Année politique Suisse 1972 : Grundlagen der Staatsordnung / Institutionen und Volksrechte
Parlement
Les efforts entrepris pour
renforcer la position du parlement furent couronnés d'un certain succès. Ainsi, les initiatives présentées sous la coupole fédérale en faveur du développement de ses services administratifs et pour une meilleure protection des députés contre la surveillance de leur correspondance et de leurs communications téléphoniques, trouvèrent enfin une solution juridique. Le Conseil national ayant renoncé, fin 1971, à une autonomie constitutionnelle des services administratifs du parlement, le Conseil des Etats, au printemps, en approuva l'organisation conformément aux voeux de la chambre du peuple
[16]. Ce n'est qu'en automne que l'on trouva une réglementation de l'immunité parlementaire. Le législatif approuva une proposition du conseiller fédéral Furgler, selon laquelle une commission composée des présidents et vice-présidents des Chambres pourra autoriser le contrôle de la correspondance et des communications téléphoniques ainsi que l'ouverture d'autres enquêtes en cas de procédure pénale contre les parlementaires fédéraux ou les magistrats par suite d'activités en rapport avec leur position officielle. Quant à leur arrestation, elle demeurera l'objet d'un arrêté des Chambres
[17]. On tenta aussi d'améliorer la condition du parlementaire en augmentant les indemnités. Par suite du renchérissement et sur la base d'une enquête relative à la rationalisation du travail parlementaire, les chefs de groupe proposèrent une révision de la loi sur les indemnités. Sans opposition de principe, l'indemnité annuelle fixe octroyée à chaque député à partir de 1968 fut portée de 3000 à 10.000 francs ; les indemnités de présence et les prestations pour les frais furent augmentées, et en lieu et place du remboursement des frais de voyage, on offrit un abonnement général des chemins de fer. Au Conseil national, le socialiste bâlois Gerwig souligna que l'amélioration de la situation financière du parlementaire ne le libérait pas de l'insatisfaction qu'il avait à devoir mener en milicien la vie d'un politicien professionnel et proposa l'engagement d'assistants de groupe
[18]. C'est à une rationalisation des méthodes de travail que devrait aussi aboutir un projet du Secrétariat général de l'Assemblée fédérale recommandant la tenue de sessions mensuelles
[19].
Quant à l'organisation interne du parlement et à l'indépendance personnelle des parlementaires, la question rebondit à propos de l'admission de l'objecteur Villard (ps, BE) au sein de la Commission militaire du Conseil national. Comme on le verra plus bas, le groupe socialiste maintint son droit, sanctionné par l'usage, à désigner lui-même ses représentants au sein des commissions parlementaires. En revanche, les socialistes eux-mêmes se disputèrent pour savoir si leurs représentants devaient se retirer de la Commission au cas où le groupe le leur demandait. Le refus qu'opposa le Bureau du Conseil national à l'admission d'A. Villard entraîna la présentation de deux initiatives parlementaires. Le président du Parti socialiste, Schmid (AG), exigea, au nom de ses collègues, le droit imprescriptible de tous les groupes de désigner leurs propres représentants au sein des commissions parlementaires permanentes ; l'indépendant Jaeger (SG) voulait confier aux Chambres le soin de les composer. L'initiative socialiste provoqua la réaction négative de certains milieux bourgeois
[20].
Le Conseil fédéral a envisagé dans ses Grandes lignes une
nouvelle délimitation des cercles pour les élections au Conseil national ; et ceci pour les élections fédérales de 1975 déjà. En mai, la Chancellerie fédérale soumit trois variantes à la procédure de consultation : une solution spéciale pour le Jura comprenant un éventuel droit d'option pour la population bilingue de Bienne ; une subdivision des cantons à forte population au moyen d'une loi fédérale ; ou la compétence accordée à ces cantons d'établir eux-mêmes une subdivision
[21]. En ce qui concerne le Conseil des Etats, la tendance à l'uniformisation des procédures électorales s'est accentuée : dans le canton de Fribourg, l'électorat sanctionna l'introduction du scrutin populaire ; dans le canton de Berne, les socialistes qui, en 1971, avaient à nouveau été prétérités, lancèrent une initiative populaire visant à dessaisir de cette prérogative électorale le parlement cantonal, le dernier en Suisse à élire ses députés au Conseil des Etats, et garantissant l'octroi d'un siège au Jura. Mais on mit en doute la compatibilité d'une telle garantie avec l'article 4 de la Constitution fédérale, ainsi que la possibilité de satisfaire les revendications jurassiennes si l'on se fondait sur une élection populaire effectuée sur l'ensemble du territoire cantonal
[22].
[16] BO CE, 1972, p. 147 s. Cf. APS, 1971, p. 22. Texte de l'arrêté : RO, 1972, no 15, p. 705 ss.
[17] BO CE, 1972, p. 71 s., 572 ; BO CN, 1972, p. 1002 s. Texte définitif : FF, 1972, II, no 42, p. 1026 ss.
[18] Initiative des présidents de groupe : FF, 1972, I, no 9, p. 609 ss. Débats : BO CN, 1972, p. 73 ss., 194 ; BO CE, 1972, p. 87 ss. Texte définitif : RO, 1972, no 27, p. 1516 ss. Cf. APS, 1968, p. 12 s. La nouvelle loi codifie pour la première fois les indemnités pour les membres du CE, tout en respectant la compétence des cantons d'indemniser leurs représentants en ce qui concerne le principal de leur activité.
[19] TA, 204, 2.9.72 ; 301, 27.12.72.
[20] Cas Villard : cf. APS, 1971, p. 60 et infra, p. 56. Initiatives parlementaires : Délib. Ass. féd., 1972, I/II, p. 10 ; critiques : Bund, 68, 21.3.72 ; Vat., 68, 21.3.72 ; BN, 129, 25/26.3.72.
[21] Bund, 102, 2.5.72 ; NZZ, 202, 2.5.72 ; TG, 102, 2.5.72. Cf. FF, 1972, I, no 15, p. 1069 et APS, 1971, p. 22.
[22] Fribourg : cf. infra, p. 29. Berne : Tw, 213, 11.9.72 ; 214, 12.9.72 ; 295, 15.12.72. Doutes : Ldb, 212, 13.9.72 ; TG, 214, 13.9.72.
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