Année politique Suisse 1976 : Sozialpolitik / Bevölkerung und Arbeit
 
Temps de travail
La réduction du temps de travail a été, et semble devoir rester, un thème important de la politique sociale. Durant la session de mars, le parlement avait à débattre de l'initiative pour l'introduction de la semaine de 40 heures. Les commissions des deux conseils s'étaient auparavant majoritairement ralliées à la proposition du gouvernement de rejet de l'initiative sans présentation de contre-projet. Deux membres de ces commissions, les socialistes Donzé (GE) pour le Conseil des Etats et Renschler (ZH) pour le Conseil national, défendirent une position minoritaire demandant aux Chambres l'élaboration d'un contre-projet introduisant progressivement la semaine de 40 heures. Ni l'un ni l'autre ne furent entendus, pas plus que les conseillers nationaux Carobbio (psa, TI) et Muret (pdt, VD) qui, le premier au nom des initiateurs, le second au nom du groupe du PdT, proposèrent l'acceptation de l'initiative. On notera l'intervention de E. Canonica (ps, ZH), qui reprocha au message du Conseil fédéral une hostilité de principe à la réduction du temps de travail [45].
A ce moment-là, les chances de l'initiative de remporter ne serait-ce qu'un succès d'estime, paraissaient bien minces. La situation commença à se modifier lorsque l'USS, vu les résultats infructueux des négociations avec les associations patronales suspendues début septembre, se décida à lancer à mi-octobre sa propre initiative en faveur d'une réduction, progressive, de la durée du travail. C'était reconnaître une certaine validité au principe de celle-ci [46]. Plus progressiste, la Fédération suisse des typographes (FST) décida de soutenir l'initiative des POCH, du PSA et de la Ligue marxiste révolutionnaire, alors que le congrès VPOD ne s'y opposant pas, laissa la liberté de vote à ses membres. Enfin, le congrès du PSS, de manière surprenante, décida à fin octobre, d'apporter son soutien à l'initiative, prenant ainsi le contrepied de l'USS [47]. La divergence créée entre ces deux organisation dont les liens sont connus, devra, selon les déclarations de E. Canonica, disparaître lors de la lutte en faveur de l'initiative lancée par l'Union syndicale [48]. La décision de lancer celle-ci, si elle a rapproché le syndicat du parti, a cependant créé des dissensions à l'intérieur de la centrale. En effet, à la position de pointe de la FST est venu s'ajouter le refus des délégués de la FTMH, qui répétèrent le choix de la voie contractuelle fait par leur puissante fédération [49]. Le courant en faveur de l'introduction immédiate des 40 heures prit une importance suffisante pour que certains, tel le PRD genevois, se déclarent d'accord avec le principe, mais pas avec le moyen proposé [50]. A l'argument selon lequel la réduction du temps de travail permettrait une diminution importante du chômage, ses adversaires répliquèrent qu'elle entraînerait, au contraire, de nombreuses fermetures d'entreprises. Le résultat de la votation fut interprété différemment. Pour les adversaires de l'initiative, le refus du peuple suisse exprimait un rejet massif d'une politique aventuriste [51]. Les initiateurs soulignèrent, quant à eux, l'importance de la propagande adverse, le peu de vigueur de la campagne menée par le PS, voire par le PdT, et les pourcentages d'acceptants élevés obtenus là où un large front des organisations ouvrières avait été réalisé. Il leur apparaît également positif d'avoir obligé le mouvement syndical à remettre à l'ordre du jour cette revendication traditionnelle du mouvement ouvrier [52].
 
[45] BO CE, 1976, p. 283 ss. BO CN, 1976, p. 333 ss.
[46] VO, 202, 2.9.76 ; 241, 19.10.76 ; FA, 134, 6.10.76 ; Les services publics, 48, 25.11.76.
[47] JdG, 255, 1.11.76 ; TG, 255, 1.11.76. Cf. également infra, part. III a (Parti socialiste) et b (Associations de travailleurs).
[48] Ww, 46, 17.11.76. Cf. aussi l'interview de H. Hubacher, président du PSS, in LNN, 261, 8.11.76.
[49] FTMH : SMUV-Zeitung, 42, 20.10.76 ; 43, 27.10.76.
[50] TG, 280, 30.11.76. Cf. infra, part. III a (Parti radical-démocratique).
[51] L'initiative fut rejetée par 1 315 882 non contre 370 228 oui et par tous les cantons (FF, 1976, I, p. 556 s.), avec une participation de 45,2 % (Rapp. gest., 1976, p. 3).
[52] TLM, 285, 6.12.76 ; Bresche, 81, 9.12.76 ; Positionen, no 10, fév. 1977.