Année politique Suisse 1982 : Grundlagen der Staatsordnung / Föderativer Aufbau
Relations entre la Confédération et les cantons et entre les cantons
Les tenants d'une atténuation de la tendance centralisatrice de l'Etat fédéral ne peuvent que se réjouir de la diligence avec laquelle sont menés les travaux relatifs à la
nouvelle répartition des tâches entre Confédération et cantons. Le Conseil des Etats a examiné dans le courant de l'année le projet de premier train de mesures qui avait fait l'objet d'un message en 1981. Il exigera pas moins de six amendements constitutionnels et treize révisions de lois. Une deuxième étape est prévue. Elle portera notamment sur le partage dans les domaines de l'assurance-invalidité, de la protection des eaux, de l'agriculture, de la culture, de la formation et de la politique économique structurelle dans les régions. Le but de l'opération consiste avant tout à renforcer les structures fédératives de l'Etat central par une redéfinition plus rationnelle de ses compétences. Les incidences majeures devraient en être une transparence accrue des rouages étatiques et une meilleure participation des citoyens. Le projet gouvernemental poursuit également un objectif financier puisqu'il est prévu de soulager la Confédération de certaines interventions jugées superflues
[1].
Le débat au plénum a été imprégné par le clivage traditionnel fédéralisme/centralisme, mais aussi par des considérations financières. Des députés démocrates-chrétiens ont en effet estimé que la réalisation de ce grand dessein politique avait peu à peu cédé la place à un simple plan d'assainissement des finances fédérales sur le dos des cantons et des contribuables
[2]. Pour leur part, les orateurs socialistes ont exprimé la crainte de voir cette redistribution aboutir à un affaiblissement des prestations de l'Etat central et par conséquent de la solidarité nationale, en particulier dans les domaines de la construction de logements et des dépenses sociales. Une proposition visant à retirer ces éléments du projet a été rejetée. Le Conseil des Etats a par la suite approuvé, contrairement à la recommandation de la majorité de sa commission, l'insertion dans ce premier paquet de mesures du transfert aux cantons de l'aide fédérale à la construction de logements
[3]. Parmi les autres objets du projet, l'abandon par la Confédération de ses tâches en matière de bourses d'études et d'exécution des peines ont donné lieu à passablement de controverses. Les sénateurs ont malgré tout suivi à la lettre les propositions gouvernementales, sauf sur un point: ils se sont refusés à entrer en matière sur la suppression définitive des parts cantonales au produit des droits de timbre et au bénéfice de la Régie fédérale des alcools, qui avaient été provisoirement suspendues en 1980 dans le cadre du programme d'économie pour la législature en cours
[4].
Au chapitre de la collaboration intercantonale, les implications financières de la nouvelle distribution des tâches ainsi que les responsabilités qui incomberont désormais aux cantons ont été au centre des préoccupations des conférences spécialisées des directeurs cantonaux
[5]. Les cantons alémaniques ont d'ores et déjà pris l'initiative de régler par un éventuel concordat le financement de leurs maisons de jeunesse dans la mesure où d'ici 1986, les subventions fédérales dans ce domaine devraient être abolies
[6].
Les cantons limitrophes de la France ont créé, à l'initiative de l'Etat jurassien, un groupe de concertation. Ses objectifs sont d'une part de promouvoir un dialogue suivi entre les cantons signataires en vue d'harmoniser leur politique régionale transfrontalière et d'autre part de se doter des instruments nécessaires à la réalisation de cette politique
[7]. Le besoin de donner une plus grande assise aux associations régionales, en faisant participer plus activement les habitants, a été concrétisé dans deux vallées frontières situées entre les cantons de Lucerne et d'Argovie. C'est ainsi que les trois associations régionales ou communales du Wiggertal et du Suhrental ont décidé de fusionner en une seule et d'introduire le référendum facultatif pour les questions touchant aux changements de statuts de l'association, au trafic régional ou à l'assistance publique
[8].
Cette volonté de renforcer le pouvoir régional n'est pas toujours jugée compatible avec l'autonomie des communes. Le dilemne qui en résulte a été à l'ordre du jour de la cinquième Conférence des ministres européens responsables des collectivités locales qui s'est tenue à Lugano. Les communes en Europe, comme dans notre pays, sont de plus en plus réduites à un rôle d'«exécutant», de «relais administratif» des décisions prises sur le plan régional ou national; or, à une époque où la communication entre individus devient plus difficile, c'est peut-être à l'intérieur du cadre communal que l'homme parviendra le mieux à trouver son identité. Les congressistes ont admis le principe de l'élaboration d'une charte européenne de l'autonomie communale
[9]. Par analogie à ce qui est entrepris à l'échelon de la Confédération, les cantons d'Argovie, Bâle-Campagne et Soleure ont soumis au verdict populaire un certain nombre d'objets relatifs à des projets de nouvelle répartition des attributions entre canton et communes. Si les citoyens bâlois et soleurois ont accepté les mesures qui leur étaient soumises, les Argoviens en revanche les ont rejetées
[10]. Pour sa part, le Grand Conseil grison a ratifié la fusion de trois communes dans la vallée de Calanca
[11]. Enfin, deux localités schaffhousoises, enclavées en partie en territoire zurichois, se sont déclarées prêtes à se séparer de leur canton d'origine si leur représentation au sein du parlement cantonal n'était pas renforcée
[12].
