urgence de certaines tâches exigea un travail accru de la part des autorités. L'extension vers le nord du bloc d'intégration européen et l'évolution des relations entre les trois grandes puissances firent sentir le besoin de certains changements dans l'orientation de notre politique étrangère. L'évolution effrénée de la conjoncture, l'inflation galopante et la crise monétaire internationale appelèrent de plus efficaces mesures d'intervention. Le fossé qui se creuse entre les zones de concentration et les régions désertées, une insatisfaction croissante que ressent la population à l'égard des déficiences qu'elle constate dans les domaines du logement et de la circulation ainsi que les perspectives peu rassurantes qui se profilent pour l'avenir matériel de la planète, imposèrent une planification de l'espace et de l'environnement. La fermentation incessante des esprits au sein de la jeunesse ainsi que le manque de main-d'ouvre qualifiée invitèrent instamment à développer et à transformer la conception de l'éducation ; le nombre croissant de personnes âgées et les problèmes qu'elles posent requérirent un système de prévoyance social plus étendu.
L'opinion publique, qui avait déjà discuté la plupart de ces problèmes, se montra généralement disposée à reconnaître les efforts entrepris par les instances responsables. Ainsi, un traité de libre-échange avec les Communautés européennes, les mesures exceptionnelles entrées en vigueur en 1971 dans le secteur de la construction et dans celui de la politique monétaire, de nouvelles dispositions constitutionnelles pour la construction de logements et le contrôle des loyers, ainsi que le développement de la prévoyance-vieillesse furent largement sanctionnés par les votations populaires
[2]. Une série de nouvelles mesures anticonjoncturelles, de premières dispositions d'urgence dans l'aménagement du territoire et une modification des articles constitutionnels sur l'enseignement furent approuvés par le parlement
[3]. Ni les résistances émanant des couches conservatrices, des secteurs économiques et des régions touchés, ni même les revendications de certains milieux de la gauche ne parvinrent à entraver le cours de ces réformes au ton modéré.
Mais si, dans certains secteurs, l'on a réussi à créer un large consensus, diverses questions relatives à la défense nationale furent l'objet de vives controverses. La tension se manifesta surtout dans la lutte qui précéda la votation sur l'initiative populaire pour une limitation radicale de l'exportation d'armes, initiative qui fut repoussée de justesse ; la tension réapparut lorsque le Conseil fédéral renonça à l'achat d'un nouvel avion de combat, et lorsque le parlement, hésitant, supprima la cavalerie, arme dont de larges milieux réclamaient le maintien
[4].
Conscience nationale
Compte tenu de ces tensions, la discussion des questions essentielles touchant au régime politique et à l'
existence nationale se poursuivit. Entre l'agitation que la gauche entretenait contre le système économique et politique établi et la réaction que la droite dirigeait contre les tendances subversives
[5], les représentants d'une politique modérée de réformes s'efforcèrent de réduire la polarisation. Ces dernières prises de position remirent en question certaines conceptions traditionnelles : la Suisse comme cas spécial, la souveraineté des cantons, la perfection de nos institutions démocratiques et la sacrosainte croissance économique ; on alla même jusqu'à suggérer de renoncer un jour à la défense nationale. Hommage fut rendu à cette jeunesse qui tend à voir les problèmes sous leur aspect idéologique ; on fit appel au courage face à l'inconnu de demain, ainsi qu'à l'agitation créatrice
[6]. On essaya aussi de faire dialoguer, lors d'une journée des jeunes, les champions de l'antimilitarisme et les représentants de l'Etat et de l'armée en organisant un débat public
[7]. Au nom du libéralisme, on réclama avec insistance plus de champ pour le mouvement et la contestation, et moins d'application à protéger l'Etat
[8].
