Année politique Suisse 1975 : Sozialpolitik / Bevölkerung und Arbeit
 
Marché du travail
La situation sur le marché du travail s'est caractérisée par un développement rapide du chômage. De 1030 en décembre 1974 (0,035 % de la population active), le nombre de chômeurs totaux passe à 26 258 (0,9 %) en décembre 1975 [3]. Cependant, basés sur un recensement qui ne concerne que les chômeurs inscrits auprès des offices du travail, ces chiffres ont été l'objet d'une vive controverse. Ezio Canonica, président de l'USS estimait en janvier de cette année que le nombre réel des chômeurs se situait entre 10 000 et 12 000, alors que l'OFIAMT n'en recensait que 2129. Cette évaluation recoupait celle du vice-président de l'Union suisse des arts et métiers, Markus Kamber, qui avançait le chiffre minimum de 10 000. Toutefois les approximations syndicales successives ne restèrent pas sans critique [4]. L'appareil statistique national sera quelque peu amélioré à partir de juillet, l'ordonnance déjà citée incluant le chômage partiel dans les données relatives au marché du travail. Ce qui permettra à l'OFIAMT de dénombrer 136 661 chômeurs partiels à fin décembre [5].
Pour la première fois depuis plus de vingt ans, l'USS appela ses membres à manifester au niveau national, le ler mars, « pour la sécurité de l'emploi - contre la baisse des salaires ». Dans plus d'une trentaine de villes et devant plusieurs milliers de participants, les orateurs syndicaux développèrent les thèmes de la solidarité nécessaire face à la crise, de la sécurité de l'emploi et du respect des conventions collectives [6]. C'est également pour réclamer des mesures prioritaires en faveur de l'emploi que la conférence des secrétaires de la Fédération suisse des travailleurs de la métallurgie et de l'horlogerie (FTMH) fit parvenir une résolution au Conseil fédéral, aux Chambres, à la Banque nationale et aux associations patronales. Le programme conjoncturel urgent du Parti socialiste et de l'Union syndicale, présenté au mois de septembre, place la sauvegarde du plein emploi dans un cadre beaucoup plus vaste de relance générale de l'économie. La lutte contre le chômage y est également envisagée à travers une réduction progressive de la durée légale du travail [7].
Dans l'immédiat, les partenaires sociaux signèrent le 29 avril un accord sur les règles à suivre en cas de fermetures d'entreprises ou de licenciements, afin d'en atténuer autant que possible les conséquences économiques et sociales. Cet accord est constitué par une série de recommandations communes, allant de la nécessité d'une information plus large à l'établissement d'un plan social limitant les effets salariaux et sociaux des licenciements, en passant par l'obligation de l'assurance-chômage et la collaboration avec les autorités communales et cantonales. Il appartiendra aux fédérations des associations faîtières signataires de le valider, elles seules pouvant conclure des conventions liant leurs membres [8]. Sur le plan de l'information préalable aux licenciements, relevons la plainte déposée par le gouvernement soleurois contre deux firmes horlogères accusées de n'avoir pas respecté leurs obligations en la matière [9].
Phénomène nouveau pour le pays, 29,7 % des chômeurs ont moins de 24 ans ; durant l'année écoulée, le pourcentage de sans-travail âgés de moins de vingt ans a triplé, alors qu'il a quadruplé pour ceux de moins de 24 ans. Fin octobre, 45,7 % des chômeurs avaient moins de trente ans [10]. Ce développement rapide du chômage des jeunes ne pouvait laisser indifférents les partenaires sociaux, ni l'exécutif fédéral. Aussi, le 23 juin, l'USS proposait un plan en six points pour protéger l'apprentissage et éliminer au maximum les risques de chômage pour les jeunes, en particulier par une connaissance plus approfondie des besoins du marché du travail [11]. Pour Klaus Hug, secrétaire de l'Union centrale des associations patronales, l'accent est à mettre sur l'augmentation de la mobilité professionnelle à travers le recyclage et la formation, à condition qu'ils s'appuient sur la volonté et l'initiative individuelles [12]. Début décembre, un groupe de travail de l'OFIAMT publiait sur cette question un ensemble de propositions telles que créations d'ateliers interentreprises, réorganisation du degré supérieur de la scolarité, mise sur pied provisoire de camps de jeunesse. Pour ce groupe, la lutte contre le chômage des jeunes ne peut résulter que d'un ensemble de décisions prises dans de multiples secteurs [13].
 
[3] La Vie économique, 48/1975, p. 1 ; 49/1976, p. 1 et 38. Les branches les plus touchées sont la métallurgie (6878), les professions commerciales et administratives (4353), le bâtiment et génie civil (2591), le personnel technique (2114), l'horlogerie et bijouterie (1803).
[4] LNN, 17, 22.1.75 ; 50, 1.3.75 ; 24 Heures, 32, 1.2.75. Critique : Revue des faits de la semaine, 36, 9.9.75. Extension de la statistique : RO, 1975, no 29, p. 1325 s.
[5] La Vie économique, 49/1976, p. 51. Sur la statistique du marché du travail : Rapp. gest., 1975, p. 253. Pour les lacunes de la statistique nationale : Forum Statisticum, 1976, no 5.
[6] TLM (ats), 61, 2.3.75 ; NZZ (sda), 51, 3.3.75 ; gk, 9, 6.3.75.
[7] FTMH : NZZ (sda), 59, 12.3.75 ; VO, 59, 12.3.75 ; gk, 10, 13.3.75. Pour le programme conjoncturel urgent du PS et de l'USS : cf. supra, part. I, 4a (Konjunkturpolitik).
[8] NZZ, 99, 30.4.75 ; TG, 99, 30.4.75. Les associations ayant signé cet accord sont : l'Union centrale des associations patronales suisses, le Vorort de l'Union suisse du commerce et de l'industrie, l'USAM, l'USP, l'USS, la Confédération des syndicats chrétiens de la Suisse, l'Association suisse des salariés évangéliques, l'USSA et la FSE. Texte de l'accord : gk, 16, 30.4.75, annexe.
[9] NZZ, 48, 27.2.75. Le POCH a également déposé plainte contre l'une des firmes, l'accusant d'avoir fait signer à ses ouvriers une déclaration d'accord sous contrainte.
[10] 24 Heures (ats), 222, 25.9.75 ; JdG, 285, 6.12.75 ; TA, 284, 6.12.75 ; La Vie économique, 48/1975, p. 522.
[11] Revue syndicale suisse, 67/1975, p. 335 ss.
[12] K. Hug, « Jugendarbeitslosigkeit. Bildungspolitische Massnahmen bei Beschäftigungsrückgang », in Wirtschaftspolitische Mitteilungen, 31/1975, no 10. .
[13] JdG, 285, 6.12.75 ; NZZ, 284, 6.12.75 ; 24 Heures, 284, 6.12.75.