Année politique Suisse 1982 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Politique de développement
Les controverses relatives à la politique de développement se sont quelque peu atténuées en 1982. La «nouvelle organisation» tant décriée l'année précédente a été fondée sous le nom d'«Intercoopération». Au Conseil national, S. De. Capitani (prd, ZH) a remarqué que, depuis le dépôt de l'interpellation radicale sur la politique de développement en 1981, la transparence du travail de la Direction de la coopération au développement et de l'aide humanitaire (DDA) et sa collaboration avec les cercles de l'économie privée s'étaient rapidement améliorées. Dans le but de rationaliser au mieux l'exécution des projets, la DDA s'est appliquée, en collaboration avec l'Office fédéral des affaires économiques extérieures (OFAEE), à mettre sur pied des programmes de coordination pour les «pays de concentration»
[40].
La DDA a publié pour la première fois un rapport annuel destiné à une large diffusion; d'après ce document, le volume total de l'aide publique au développement (APD) fournie par la Suisse en 1981 s'est élevé à 453 millions de francs, soit 0,24% du produit national brut (PNB). D'autre part, dans sa réponse écrite à un postulat du CE Generali (prd, TI), le Conseil fédéral a établi que, sur une APD fédérale de 406 millions de francs en 1980, les achats réalisés en Suisse se montaient à 337 millions; si l'on ajoute à ce chiffre les commandes financées par la Banque mondiale, le total des achats effectués en Suisse grâce à l’APD s'élevait à 551 millions de francs pour l'année en question
[41].
Ces indications ont relancé le débat sur la nature et les finalités de l'aide au développement fournie par la Suisse
[42]. La question était d'autant plus actuelle que le Conseil fédéral avait soumis au parlement un crédit de programme de 350 millions de francs en faveur des mesures de politique économique et commerciale au titre de la coopération au développement. Ces mesures sont du ressort de l'OFAEE; elles comportent des crédits mixtes, des aides à la balance des paiements, ainsi que des contributions dans le domaine des produits de base, dans celui de l'industrialisation et pour la promotion des importations en provenance des pays en développement. 240 millions figuraient au programme pour les crédits mixtes uniquement, c'est-à-dire plus du double du montant libéré à ce poste par le programme analogue voté en 1978. Comme les crédits mixtes — composés d'une tranche bancaire et d'une tranche fédérale accordée à des conditions avantageuses — servent à financer la livraison de biens ou de prestations de services suisses, leur attribution peut être une source de conflit entre politique de développement et intérêts particuliers. C'est pourquoi les tiers-mondistes n'en voulaient pas. Au Conseil national, le groupe socialiste a exigé que les projets financés par le programme précédent subissent une évaluation intermédiaire, à l'image de la procédure pratiquée à la DDA. Les Chambres ont cependant adopté le crédit sans opposition
[43]. En matière d'aide financière multilatérale, la Suisse a accepté de contribuer à la reconstitution de plusieurs fonds de développement. De plus, elle a adhéré à la Banque africaine de développement. Certaines pressions se sont exercées sur les représentants helvétiques auprès des institutions de Bretton Woods en vue de la 7e reconstitution des moyens de l'Association internationale pour le développement (IDA)
[44].
L'électorat du canton de Genève a refusé une initative demandant la création d'un fonds cantonal d'aide au développement, lequel aurait été alimenté chaque année par un montant équivalent à 0,7% de la part cantonale au PNB. Un comité de soutien rassemblant des personnalités appartenant à des milieux et à des idéologies très différents s'était constitué et le Grand Conseil avait recommandé l'approbation; PRD, PL, AdI et Vigilance avaient toutefois pris position contre le projet
[45].
En 1982, la Confédération a versé 113 millions de francs au titre de
l'aide humanitaire (92 millions en 1981); au nombre de ses actions, les secours à la Pologne et au Liban mentionnés plus haut. Dans cette somme, l'aide alimentaire est intervenue pour 45 millions
[46]. La dégradation des conditions de vie des populations de différentes parties du monde a particulièrement pesé sur la politique d'asile traditionnelle de la Suisse. En 1982, le nombre de demandes a augmenté plus nettement encore qu'au cours des années précédentes (7135 contre 4226 en 1981 et 3020 en 1980); faute d'un effectif suffisant de fonctionnaires, les dossiers se sont accumulés au DFJP. Les gouvernements de Genève, de Vaud et de Zurich, cantons les plus concernés par la concentration de réfugiés, ont réclamé une meilleure solidarité confédérale en matière d'accueil. Mis en présence de plusieurs interventions parlementaires, le Conseil fédéral a jugé que, tout en maintenant une politique d'asile libérale et généreuse, il importait de contrecarrer les pratiques tendant à éluder les prescriptions restreignant l'immigration par le biais du dépôt de demandes d'asile abusives
[47].
