Année politique Suisse 1991 : Infrastruktur und Lebensraum / Energie
Energie nucléaire
Parallèlement aux efforts entrepris pour augmenter la puissance des centrales nucléaires (le programme "énergie 2000" prévoit une augmentation de 10%) et en raison du moratoire, se dessine, parmi les exploitants de centrales nucléaires, une
tendance visant à prolonger de moitié la durée d'exploitation des centrales, initialement programmée à 40 ans. Une telle prolongation de leur durée de vie devra être accompagnée par une lutte constante contre le vieillissement et par un contrôle strict de la sécurité car il a été constaté que la majorité des incidents était dû au vieillissement et à l'usure des matériaux
[13].
Les forces motrices bernoises (FMB) ont présenté au Conseil fédéral la demande d'un
permis non-limité dans le temps pour l'exploitation de la centrale de Mühleberg (BE) et d'une autorisation pour augmenter de 10% la puissance du réacteur. Le Conseil d'Etat et le Grand Conseil bernois se sont déclarés favorables à cette requête en dépit de l'opposition des socialistes et des écologistes. Toutefois, ce préavis devra encore être soumis à une votation populaire cantonale consultative en 1992. La Division de sécurité des installations nucléaires de l'OFEN a transmis un préavis favorable quant à l'octroi d'un permis illimité
[14].
Sur cette question, deux motions ont été déposées au Conseil national, la première par le groupe écologiste, qui propose au Conseil fédéral de retirer l'autorisation d'exploiter la centrale de Mühleberg, la seconde par la conseillère nationale Bäumlin (ps, BE) qui demande au gouvernement de faire exécuter une contre-expertise de la centrale par un organisme international indépendant
[15]. En 1990 déjà, l'association "Mühleberg unter der Lupe", se basant sur un rapport de l'institut d'écologie appliquée de Darmstadt (RFA) avait mis en cause la sécurité de la centrale. De nombreuses oppositions à l'octroi d'un permis définitif, issues de Suisse, d'Allemagne et d'Autriche, avaient été envoyées au DFTCE
[16].
Les promoteurs de la centrale nucléaire expérimentale de
Lucens (VD) qui avaient demandé au Conseil fédéral, en 1988, l'autorisation d'engager des travaux de désaffection définitive de la centrale, se sont à nouveau adressés à la Confédération afin qu'elle participe pour un montant de 5 millions de francs à la couverture des frais de l'opération; les coûts totaux de celle-ci atteignant 16 millions de francs. Les deux Chambres se sont prononcées favorablement
[17].
Le Conseil d'Etat français a donné raison au recours de la ville de Genève, du canton de Genève, de la ville de Lausanne et de nombreuses associations écologistes contre la remise en fonction du surgénérateur
Superphénix de Creys-Malville (F). Une partie du décret de 1989, fixant les conditions du redémarrage, a été jugée illégale en raison d'une faute de procédure, le gouvernement français ayant délégué de façon abusive des compétences au ministère de l'industrie. Ce n'est toutefois qu'une victoire incomplète pour les recourants, car seule une partie du décret a été annulée; ainsi, une remise en fonction du surgénérateur n'exigerait pas une nouvelle enquête publique. Pour l'instant, suite à des incidents intervenus en juillet 1990, la centrale n'est plus en fonction, mais un redémarrage pourrait intervenir au cours de l'année 1992
[18].
Les déchets nucléaires constituent un des problèmes les plus épineux de la politique énergétique. En ce qui concerne le
stockage des déchets faiblement et moyennement radioactifs, quatre sites, Oberbauenstock (Uri), Ollon (VD), Piz Pian Grand (GR) et Wellenberg (NW) sont encore envisagés pour y construire un dépôt final. Suite aux oppositions de la commune d'Ollon et du CADO (comité anti-déchets Ollon), les travaux de forage de la CEDRA (Coopérative pour l'entreposage des déchets radioactifs) ont pris beaucoup de retard. Afin de conserver une certaine simultanéité des recherches sur les quatre sites, la CEDRA avait suspendu ses travaux à Oberbauenstock, Piz Pian Grand et Wellenberg jusqu'à ce que le retard soit comblé. Afin d'y parvenir, le Conseil fédéral, saisi par la CEDRA en décembre 1990, a autorisé au printemps cette dernière à entamer des procédures d'expropriation sur les communes d'Ollon et d'Aigle, pour mener à terme ses
travaux de sondage. Par ailleurs, le Conseil fédéral avait mis en consultation un "protocole d'accord" dans les quatre cantons concernés. En acceptant ce document, les cantons s'engageraient à permettre la réalisation des travaux autorisés par le Conseil fédéral sur leur territoire. Toutefois, l'écho est resté négatif dans les cantons d'Uri et des Grisons, tandis que Nidwald prévoit de faire voter ses citoyens
[19].
