Année politique Suisse 1991 : Infrastruktur und Lebensraum / Erhaltung der Umwelt / Qualité de l'air
En mars, le Conseil fédéral a présenté son
concept complémentaire de lutte contre la pollution de l'air (qui devrait renforcer les décisions déjà prises, telle l'introduction d'une taxe sur les énergies fossiles) qui résulte de son examen du plan de mesures de l'entreprise Elektrowatt présenté en 1989, afin de satisfaire les buts de la stratégie de lutte contre la pollution atmosphérique
[30]. La principale proposition faite a concerné l'introduction d'un
écobonus destiné à appliquer réellement le principe du pollueur-payeur par la pénalisation des activités polluantes et la récompense des comportements respectueux de l'environnement. Il a été présenté sous la forme d'une taxe prélevée en fonction des kilomètres parcourus (10 centimes par km), dont le produit (4 milliards de francs par an) serait ensuite redistribué aux citoyens
[31]. Cela aurait dû entraîner une réduction importante du trafic (10-15%) et des émissions polluantes. Cette forme d'écobonus a été préférée à celle qui aurait consisté en une taxe sur le nombre de litres d'essence consommés. Afin de tenir cette comptabilité kilométrique annuelle, il aurait été nécessaire d'équiper chaque automobile d'un appareil (odomètre) fiable et non manipulable par l'usager. Les autres mesures annoncées furent, entre autres, une limitation supplémentaire des émissions polluantes des poids lourds, une diminution des émissions de composés organiques volatiles, une augmentation des amendes, un accroissement des contrôles de vitesse ainsi que la promotion des véhicules électriques
[32].
Les
réactions à ce catalogue de mesures furent de divers ordres. Le PRD s'est montré relativement positif vis-à-vis de ces propositions, mais s'est inquiété de la dimension antisociale de l'écobonus
[33]. Le PDC s'est déclaré heureux de voir mieux appliqué le principe du pollueur-payeur. Le PS fut satisfait que le principe de l'introduction d'un écobonus soit explicitement formulé. L'UDC s'est, par contre, montrée très sceptique, en particulier au sujet de l'écobonus dont elle doutait de la praticabilité. Les organisations automobilistes, quant à elles, ont rejeté les mesures proposées, jugées impraticables, onéreuses ou inutiles. Par contre, les organisations de protection de l'environnement ont salué ces propositions, mais ont regretté les longs délais que nécessiterait leur mise en oeuvre
[34].
En octobre, face aux difficultés et coûts importants ainsi qu'au large front du refus que son annonce avait provoqué, le
Conseil fédéral a décidé finalement d'abandonner l'idée d'introduire l'écobonus défini précédemment. En effet, un rapport du DFI avait révélé que l'odomètre serait très onéreux, notamment sa pose.. Des essais avaient montré que l'appareil existant n'était compatible qu'avec 10% des véhicules. Il aurait donc fallu, dans la majorité des cas, modifier de façon importante les automobiles, ce qui aurait coûté entre 400 et 500 millions de francs. Si les partis bourgeois se sont félicités de cette décision, les socialistes et les écologistes l'ont particulièrement regrettée
[35].
La presse a rendu publique l'intention de F. Cotti de proposer, dans le cadre de ce train de mesures antipollution, l'interdiction, dès 1995, de tous les
véhicules sans catalyseur vieux de sept ans et plus. Une telle mesure aurait dû concerner environ 500 000 véhicules automobiles et permettre la réduction des émissions de NOx et d'hydrocarbures de, respectivement, 12 300 et 5100 tonnes. L'annonce d'un tel projet a immédiatement suscité de vives protestations, notamment de la part des associations d'automobilistes, et s'est attirée de nombreuses critiques provenant de larges cercles de la population, des médias, du monde politique, de l'administration et même d'organisations de protection de l'environnement. Il fut principalement argué que remplacer une si grande partie du parc automobile en si peu de temps coûterait trop cher, que le résultat même serait incertain et que cela serait impossible à mettre en oeuvre. Cette mesure a finalement, elle aussi, été abandonnée, mais un rapport à ce sujet a tout de même été demandé au DFJP
[36].