Révision totale de la Constitution
Aucun progrès décisif n'a marqué la révision totale de la Constitution. On attendait le rapport final du groupe de travail Wahlen ; il en a approuvé le contenu en octobre, prévoyant de le publier en 1973. Lors du débat sur les Grandes lignes de la politique gouvernementale, on proposa une modification de la procédure de révision qui devait permettre la mise sur pied d'un conseil constitutionnel
[9]. Une thèse de droit proposa de réduire la Constitution fédérale à quelques principes fondamentaux et intangibles, ceci afin de permettre à la législation de s'adapter sans difficultés à l'évolution sociale
[10]. Dans plusieurs cantons, des démarches préliminaires en vue d'une révision totale de la Constitution furent entreprises ou poursuivies ; les citoyens argoviens approuvèrent le principe d'une telle révision de même que celui de l'élection d'un conseil constitutionnel
[11].
L'image de la Suisse
A l'intérieur comme à l'extérieur de nos frontières,
l'image de la Suisse a suscité un intérêt croissant. Si de son côté la Suisse fit un effort pour réactiver sa politique étrangère, on a pu constater aussi que l'étranger s'intéressait de plus en plus à nous. De nombreuses études plus ou moins poussées ont été publiées sur notre pays, jugé souvent d'un oeil très critique
[12]. Les visites que nous firent les délégations de presse chinoise et soviétique confirmèrent l'attention que nous accordent les grandes puissances de l'Est
[13]. De nouvelles réactions négatives enregistrées en Italie furent la conséquence du jugement rendu dans l'affaire de la catastrophe de Mattmark (1965), verdict qui disculpait la Direction des travaux
[14]. D'un autre côté, en Suisse même, on se mit à repenser d'une manière plus systématique notre présence dans le monde
[15]. Des auteurs suisses esquissèrent de nouveaux portraits de leur pays : le journaliste Roger Nordmann, optimiste, mettait en évidence nos relations et notre ouverture au monde, tandis que l'écrivain Otto F. Walter brossait un tableau sombre, respirant malaise et fatalité
[16]. Des réfugiés tchécoslovaques apportèrent une contribution originale en dépeignant les rapports qu'ils entretiennent avec notre pays
[17].
Etudes prospectives
La remise en question de la Suisse d'aujourd'hui s'est prolongée dans une interrogation sur son avenir et sur les possibilités de l'assumer au moyen de la
planification. Le groupe de travail Kneschaurek a poursuivi la publication de ses études prospectives. Leurs conclusions furent utilisées par le Conseil fédéral pour l'élaboration des Grandes lignes de la politique gouvernementale. Mais elles suscitèrent de vives critiques, notamment celles de l'économiste Walter Wittmann qui, à son tour, publia une analyse de la société d'abondance, étude accompagnée de thèses réformatrices
[18]. Les études relatives aux conceptions directrices publiées par l'Institut pour l'aménagement national, régional et local de l'EPF de Zurich, furent achevées : leur rapport final comprend neuf variantes possibles, qui sont comparées à une évolution non dirigée
[19]. La discussion sur les rapports entre la croissance économique et l'environnement s'intensifia à la faveur d'une enquête sur l'évolution de l'humanité, effectuée par une équipe de chercheurs de l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT) pour le compte du Club de Rome, enquête aux conclusions fort pessimistes
[20]. Un public plus large s'intéressa aux possibilités d'intervention et de participation qu'offre la démocratie dans le processus de planification
[21]. Comme exemples d'une telle participation, on proposa aux lecteurs d'un journal et à des écoliers des concours d'idées directrices dont les résultats furent publiés
[22]. La Fondation pour la collaboration confédérale a constitué une collection d'informations, au moyen de colloques sur la situation du fédéralisme, dans l'intention d'élaborer des propositions pour son évolution
[23].
[2] Cf. infra, p. 39 (traité), 61 (construction), 66 s. (monnaie), 105 s. (logement et loyers) et 123 (vieillesse).
[3] Cf. infra, p. 63 s. (conjoncture), 100 (aménagement) et 128 s. (enseignement).
[4] Cf. infra, p. 50 s. et 54.
[6] Cf. conférence du CF Brugger devant la Société suisse de culture civique (Documenta, 1972, no 5, p. 9 ss.), conférence du professeur Karl Schmid au Forum Helveticum (GdL, 152, 1/2.7.72 ; 158, 8/9.7.72 ; texte original : NZZ, 164, 9.4.72) et devant les ambassadeurs suisses (Documenta, 1972, no 5, p. 43 ss.) ; Kurt Bächtold (CE), « Die notwendige Evolution der Demokratie » , in Schweizer Monatshe/te, 52/1972-73, p. 32 ss. ; discours du 1er août du CN Nauer (ps, ZH) (AZ, 178, 2.8.72) et conférence de Kurt Müller à Erlenbach (NZZ, 609, 31.12.72).