A côté de ces procédures, l'Agneb (groupe de travail de la Confédération pour la gestion des déchets nucléaires) a publié son rapport annuel, dans lequel il s'oppose à la poursuite des forages dans les quatre sites envisagés et propose, pour des raisons financières et de temps, de concentrer les efforts sur un seul endroit
[20].
Pour ce qui touche les
déchets hautement radioactifs, plusieurs options au nord-est de la Suisse, dans les cantons de Zurich, Argovie, Schaffhouse et de Thurgovie sont à l'étude, mais les recherches ne sont qu'à leur début. Face aux importants retards dans la construction des dépôts, la CEDRA a fixé un calendrier précis: la construction d'un entrepôt définitif pour les déchets faiblement et moyennement radioactifs devra avoir commencé avant la fin du siècle et le lieu de l'entreposage définitif des déchets hautement radioactifs devra être trouvé avant l'an 2000
[21].
Pour faire face au retour prochain (vers le milieu des années 90) des déchets radioactifs des centrales suisses traités à l'étranger, et étant donné les retards des travaux de la CEDRA, les propriétaires des différentes centrales, réunis au sein de la société ZWILAG (Zwischenlager Würenlingen AG), avaient décidé, en 1988, de faire construire un
dépôt intermédiaire pour les déchets hautement et moyennement radioactifs à longue durée de vie à l'institut Paul Scherrer sur la commune de
Würenlingen (AG). Au cours de l'année 1991, le Conseil fédéral a procédé à la consultation des cantons au sujet de ce dépôt. La grande majorité d'entre eux s'est prononcée favorablement. La durée de fonctionnement du dépôt est prévue entre 40 et 60 ans; durant ce laps de temps la construction des dépôts définitifs sera terminée
[22]. Par ailleurs, le Conseil fédéral a autorisé les forces motrices du nord-est de la Suisse (NOK) à construire et mettre en service un dépôt intermédiaire pour déchets faiblement, moyennement et fortement radioactifs sur l'aire de la centrale de Beznau, qui devrait entrer en fonction dans un ou deux ans
[23].
Au niveau fédéral, une motion Fischer (prd, AG), cosignée par 69 députés des partis bourgeois, demandant une révision partielle de la législation sur l'énergie nucléaire afin de
faciliter les procédures d'autorisation pour la création de dépôts pour déchets radioactifs, a été adoptée par le Conseil national
[24].
La
loi-cadre sur la radioprotection a été adoptée à l'unanimité par les deux Chambres; cette décision n'était qu'une formalité, toutes les divergences entre le Conseil national et le Conseil des Etats ayant été réglées en 1990. En résumé, la loi repose sur trois principes: premièrement, toute exposition à des radiations doit être justifiée; deuxièmement, toute exposition justifiée doit être aussi faible que possible; troisièmement, les valeurs limites de dose doivent être fixées individuellement
[25].
En cas d'accidents nucléaires provoquant la dispersion de substances radioactives, le Conseil fédéral a prévu, dans un
projet d'ordonnance, de distribuer à l'ensemble de la population suisse des tablettes d'iode. La prise de telles tablettes a pour effet de bloquer la contamination des organes humains par la radioactivité en saturant ceux-ci d'iode inactif, ce qui permet de les préserver de l'iode radioactif
[26].
[13] 24 Heures, 18.9.91; TA, 27.9.91.
[14] TW, 5.3., 28.6., 10.8. et 18.9.91; Suisse, 8.8. et 11.9.91; cf. aussi APS 1990, p. 142.
[15] Délib. Ass. féd., 1991, I/II, p. 62 et 76.
[16] TW, 23.1.91; Suisse, 5.3.91.
[17] FF, 1991, II, p. 415 ss.; BO CE, 1991, p. 815 s.; BO CN, 1991, p. 2205 s.; 24 Heures, 3.12.91.
[18] JdG, 11.2., 8.5. et 28.5.91. Cf. aussi APS 1989, p. 131 s.
[19] FF, 1991, II, p. 927 ss. (droit d'expropriation); JdG et 24 Heures, 23.5.91. Cf. APS 1990, p. 143 s.
[20] NZZ et Suisse, 17.7.91.
[21] NZZ et Bund, 10.4.91.
[22] BaZ, 22.2.91; TA, 21.8.91. Cf. aussi APS 1990, p. 144.
[23] Rapp.gest. 1991, p. 314.
[24] BO CN, 1991, p. 1337 s. et 2100 ss.; SGT, 26.11.91.
[25] BO CN, 1991, p. 84;BO CE, 1991, p. 331; FF, 1991, I, p. 1277 ss.; cf. aussi APS 1990, p. 142.
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