Année politique Suisse 1976 : Sozialpolitik / Bevölkerung und Arbeit
 
Marché du travail
La situation sur le marché du travail s'est en même temps aggravée et stabilisée par rapport à l'année précédente. Le nombre de chômeurs complets a fortement varié selon les périodes, s'élevant à 32 216 en février pour descendre à 12 986 en octobre et remonter à 17 401 en décembre. En moyenne annuelle il y a eu 20 703 chômeurs, soit 0,6 % de la population active. Les branches les plus touchées restent la métallurgie et les professions commerciales. L'inégalité du chômage est également régionale : en chiffres absolus, Zurich, Berne et Vaud viennent en tête ; en comparaison avec la population active, Neuchâtel, Soleure, Bâle-Ville et Schaffhouse sont les cantons qui connaissent les taux les plus élevés [3]. L'évolution du chômage partiel a été plus satisfaisante : si en janvier on comptait encore 120 573 chômeurs partiels (représentant 3 838 498 heures chômées), en novembre, ils n'étaient plus que 19 821 (638 696 h.) cependant qu'en décembre la tendance s'inversait (26 790 chômeurs et 1 071 154 h.) [4].
La persistance de cet état de fait a marqué l'opinion publique, comme l'indique un sondage réalisé durant l'été, et selon lequel le chômage est en tête des préoccupations actuelles ; les manifestations du ler mai exprimèrent une même inquiétude [5]. Celle-ci s'accompagne souvent d'un sentiment d'insécurité et de peur devant l'avenir. Cependant, des réactions plus combatives ont également vu le jour ; à preuve, la création et l'activité de plusieurs comités de chômeurs locaux dont la coordination nationale déposa fin juin une pétition, munie de près de 11 000 signatures. Elle proposait une série de mesures destinées à améliorer la situation matérielle des sans-travail et à empêcher leur utilisation comme moyen de pression sur les salaires [6]. On a également suggéré de dispenser les chômeurs du paiement des impôts fédéraux et de les exonérer des cotisations AVS [7]. L'armée, pour sa part, a mis en place, durant les écoles de recrues, des offices de liaison pour les questions sociales afin de venir en aide aux soldats sans emploi ; des dispositions similaires ont été prises lors de certains cours de répétition [8]. Une autre méthode de lutte a visé à accroître la mobilité professionnelle et géographique des demandeurs d'emploi, domaine dans lequel, selon J.-P. Bonny, directeur de l’OFIAMT, de nombreuses barrières psychologiques subsistent encore. C'est ainsi que des sanctions ont été prises contre les chômeurs qui refusaient, de manière répétée, le travail que leur offraient les offices cantonaux [9]. Plus positivement, et en collaboration avec ces mêmes organismes, l'OFIAMT publie, depuis le milieu de l'année, un bulletin intercantonal des places vacantes [10].
Des interventions plus générales ont été faites par l'Etat sur le marché du travail. Fin janvier, le Conseil fédéral a proposé aux Chambres l'adoption d'un train de mesures visant à procurer du travail. En l'occurrence, il s'agissait moins de créer des places de travail supplémentaires que d'enrayer la dégradation de l'emploi, soit en encourageant l'investissement des collectivités publiques ou en passant commande, principalement aux secteurs de la construction et des métaux et machines. Dans ce cadre, une modification de la loi sur le service de l'emploi a été présentée et acceptée par le parlement. Cette revision permet d'étendre par des subsides l'encouragement à l'intégration dans la vie économique de personnes en quête d'emploi. Elle concerne donc prioritairement les jeunes ayant achevé leur formation [11]. Ceux-ci ont en effet été particulièrement touchés par la diminution des postes de travail ; selon l'enquête effectuée conjointement par l'OFIAMT et le DMF lors des écoles de recrues d'été, 20,7 % des militaires étaient encore sans emploi à fin août [12]. C'est la raison pour laquelle le conseiller national Marthaler (udc, BE) a demandé, dans un postulat développé à fin juin, que le Conseil fédéral prenne des mesures pour maintenir chez les maîtres d'apprentissage une volonté de dispenser une formation professionnelle et pour obliger les cantons et les communes à venir en aide aux jeunes chômeurs [13]. La Jeunesse communiste suisse a, quant à elle, remis une pétition au parlement exigeant un droit au travail et à la formation continue. Cette action avait reçu le soutien de la Jeunesse socialiste qui, lors de son congrès, a réclamé la création par l'Etat et les partenaires sociaux de multiples ateliers d'apprentissage. Un appui avait également été fourni par la Jeunesse de la Fédération des travailleurs de l'horlogerie et de la métallurgie (FTMH), qui a repris la double revendication de cette pétition dans sa « charte de la jeunesse » [14]. Dans les cantons de Bâle-Ville et de Zurich, les POCH ont déposé des initiatives « de crise » pour protéger les travailleurs des effets de la récession [15].
 
[3] La Vie économique, 50/1977, p. 9 s.
[4] La Vie économique, 49/1976, p. 162 ; 50/1977, p. 30 et p. 90.
[5] Sondage : Schweizerische Kreditanstalt, Bulletin, 82/août-septembre, p. 11 ss. Manifestations : voir la presse des 2 et 3.5.76.
[6] Zeitdienst, 1, 9.1.76 ; 7, 20.2.76 ; 10, 12.3.76 ; 15, 16.4.76 ; 31, 20.8.76 ; VO, 96, 28.4.76 ; 24 heures (ats), 147, 26.6.76 ; FA, 47, 27.6.76.
[7] Questions ordinaires du CN Ziegler (ps, GE) : BO CN, 1976, p. 867 s. (AVS) et BO CN, 1976, p. 398 (impôts).
[8] Rapp. gest., 1976, p. 171 ; TA, 12, 16.1.76 ; 16, 21.1.76.
[9] NZZ (sda), 41, 19.2.76 ; TLM, 51, 20.2.76 ; Lib., 121, 25.2.76. La sanction consiste à suspendre le versement des allocations.
[10] JdG (ats), 150, 30.6.76.
[11] FF, 1976, I, no 9, p. 653 ss. ; BO CN, 1976, p. 250 ss., 370, 390 ; BO CE, 1976, p. 45 ss., 160, 175 ; cf. supra, part. I, 4a (Konjunkturpolitik).
[12] VO (ats), 232, 8.10.76 ; TA, 115, 19.5.76. Cf. également infra, part. I, 7d (Jeunesse).
[13] BO CN, 1976, p. 834 s.
[14] Jeunesse communiste : VO, 54, 6.3.76 ; 72, 27.3.76. Jeunesse socialiste : JdG (ats), 76, 31.3.76. Jeunesse FTMH : SMUV-Zeitung, 21, 26.5.76.
[15] Voir infra, part. II, 5d.