Année politique Suisse 1982 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
 
ONU
La participation helvétique au développement du droit international a reçu une fois de plus le soutien du parlement, avec l'adoption par le Conseil des Etats de la convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques particulièrement traumatisantes. Dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies, la Suisse a voté la Convention sur le droit de la mer; elle ne l'a cependant pas paraphée, car elle a estimé insatisfaisant le régime d'exploitation des fonds marins établi par le traité et a préféré attendre de voir comment se détermineraient les autres pays occidentaux [10].
Signe de l'importance que la Suisse attache aux efforts mondiaux de coopération pour la protection du milieu vital, le conseiller fédéral Hürlimann s'est rendu à Nairobi (Kenya) pour la session extraordinaire du Programme des Nations Unies pour l'environnement, (PNUE). La participation de notre pays aux travaux de la CNUCED a été marquée par. l'élection de l'ambassadeur F. Blankart à la présidence de la 25e session du Conseil de cette. organisation. La délégation suisse à la 4e conférence générale extraordinaire de l'UNESCO n'est pas non plus passée inaperçue. Son chef, l'ancien ambassadeur E. Thalmann, s'est en effet inquiété de la déviation de cette institution vers des buts politiques. Par ailleurs, le nouveau secrétaire générale de l'ONU, le Péruvien Perez de Cuellar, a été reçu en visite officielle à Berne [11].
Ces divers éléments ont confirmé l'étendue des activités actuelles de notre pays au sein du système de l'ONU. Tous les organes dont il est membre connaissent, à un degré ou à un autre, des controverses de nature politique où soit l'Assemblée générale soit les commissions qui en dépendent son appelées à trancher en dernier ressort. Le chef du DFAE a rappelé cet état de choses en présentant le message du Conseil fédéral concernant l'adhésion de la Suisse à l'ONU; rien, à son avis, ne justifierait donc la peur d'une plongée dans l'inconnu [12]. Les adversaires de la candidature helvétique redoutent que notre entrée à l'ONU n'entraîne des disputes au sujet de la position que la Suisse devra exposer et défendre face au monde. Dans cet esprit, l'Union suisse des arts et métiers (USAM), le Service suisse d'action pour la démocratie (SAD), la majorité des membres du Redressement national ainsi qu'un carré de personnalités de la droite vaudoise se sont d'ores et déjà prononcés contre le projet. D'autres, comme le conseiller national Soldini (vigilant, GE), ont pris prétexte des hostilités aux Malouines et au Liban pour demander si, au vu de l'inefficacité des efforts de paix de l'organisation mondiale, le mieux n'était pas de renoncer immédiatement à la campagne [13].
Même parmi les partisans du projet d'adhésion, le message du Conseil fédéral n'a pas reçu une approbation sans nuance. Le problème de la garantie de notre neutralité perpétuelle et armée a continué à faire couler de l'encre. Le gouvernement a prévu qu'une déclaration solennelle à ce sujet serait communiquée juste avant l'adhésion et il a montré que ni le statut ni la politique de neutralité ne seraient lésés par notre appartenance à l'ONU. Divers commentateurs ont cependant souligné que les auteurs du message ont éludé un certain nombre de problèmes relatifs en particulier à la position de la Suisse face aux sanctions économiques que pourrait prendre le Conseil de sécurité à l'encontre d'un Etat [14]. Quant aux partis, ils n'ont pas encore tous pris officiellement position. Le PDC, le PS et le PdT ont émis un oui de principe; le processus d'information et les échanges de vues se sont poursuivis à l'intérieur du PRD, tandis qu'au sein de l'UDC, la commission de politique extérieure, entrée en lice en faveur de l'adhésion, s'est fait aussitôt contredire par le groupe d'opposants emmenés par le conseiller national Blocher (udc, ZH) [15].
Acte de politique étrangère, la candidature éventuelle de la Suisse est également une affaire de politique intérieure. La votation populaire n'aura pas lieu avant la fin de 1984; d'ici là, il appartiendra aux Chambres de se prononcer. La commission ad hoc du National s'est mise à l’oeuvre sous la présidence de W. Renschler (ps, ZH); elle a consacré ses séances de 1982 à l'audition d'une série d'experts suisses et étrangers. Il est ressorti de ces entretiens que différents points liés au projet restaient à mieux définir. Parmi ces points sont apparus non seulement la forme de la déclaration de neutralité, mais aussi la définition du rôle de la Suisse dans les activités de l'ONU et le contrôle du parlement sur le vote de la délégation helvétique à New York [16].
Le gouvernement s'est déclaré favorable au principe de l'entrée de notre pays au Fonds Monétaire International (FMI), à la Banque mondiale et à ses deux annexes. Le choix final reviendra à l'Assemblée fédérale et sera soumis au référendum facultatif; il a cependant été prévu de laisser le peuple se prononcer d'abord sur la question de l'ONU. Pour l'instant, il s'agit donc seulement de négocier les conditions d'adhésion aux institutions de Bretton Woods. Le Conseil fédéral semble avoir été avant tout sensible aux avantages de l'appartenance à la Banque mondiale pour la politique économique extérieure; quant au FMI, la Banque nationale ne s'est pas montrée pressée d'y voir la Suisse accéder à part entière, car le statut d'observateur lui permet déjà d'y exercer une influence active sans supporter tout le coût d'une présence normale. Pour sa part, le comité directeur du PDC a recommandé cette double candidature [17].