De plus, une semaine avant les élections fédérales, une "fuite" permettait aux médias de faire état du projet du DFTCE, du DFI et du DFF
d'augmenter le litre d'essence de 30 ou 35 centimes, tandis que des bruits de la sorte couraient déjà depuis l'été. Cette mesure aurait eu pour but de remplir les caisses fédérales, d'instaurer une taxe sur le CO2, de disposer de fonds pour l'achèvement du réseau de routes nationales ainsi que d'aligner les prix suisses de l'essence sur ceux des pays voisins (pour mettre fin au "tourisme de l'essence"). Cette révélation a provoqué une levée de boucliers et d'aucuns l'ont considérée comme une des causes du recul des partis gouvernementaux et du succès des automobilistes lors du scrutin
[37]. En novembre, le gouvernement déclarait qu'il étudiait désormais le projet d'une hausse de 20 centimes afin d'assainir les finances fédérales
[38].
Le Conseil national a transmis comme postulat la motion Jaeger (adi, SG) qui demande que la taxe sur le CO2 projetée soit combinée avec celle sur l'énergie qu'il est prévu d'introduire dans le cadre d'Energie 2000. Cela devrait permettre d'éviter un transfert vers des formes d'énergie échappant à la taxe ainsi que les effets négatifs d'une perception séparée
[39].
[30] Ces buts sont de ramener d'ici 1997-1998 (et non plus 1995) les émissions d'oxides d'azote et d'hydrocarbures à leur niveau de 1960. Voir aussi APS 1989, p. 174.
[31] Selon ce système, le citoyen qui ne roulerait pas du tout pendant l'année, même s'il ne possède pas de voiture, recevrait 800 francs. Celui qui roulerait 8000 km devrait payer 800 francs, mais en recevrait 800. Au delà de cette distance, les automobilistes seraient taxés selon cette même courbe progressive (la moyenne suisse de kilomètres parcourus par automobiliste est de 15 000).
[32] TA et SGT, 5.3.91; Vat., 9.3.91; presse du 12.3.91; NZZ, 20.3.91; TA, 13.4. et 17.4.91. Voir aussi APS 1989, p. 174 s. et 1990, p. 189.
[33] F. Cotti a précisé ensuite que la formule de I'écobonus comprendrait certains aménagements et exceptions, notamment en ce qui concerne les régions de montagne et ceux qui utilisent professionnellement leur véhicule (LM, 21.3.91).
[34] NZZ et TW, 13.3.91; Baz, 16.3.91; SGT, 16.3.91. Signalons que la presse romande fut particulièrement dure à l'égard du paquet de mesures proposé par le gouvernement (24 Heures, 26.3.91 ou NF, 3.4.91, par exemple). Par aileurs, un sondage commandé par l'Union professionnelle suisse de l'automobile a montré que plus des deux tiers des personnes interrogées étaient opposées à l'introduction d'un écobonus ou d'une forte taxe sur l'essence: presse du 5.7.91.
[35] Presse du 24.8. et 19.10.91.
[36] LM, 8.2.91; BZ, 9.2.91; SGT, 9.2.91; TA, 21.2.91; SZ, 26.2.91; Bund, 28.2.91. Voir aussi APS 1989, p. 174 s.
[37] Presse du 14.10. et 15.10.91; NQ, 25.10.91. Voir aussi supra, part. I, 6a (Produits pétroliers).
[38] Presse du 1.11.91. Voir aussi supra, part. I, 5 (Indirekte Steuern).
[39] BO CN, 1991, p. 1972. Taxe sur le CO2: Bund, 18.5.91; SHZ, 13.6.91.
Copyright 2014 by Année politique suisse
Dieser Text wurde ab Papier eingescannt und kann daher Fehler enthalten.