Année politique Suisse 1985 : Sozialpolitik / Gesundheit, Sozialhilfe, Sport
 
Produits engendrant la dépendance
La Confédération a tenté de coordonner au niveau fédéral la lutte contre la drogue et la prévoyance en matière de santé en créant une nouvelle section de prévention à l'Office fédéral de la santé (OFS). Celle-ci est entrée en fonction le 1er janvier 1986. Sa tâche ne s'annonce pas facile, car la lutte contre la drogue et la prévoyance en matière de santé sont des domaines réservés habituellement aux cantons [7]. En créant cette nouvelle section, la Confédération a ainsi montré sa volonté d'intensifier la lutte contre les produits engendrant la dépendance. Le peuple et les cantons ont par ailleurs accepté, le 9 juin en votation populaire, une modification de l'article 32bis de la Constitution fixant une nouvelle répartition des recettes nettes provenant de l'imposition des boissons distillées. A fin 1980 déjà, le souverain avait accepté de réduire temporairement la part cantonale dans le cadre des mesures d'assainissement des finances fédérales. De 1981 à 1985, les cantons n'ont donc bénéficié que du 5% (au lieu du 50%) de la dîme sur l'alcool, montant qui était destiné à la lutte contre l'alcoolisme. Suite à la votation du 9 juin, la Confédération obtiendra définitivement le 90% des recettes de la Régie des alcools alors que les cantons récolteront les 10% restants. Ces recettes devront être consacrées à la lutte contre l'alcoolisme d'une part et à la lutte contre l'abus de drogues, stupéfiants et médicaments d'autre part [8].
Dans le domaine spécifique de la lutte contre la drogue, la Suisse s'est associée aux travaux du Groupe de coopération en matière de lutte contre l'abus et le trafic illicite des stupéfiants, surnommé «Groupe Pompidou». Fondé en 1971 par le président de la République française, il ne comptait alors que sept membres et n'avait aucun statut officiel. Aujourd'hui, quinze Etats européens en font partie et collaborent dans le cadre du Conseil de l'Europe qui en assure le secrétariat. Le groupe est en outre reconnu comme organisme régional de l'ONU. Malgré la non-participation de la Suisse à l'Organisation des Nations Unies, les experts helvétiques, qui suivaient jusque-là les réunions en tant qu'observateurs, ont estimé qu'une pleine participation de notre pays au «Groupe Pompidou» serait utile parce qu'on y discute des problèmes de la drogue dans une optique spécifiquement européenne, et non pas de manière globale, comme c'est le cas à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou à l'ONU. Au cours de ces échanges, plusieurs dossiers, tels ceux de la vague de cocaïne, de la prévention chez les jeunes à hauts risques, du rôle des divers systèmes judiciaires, ou des personnes dépendantes en prison, ont été mis à l'étude [9]. Sur le plan suisse, la politique en matière de drogue, mise en ceuvre dès 1975, ne semble pas atteindre son but. Les résultats obtenus ne sont pas satisfaisants en regard des coûts énormes. Si le nombre des personnes décédées en raison de la drogue semble en légère diminution, le trafic, la consommation et toute la criminalité qui lui sont liés n'ont cessé de progresser et cela même dans les régions rurales. L'OFS a révélé que la cocaïne était devenue la plus prisée des drogues avec le haschisch et l'héroïne. Les trafiquants ont établi de véritables réseaux et les occasions de consommer des stupéfiants se sont accrues considérablement. Dans le cadre de l'Année de la jeunesse, l'Association suisse des intervenants en toxicomanie (ASIT), qui regroupe quelque 200 spécialistes d'une septantaine d'institutions, a adressé une pétition au parlement demandant d'amnistier tous les délinquants toxicomanes. En lançant cet appel, l'ASIT a tenté de faire comprendre à l'opinion publique que la répression pénale n'avait jamais fait diminuer la consommation d'aucune drogue [10].
Pour combattre le fléau de l'alcoolisme, l'association Alco-Aide, implantée à Genève, a souhaité étendre, en collaboration avec d'autres organismes de même vocation, son action dans toutes les cliniques suisses possédant des unités de soins pour les affections pulmonaires. Environ 10% des personnes hospitalisées en raison de maladies pulmonaires sont victimes de l'alcool. Les responsables d'Alco-Aide ont tenté de sensibiliser les patients des cliniques par des projections de films et par des débats sur les causes et les effets de l'alcool. L'association a aussi envisagé de constituer des groupes de soutien avec le concours des associations locales d'abstinence. Sur les patients hospitalisés ou en traitement ambulatoire, Alco-Aide a obtenu un «taux de sobriété» de 65% [11]. Le mouvement anti-tabagisme s'amplifie. A Zurich, la nouvelle loi sur les auberges a institué l'obligation d'offrir des espaces sans fumée lorsque l'exploitation le permettait. Dans les transports publics, postes et restaurants, le droit à l'air pur est peu à peu mieux respecté. Le 30 octobre a été célébrée une journée internationale des non-fumeurs. De plus, la Confédération a augmenté ses recettes destinées à la caisse AVS de 41 millions de francs par année en augmentant le prix du paquet de cigarettes de vingt centimes au minimum [12].
 
[7] BaZ et SGT, 30.12.85. Le 10 mars, le peuple et les cantons ont accepté un arrêté fédéral supprimant l'obligation incombant à la Confédération d'allouer certaines subventions dans le domaine de la santé publique. Cette suppression de subventions, qui se montaient à un million de francs par année, ne représentera pas une grosse charge pour les cantons. Pour les résultats de la votation, voir FF, 1985, I, p. 1531 et 1534. Cf. également supra, part. I, 1d (Confédération et cantons) et 5 (Sparamassnahmen).
[8] Pour les résultats de la votation, voir FF, 1985, II, p. 677 et 680. Cf. également TA, 29.5.85, ainsi que supra, part. I, 1d (Confédération et cantons) et 5 (Sparmassnahmen).
[9] NZZ et 24 Heures, 5.3.85.
[10] 24 Heures, 26.2.85; 17.8.85; 25.10.85; Suisse, 26.2.85; 4.5.85; 19.5.85; 17.8.85; 1.11.85; 4.11.85; NZZ, 22.6.85 ; 24.7.85 ; 12.8.85 ; Ww, 29, 18.7.85 ; TA, 12.8.85 ; 19.9.85 ; BaZ, 20.9.85 ; LM, 1.11.85. Pour la contribution au Fonds des Nations Unies pour la lutte contre l'abus de drogues, voir supra, part. I, 2 (Organisation des Nations Unies).
[11] Suisse, 17.5.85; VO, 22.8.85.
[12] Suisse, 5.2.85; 21.8.85. Pour le problème des médicaments et de leur commercialisation, voir Suisse, 24.6.85; LM, 7.10.85; 24 Heures, 23.11.85.