Année politique Suisse 1972 : Grundlagen der Staatsordnung / Rechtsordnung
Droit de vote
La victoire que constituait l'introduction en 1971 du suffrage féminin sur le plan fédéral entraîna la
chute de la plupart des derniers bastions cantonaux et communaux de la démocratie masculine
[10]. Au cours des quatre premiers mois de l'année, Saint-Gall, Uri, Schwyz et Nidwald reconnurent à la femme une égalité politique intégrale, tandis que le canton des Grisons, où le suffrage féminin était déjà reconnu dans la plupart des communes, se borna à l'introduire au niveau du canton et de l'arrondissement. Obwald, en automne, suivit l'exemple des Grisons alors qu'au même moment, la dernière de ses communes, Kerns, le repoussait. La Landsgemeinde d'Appenzell Rhodes-Extérieures l'imposa aux communes mais refusa de l'étendre au canton, craignant surtout qu'en faisant passer de 14.000 à 29.000 le nombre des électeurs, elle ne donne le coup de grâce à la vieille assemblée démocratique
[11]. Dans les Rhodes-Intérieures, une première démarche fut introduite en faveur d'une égalité politique totale.
Nouveau pas vers l'accroissement du nombre des citoyens actifs, il fut question, à l'échelon national et dans plusieurs cantons,
d'abaisser à 18 ans la majorité politique. Un groupe d'Alémaniques s'occupant des problèmes de la jeunesse lança dans ce but une initiative fédérale populaire : les signatures devaient en être récoltées par des jeunes gens, ceci précisément afin de permettre aux classes d'âge concernées de manifester leur intérêt pour la chose publique
[12]. Le Conseil national examina une autre démarche visant, contrairement au précédentes, non seulement à abaisser la majorité politique, mais encore la majorité civile ; il la rejeta, l'estimant trop contraignante par sa forme, qui était celle d'une motion
[13]. Cette décision négative tenait compte du fait que peu de temps auparavant les souverains de trois cantons — Bâle-Campagne, Genève et Schaffhouse — avaient refusé, souvent à de fortes majorités, d'abaisser à 18 ans l'âge électoral ; les parlements cantonaux de Berne et de Zurich s'étant d'ailleurs exprimés dans le même sens
[14]. Pourtant, des démarches analogues furent tentées dans plusieurs cantons
[15].
La question du droit de vote des étrangers prit une tournure nouvelle : ce ne furent plus simplement des milieux suisses qui le proposèrent comme un moyen d'intégration, mais les étrangers eux-mêmes. En novembre, les associations des travailleurs italiens et espagnols domiciliés en Suisse remirent à la Chancellerie fédérale une pétition qui réclamait entre autres, pour les travailleurs étrangers, un droit de décision dans tous les problèmes qui les concernent directement
[16]. Un premier parlement cantonal se prononça en faveur du droit de participation pour les étrangers : dans le canton de
Neuchâtel, où les étrangers qui y sont établis possèdent depuis 1849 le droit de vote pour les affaires communales, le Grand Conseil accepta — contre l'avis du gouvernement — deux motions, l'une socialiste, l'autre communiste, qui réclamaient une extension de ce droit aux affaires cantonales. Dans le canton de Vaud, une députée socialiste présenta une motion semblable. Dans celui de Berne, le Grand Conseil approuva une révision de loi en vue d'introduire le droit de vote des étrangers dans les Eglises reconnues par l'Etat
[17]. Mais une démarche entreprise au Grand Conseil argovien, tendant à créer un parlement consultatif pour les étrangers établis dans les communes d'une certaine importance, resta sans succès
[18].
[10] Cf. infra, p. 143 s., et APS, 1971, p. 13 s.
[11] NZZ, 343, 25.7.72. Dans les cantons de GL, NW et OW, on a agrandi le « Ring » pour recevoir les citoyennes (NZZ, 66, 9.2.72 ; TG, 110, 12.5.72 ; TA, 260, 7.11.72 ; Vat., 264, 13.11.72).
[12] Heisses Schülerbuch, Urnäsch 1972 ; cf. BN, 160, 18.4.72 ; TG, 90, 18.4.72.
[13] Motion Schaller (prd, BS), rejetée par le CN (BO CN, 1972, p. 748, 766, 1974 ss.). Cf. APS, 1970, p. 14.
[14] Votations cantonales à BL : 18.199 oui, 19.716 non ; à GE : 22.474 oui, 37.046 non ; à SH : 5166 oui, 24.783 non. Cf. infra, p. 143 s. A Zurich, la question fut traitée lors de la révision de la loi électorale (AZ, 44, 22.2.72), à Berne, lors de la révision de la loi sur les communes (Tw, 208, 5.9.72).
[15] GL : proposition du PDC (Bund, 264, 9.11.72) ; LU : initiative populaire (AZ, 128, 3.6.72) ; NE : motion (TLM, 347, 13.12.72) ; UR : motion (Vat., 238, 12.10.72). Cf. aussi BN (ats), 372, 11.12.72.
[16] Pétition (75.000 signatures) de la Federazione delle colonie libere italiane in Svizzera et de l'Asociaci6n de trabajadores emigrantes espanoles in Suiza (JdG, ats, 162, 13.7.72 ; GdL, ats, 281, 30.11.72).
[17] Neuchâtel : TLM, 285, 11.10.72 ; Vaud : GdL, 268, 15.11.72 ; Berne : cf. infra, p. 161. Les étrangers disposent du droit de vote en matière ecclésiastique dans un certain nombre de cantons, notamment au sein des Eglises réformées (renseignements de secrétariats ecclésiastiques).
[18] NZ, 466, 22.12.72. Cf. un cas exemplaire en Allemagne occidentale (Bund, 177, 31.7.72).
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