Année politique Suisse 1987 : Sozialpolitik / Bevölkerung und Arbeit / Temps de travail
L'aménagement du temps de travail, qui résulte d'une mutation industrielle et d'une évolution technologique, représente un nouveau sujet de préoccupation pour les partenaires sociaux. Le débat sur la flexibilité du temps de travail, c'est-à-dire l'adaptation du volume des heures de travail au plan de charge de l'entreprise, fut véritablement lancé en automne 1986, lorsque le groupe ETA-Marin (filiale du groupe SMH) et la Fédération des travailleurs de la métallurgie et de l'horlogerie (FTMH) signèrent, dans le cadre d'une nouvelle convention collective de travail, un accord sur l'introduction de l'horaire continu. Selon cet accord, une partie du personnel travaillerait exclusivement en fin de semaine, soit 30 heures réparties sur trois jours et payées à plein temps.
Pour le patronat, seul un aménagement du temps de travail est en mesure de permettre à l'économie suisse de faire face à la concurrence étrangère. Quant à la FTMH, elle a estimé qu'il était impossible de s'opposer au travail en continu et qu'il s'agissait pour les syndicats, par l'intermédiaire des conventions collectives, de réglementer la flexibilité revendiquée par le patronat. A ses yeux, l'accord conclu permettra d'éliminer toute une série d'inconvénients et de désagréments qu'occasionne actuellement aux ouvriers le système des autorisations pour travailler en équipes et le dimanche. Après avoir conservé une certaine réserve, l'USS a relevé que si l'accord comportait deux avantages, la relative régularité des équipes et la réduction massive de la durée du travail, il représentait aussi des risques comme un danger de marginalisation des travailleurs en fin de semaines et la longueur des journées de travail. Même s'il n'est pas opposé au travail en continu, l'OFIAMT reste en revanche fermement opposé à l'idée que des ouvriers puissent travailler tous les dimanches car la loi interdit de travailler plus de 26 dimanches par année. Il a cependant annoncé que les deux parties avaient approuvé le principe d'une solution respectant les exigences de la loi sur le travail tout en tenant compte des besoins de l'entreprise
[13].
Si le patronat est unanime à reconnaître la nécessité de l'aménagement du temps de travail, les syndicats sont plus partagés sur la question. D'une part le mouvement syndical lutte pour éviter un recours plus fréquent au travail de nuit, en exigeant des autorités qu'elles appliquent avec rigueur les critères, notamment économiques, pour autoriser des dérogations à l'interdiction générale du travail de nuit et, d'autre part, souhaite une amélioration des conditions de travail de ceux qui doivent s'adonner au travail en continu. Si la FTMH se montre favorable à la flexibilité, à condition qu'elle s'exerce sur les horaires et non sur les salaires, la Fédération des travailleurs du textile, de la chimie et du papier (FTCP) est quant à elle farouchement opposée à l'introduction du travail en continu qui, selon elle, entraîne la désintégration du tissu social. En 1986, l'USS avait adopté des thèses sur la réduction du temps de travail où elle disait en substance que le principe de l'interdiction générale du travail de nuit et du dimanche ne restreint pas la liberté des travailleurs, mais protège leur santé et leur vie sociale, familiale et culturelle.
Par ailleurs, de nombreuses études ont démontré les effets néfastes sur l'organisme de l'individu qu'engendre le travail de nuit. Le Syndicat suisse des services publics (SSP) exige, à l'instar des autres syndicats, que le travail irrégulier soit compensé non pas sous forme pécuniaire mais par du temps libre, des périodes de repos plus longues, des week-ends réguliers et par la retraite à la carte. Le SSP soutient des prestations effectuées à des heures irrégulières et inaccoutumées s'il s'avère qu'elles sont nécessaires au plan social (transport, services de santé etc.) mais il s'oppose à leur extension dans le secteur privé pour des raisons uniquement techniques ou de rentabilité car ces formes de travail entraîneraient à leur tour des besoins supplémentaires dans les services publics
[14].
Toujours en relation avec l'aménagement du temps de travail, deux motions identiques chargeant le Conseil fédéral de présenter un projet de révision de la loi sur le travail, qui tienne compte des mutations sur le marché du travail, ont été acceptées tant au Conseil national où elle fut déposée par le groupe libéral qu'au Conseil des Etats où elle le fut par le conseiller Meylan (ps, NE)
[15]. Face à l'augmentation du pourcentage de la population active travaillant la nuit et devant les atteintes à l'intégrité physique et psychique et les difficultés sociales qu'entraîne cette évolution, le Conseil national a adopté une motion Renschler (ps, ZH) sous la forme d'un postulat priant le Conseil fédéral de limiter par voie d'ordonnance à 38 heures la durée maximale du travail hebdomadaire des travailleurs employés régulièrement la nuit
[16].
[13] USS, 7.1.87; FOBB, 24.2.87; L'Hebdo, 26.2.87. Cf. aussi APS, 1986, p. 151 s.
[14] Patronat: RFS, 27.10.87. FTCP: L'Hebdo, 26.2.87. SSP: USS, 9.9.87; VO, 17.9.87. Interview K. Ley sur le temps de travail: L'Hebdo, 1.10.87.
[15] BO CN, 1987, p. 991; BO CE, 1987, p. 325.
[16] BO CN, 1987, p. 991; USS, 18.3. et 24.6.87.
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