[7] Cf. infra, p. 49, note 2.
[8] Hans Tschäni, Die Diktatur des Patriotismus, Für eine freiere Schweiz, Basel 1972.
[9] Intervention du CN Binder (pdc, AG) : BO CN, 1972, p. 643.
[10] Thomas Dunn, Die richtige Verfassung, Zürich 1972 (Zürcher Beiträge zur Rechtswissenschaft, 371).
[11] AG : cf. infra, p. 142. En 1972, on institua des commissions d'experts dans les cantons de BL (NZ, 235, 2.6.72) et de FR (Lib., 238, 13.7.72) ; des experts étaient déjà au travail à Glaris (NZZ, 397, 26.8.72 ; APS, 1970, p. 164), à Saint-Gall (Totalrevision der Kantonsverfassung ? Drei Gutachten, St. Gallen 1972, Der Kanton St. Gallen heute und morgen, 1), à Schwyz (APS, 1967, p. 133) et à Soleure (BN, 277, 22.8.72).
[12] Cf. des articles de presse en Allemagne de l'Ouest (NZ, 239, 5.6.72), en Angleterre (GdL, ats, 132, 8.6.72 ; 138, 15.6.72 ; NZ, 243, 9.6.72), en Norvège (NZZ, 337, 21.7.72), en Finlande (NZZ, 118, 103.72 ; TLM, 70, 10.3.72), aux USA (TG, 50, 29.2.72), en Allemagne de l'Est (TA, 299, 22.12.72) et à Hongkong (Ww, 35, 30.8.72) ainsi que Anthony Sampson, Die neuen Europäer, München 1972 et l'ouvrage scientifique de Jean Rohr, La Suisse contemporaine, Paris 1972.
[13] Chine : NZZ, 65, 8.2.72 ; 263, 8.6.72 ; TG, 37, 14.2.72. URSS : NZZ (ats), 287, 22.6.72 ; TG, 151, 30.6.72 ; GdL, 183, 7.8.72 ; VO, 186, 12.8.72. Cf. infra, p. 41.
[14] GdL, 54, 4/5.3.72 ; NZ, 106, 5.3.72 ; NZZ, 468, 7.10.72 ; TG, 237, 10.10.72 ; cf. infra, p. 88.
[15] Cf. M.-A. Kämpfen, Der Staat und seine Präsenz im Ausland, insbesondere die rechtlichen Strukturen der schweizerischen Landeswerbung, Zürich 1972. Cf. aussi infra, p. 47.
[16] Roger Nordmann et Paul Keller, La Suisse, notre aventure, Lausanne 1972 ; Otto F. Walter, Die ersten Unruhen, Reinbek b. Hamburg 1972. Cf. aussi Ludwig A. Minelli, Schweiz, Liechtenstein, Hannover 1972 (Edition Zeitgeschehen, 12).
[17] Das kalte Paradies, Emigration — Integration — Konfrontation, hrsg. v. E. A. Peschler, Frauenfeld 1972.
[18] Sur les études prospectives, cf. infra, p. 86 et 91 ; sur l'élaboration des Grandes lignes, cf. infra, p. 19 ; sur la critique du professeur W. Wittmann, cf. infra, p. 59, note 6.
[21] Cf. ASSP, 12/1972, 2e partie : La participation du public à la planification (textes du Congrès 1972 à Rüschlikon de l'Association suisse pour la recherche prospective) ; critique : NZ, 162, 10.4.72.
[22] Cf. NZ, 335, 28.8.72 (concours sur les conceptions directrices de l'Institut pour l'aménagement national, régional et local) ; La Suisse en l'an 2000 — telle qu'elle pourrait être et telle que nous la souhaitons, Kreuzlingen 1972 (travaux de concours des écoles du canton de FR).
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