[1] FF, 1981, III, p. 705 ss.; RFS, 5, 6, 2.-9.2.82 (dossier) ainsi que APS, 1980, p. 27; 1981, p. 25 ss. Pour les problèmes liés au fédéralisme cf. Klöti U. et Nüssli K., Erste Vorschläge zur Neuverteilung zwischen Bund und Kantonen, Zürich 1981; Mehr Demokratie im Föderalismus. Mitwirkung in Neuen Räumen, Zeitbuchreihe POLIS, Neue Folge, Bd. 8, Basel 1982; Iamm N., Kooperation im Schweizer Bundesstaat: Die Konferenzen der Fachstellen des Bundes und der Kantone, Riehen 1982.
[2] Voir à cet égard le postulat du CE Guntem (pdc, VS) qui a demandé à nos autorités de rédiger un rapport sur le rôle joué par les cantons dans l'assainissement des finances fédérales (BO CE, 1982, p. 408 s.) ainsi que les réserves formulées par le CE Dreyer (pdc, FR), préoccupé par les conséquences financières de cette redistribution pour les cantons aux ressources limitées (BO CE, 1982, p. 591). Le renforcement de la péréquation financière — 13% du produit de l'impôt fédéral direct au lieu de 7,5% actuellement — devrait atténuer quelque peu les différences financières entre les cantons. Voir également Lib., 148, 27.3.82 ; 24 Heures, 73, 29.3.82 ; TW, 77, 2.4.82 ; AT, 152, 3.7.82; Wittmann W., «Föderalismus in der Sackgasse» in Ww, 36, 8.9.82 ainsi que APS, 1981, p. 81.
[3] En fait, le transfert de l'aide à la construction de logements a été renvoyé à la commission du CE. (presse du 16.11.82). Cette dernière a finalement accepté la version mise au point par le gouvernement, mais porté au 31 décembre 1986 l'échéance fixée à fin 1983. Le CE s'est rallié à cette proposition (BOCE, 1983, p. 2 ss.). Voir également infra, part. I, 6c (Construction de logements).
[4] BO CE, 1982, p. 584 ss.: presse des 2, 3 et 7.12.82.
[6] TA, 157, 10.7.82. Concordat sur les médicaments, cf. infra, part. I, 7b (Produits engendrant la dépendance) et sur les écoles, cf. infra, part. I, 8a (Primar- und Mittelschulen). Sur la répartition des biens entre Berne et le Jura, voir infra, Question jurassienne. Cf. également Frenkel M. et Blaser T., Konkordatsregister, Riehen 1981.
[7] Comprend les cantons de BE, BL, BS, GE, JU, NE, SO, VD et VS: 24 Heures, 142, 22.6.82; 237, 12.10.82; NZZ, 237, 12.10.82; BaZ, 246, 21.10.82. Voir aussi infra, part. I, 2 (France).
[8] LNN, 117, 22.5.82; 122, 28.5.82 ainsi que APS, 1981, p. 27. Pour les problèmes liés au régionalisme, voir Guidani S. et Bassand M., Maldéveloppement régional et identité. Pour un développement endogène, Lausanne 1982; Charpilloz A. et Grimm-Gobat G., La Romandie dominée, Lausanne 1982.
[9] NZZ, 232, 6.10.82; TLM, 282, 9.10.82 (interview du CN Dupont, prd, VS); TA, 236, 11.10.82.
[10] AG: AT, 5, 8.1.82; 131, 9.6.82; 279, 29.11.82. BL: BaZ, 73, 27.3.82; 75, 30.3.82; 94, 23.4.82; 225, 27.9.82. Un projet contesté de nouvelle répartition a également été présenté par le gouvernement zurichois (NZZ, 148, 149, 30.6.-1.7.82; 151, 3.7.82; 275, 25.11.82).
[11] CdT, 46, 26.2.82; Vat., 233, 7.10.82.
[12] Il s'agit des communes de Rüdlingen et de Buchberg (NZZ, 256, 3.11.82; 261, 9.11.82; TA, 258, 5.11.82).
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