 
[10] Armes: BO CE, 1982, p. 156; FF, 1982, I, p. 871; cf. APS, 1981, p. 42. Droit de la mer: NZZ, 100, 3.5.82; 288, 10.12.82; 290, 13.12.82; Rapp. Gest., 1982, p. 24.
[11] PNUE : NZZ, 104, 7.5.82 ; 107, 108, 11-12.5.82. Protection de l'environnement : voir le message du CF et la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontalière à longue distance (FF, 1982, III, p. 309 ss.). CNUCED: NZZ, 207, 7.9.82 ; UNESCO: Documenta, 1982, no 4, p. 22 ss. (allocution d'E. Thalmann); Bund, 272, 20.11.82 ; 24 Heures, 277, 27.11.82. Secrétaire général: TA, 75, 31.3.82 (interview); presse du 9.7.82.
[12] FF, 1982, I, p. 505 ss. ; presse du 23.3.82; cf. APS, 1981, p. 40 s. Voir aussi Bund, 2-12, 5-16.1.82 ; CF Aubert, «Le Conseil de l'Europe et l'ONU, des parallèles», in Documenta, 1982, no 2, p. 3 s. ; J. F. Freymond, «La politique extérieure multilatérale de la Suisse», in Relations internationales, 1982, no 32, p. 463 ss.
[13] TLM, 21, 21.1.82 (USAM); 171, 20.6.82 (VD: conseillers d'Etat Blanc, udc, Perey, prd, Leuba, pl et CE Reymond, pl); NZZ, 77, 2.4.82 (Redressement national): 206, 6.9.82 (SAD); BO CN, 1982, p. 713 (question Soldini). Voir aussi JdG, 145, 25.6.82 (comité d'opposition à Genève). Cf. APS, 1981, p. 41.
[14] Interventions publiques du CF Aubert: Suisse, 88, 29.3.82 (reflet de l'émission Table Ouverte de la TV romande); presse du 21.4.82 (à la MURA); presse du 25.10.82 (journée suisse de l'ONU). Cf. aussi NZZ, 125, 3.6.82; 281, 2.12.82 (E. Diez). Commentateurs: SGT, 68, 23.3.82; TLM, 82, 23.3.82; NZZ, 72, 27.3.82 (F. Luchsinger). D'autres ont plutôt critiqué un apparent manque de conviction de la part du CF: AT, 68, 23.3.82 ; Lib., 144, 23.3.82 (F. Gross); BaZ, 72, 26.3.82 (O. Reck); mais voir BaZ, 170, 24.7.82 et Bund, 214, 14.9.82 (nomination d'un chargé de mission d'information au DFAE).
[15] PDC: «Der Beitritt der Schweiz zu der Vereinten Nationen », in CVP Standpunkte, Nr. 41, Bem 1982 ; presse du 19.2.82. PSS: SP-Information, 113, 1.3.82; 119, 7.6.82; Vr, 63, 31.3.82; PdT: VO, 14, 8.4.82 (CN Magnin GE). PRD: NZZ, 68, 23.3.82: 84, 13.4.82; 110, 14.5.82 (CN Friedrich, prd, ZH, en faveur de l'adhésion); 156, 9.7.82 (CN Wyss, prd, BS, pour adhésion). UDC: Bund, 59, 12.3.82; BaZ, 60, 12.3.82; NZZ, 292, 15.12.82; Europa, 49/1982, 7/8, p. 13 (M. Friedli, secrétaire général de I'UDC, pour l'adhésion); voir APS, 1981, p. 41. Cf. aussi NZZ, 142, 23.6.82 (séminaire de la Nouvelle Société Helvétique).
[16] Presse du 2.6.82; BaZ, 142, 22.6.82; 212, 11.9.82; Bund, 268, 16.11.82; voir NZZ, 235, 9.10.82 (formation d'un comité parlementaire de soutien à l'adhésion sous la présidence du CN Widmer, adi, ZH). Des sondages ont montré la versalité de l'opinion des électeurs; en dernier lieu, 37 %de oui à l'adhésion, 33% de non et 30% d'indécis (Ww, 29, 21.7.82; cf. APS, 1981, p. 41).
[17] NZZ, 187, 14.8.82; presse du 19.8.82; RFS, 33, 24.8.82. PDC: Multilaterale Wirtschaftsdiplomatie zwischen den Westlichen Industriestaaten unter verstärkter Mitwirkung der Schweiz, ausgearb. von der Studiengruppe für Aussen- und Sicherheitspolitik der CVP, Bern, Nov. 1981. Voir aussi R. Gerster, Fallstricke der Verschuldung, Basel 1982, p. 212 ss.