[40] Cf. APS, 1981, p. 42 s. Intercoopération: Suisse, 48, 17.2.82. Interpellation: BO CN, 1982, p. 938 ss.; voir aussi Délib. Ass. Féd., 1982, V, p. 7 (motion Affolter, ps, ZH). Programmes: BaZ, 151, 2.7.82; cf. aussi Rapp. Gest., 1982, p. 27 ss.
[41] Rapport annuel de la DDA, 1981. APD s'entend y compris l'aide humanitaire. Le DFEP a estimé que la proportion de l'APD ne dépasserait guère 0,25% du PNB en 1982 (Lib., 148, 27.3.82). L'APD est restée soumise aux mesures d'économie (cf. infra, part. I, 5, Sparmassnahmen). CE Generali: FF, 1982, I, p. 455 ss.
[42] Conceptions du PRD in Revue politique, 61/1982, p. 113 ss.; Service d'information Tiers-Monde, La politique suisse de développement, Lausanne 1982; voir aussi P. Jolles, «Privatwirtschaft und Bund in der Entwicklungszusammenarbeit », in Documenta, 1982, no 4, p. 13 s. ; Annuaire Suisse/Tiers-Monde, 2/1982, p. 207 ss. ; Ph. Lévy, M. Heimo, G. Etienne (e. a.) in Revue économique et sociale, 40/1982, no 3, p. 133 ss. ; cf. encore le point de vue de l'ambassadeur M. Heimo, chef de la DDA (Lib., 245, 24.7.82; presse du 15.9.82).
[43] FF, 1982, I, p. 717 ss. ; III, p. 152 ; BO CN, 1982, p. 892 ss. ; BO CE, 1982, p. 472 s. ; presse du 27.3.82; voir APS, 1978, p. 45. Evaluation: TW, 155, 7.7.82; Bund, 166, 20.7.82; Actualités i3M, 1982, no 4; Domaine Public, 650, 9.9.82. Voir aussi infra (Mesures économiques et commerciales).)
[44] Rapp. gest., 1982, p. 35 s. IDA: NZZ, 209, 9.9.82; voir APS, 1976, p. 43 et D. v. Schrötter, Schweizerische Entwicklungspolitik in der direkten Demokratie, München 1982.
[45] 450 non contre 20 593 oui (presse du 27.9.82). Voir Suisse, 23, 23.1.82; 199, 18.7.82; 246, 3.9.82; 262, 19.9.82; VO, 36, 8.9.82. Cf. par ailleurs Annuaire Suisse/Tiers-Monde, 2/1982, p. 177 ss. (« Fonds de solidarité pour la lutte de libération sociale dans le Tiers-Monde», créé par l'USS, le PS et des organisations d'entraide).
[46] Rapp. gest., 1982, p. 37. Aide alimentaire, voir critique de J. Schertenleib, Schweizer Nahrungsmittelhilfe, Institut für Sozialethik des SEK, Adliswil 1981.
[47] NZZ, 7, 11.1.82; 150, 2.7.82 ; 24 Heures, 193, 20.8.82; 35, 11.2.82 ; Ww, 38, 22.9.82; JdG, 285, 7.12.82 ; voir M.-C. Caloz-Tschopp, Le Tamis helvétique, Lausanne 1982 et infra, part. I, 7d (Politique à l'égard des étrangers). Cantons; Suisse, 30, 30.1.82; TLM, 41, 10.2.82 ; JdG, 139, 18.6.82; TA, 215, 216, 16-17.9.82 ; Domaine Public, 653, 30.9.82. Interventions: BO CN, 1982, p. 336 (interpellation urgente Lieberherr, ps, ZH) ; Délib. Ass. Féd., 1982, III, p. 6 (motion Meier, an, ZH et interpellation Soldini, vigilant, GE); IV, p. 4ss (postulat Cavadini, pl, NE, interpellations Hofmann, udc, BE et Soldini, vigilant, GE). Voir USS, 25, 1.9.82 et APS, 1979, p. 54.
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