Année politique Suisse 1978 : Sozialpolitik / Soziale Gruppen
Politique de la jeunesse
Qu'est-il advenu des courants de mai 1968? Cette question s'est posée en 1978 au sujet de la politique de la jeunesse
[36]. La jeunesse d'aujourd'hui ne se caractérise-t-elle que par la
désillusion et la résignation, la peur de l'avenir, le désintérêt politique et social, l'envie de consommer et le souci de faire carrière? Ou les courants antiautoritaires nés à la fin des années «60» ont-ils au contraire favorisé l'éclosion d'une jeunesse plus résolue dans ses aspirations, plus ouverte et plus libre dans son comportement pour qui la critique est devenue naturelle? Quoi qu'il en soit, la situation économique a incontestablement entraîné un mouvement d'adaptation: les apprentis se soumettent plus facilement pour conserver leur place d'apprentissage et les étudiants se plient à la discipline universitaire pour obtenir de bonnes qualifications. Le but n'est plus de créer un monde nouveau, mais de s'intégrer à celui qui existe
[37]. Parallèlement, on observe une chute de l'intérêt et de l'activité politiques des jeunes
[38].
Prévue dès 1976, une
commission extraparlementaire permanente a été créée afin de mieux tenir compte des aspirations de la jeunesse dans la politique fédérale. Dans une première phase elle devrait élaborer des propositions concrètes. Parmi les problèmes brillants se trouvent par exemple des questions aussi différenciées que la prévention contre la toxicomanie et l'introduction de la préscolarité dans les régions de montagne
[39]. Les difficultés rencontrées par les enfants des immigrés constituent de plus en plus un problème réel de la politique de la jeunesse en Suisse. La langue qui les handicape déjà durant leur scolarité obligatoire limite ensuite encore leurs possibilités de formation professionnelle
[40]. Selon le directeur de l'OFIAMT, J.-P. Bonny, la situation sur le marché des places d'apprentissagen'est plus alarmante. Les statistiques montrent pourtant qu'un chômeur sur trois est âgé de moins de 25 ans et des enquêtes ont révélé que le libre choix de la profession était de ce fait véritablement restreint. Une étude du Bureau international du travail (BIT) a montré que le chômage des jeunes n'était pas le problème principal de la nouvelle génération. Mais l'entrée dans le monde du travail agit comme un choc, qui se traduit, clans les 12 pays étudiés, par une consommation accrue de drogues, une augmentation de la criminalité juvénile et une croissance du taux de suicides
[41].
Après l'émeute du Globus à Zurich en 1968, les jeunes Suisses n'ont jamais abandonné la revendication de
locaux à leur usage. Les autorités essaient de satisfaire à cette requête avec plus ou.moins de bonheur. A Zurich, la police a évacué en été la maison des jeunes du Schindlergut. Les autorités responsables se sont opposées aux tentatives de transformation de cet édifice en un centre autonome. Elles en ont exigé la fermeture juste après l'avoir mis à disposition de la jeunesse zurichoise en novembre 1977. En automne, l'Office social de la ville de Zurich a présenté une conception pour l'aménagement des loisirs de la jeunesse. Cette étude, débattue devant le Conseil communal prévoit, en plus d'une maison centrale pour les jeunes, plusieurs points de ralliement dans les quartiers
[42]. Quant à la ville de Berne, on a institué une conférence de la jeunesse qui devra être le porte-parole des jeunes vers l'extérieur et devra activer les échanges d'expériences entre les organisations de jeunesses et les services publics
[43].
[36] APS, 1968, p. 120; 1969, p. 130 s.; 1970, p. 147.
[37] Mai-Zitig, Das Konzept/Zeitdienst, 1.5.1978 ; Ww, 21, 24.5.78 ; JdG, 219, 20.9.78 ; TAM, 39, 30.9.78 ; 45, 11.11.78; NZZ. 271, 21.11.78; cf. Berner Student, 7, 5.7.78; 10, 11.10.78 (interview avec D. Cohn-Bendit).
[38] R. Girod, L'école et la vie, Etudes et apprentissages, aperçu des connaissances et attitudes, avenir professionnel, Aarau-Frankfurt a.M., 1977, Cf. BaZ. 171, 27.6.78; TLM, 179, 28.6.78.
[39] NZZ (sda), 78, 5.4.78; TLM, 107, 17.4.78 ; voir la presse du 6.6.78. Tous les membres de la commission fédérale pour la jeunesse ont entre 20 et 42 ans. La commission est présidée par le Neuchâtelois J. Cavadini, conseiller communal; cf. APS, 1976, p. 137.
[40] BüZ, 47, 25.2.78; TAM. 39, 30.9.78; cf. supra, Politique à l'égard des étrangers.
[41] J.-P. Bonny: NZZ, 75, 1.4.78; TG, 75, 1.4.78; Sonntags-Blick, 41, 15.10.78. Chômeurs, formation professionnelle: Vat., 87, 15.4.78; Bund, 164–166, 17–19.7.78; Profil, 57/1978, p. 289 s.; gk, 14, 6.4.78. BIT: Brückenbauer, 11, 17.3.78; Blick, 98, 28.4.78; cf. également APS, 1977, p. 138 s.
[42] NZZ, 123, 31.5.78; 124, 1.6.78; Vr, 127, 3.6.78 (Schindlergut); TA, 128, 6.6.78; 141/142, 21/22.6.78 (action de la police); Vorwärts, 24, 15.6.78 ; 4, 25.1.79 ; TA, 181, 8.8.78 ; 231, 5.10.78 ; 271, 21.11.78 (conception des centres en faveur de la jeunesse).
[43] Brückenbauer, 21, 26.5.78; TW, 251, 26.10.78.
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