Année politique Suisse 1992 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik / Organisations internationales
En additionnant les signatures récoltées par la
gauche (un peu plus de 50 000)
et celles du comité de
la droite isolationniste, les
référendaires ont transmis aux autorités fédérales au total près 90 000 signatures valables. Suite à la très large acceptation de l'adhésion aux institutions de Bretton Woods par le parlement, le Conseil fédéral, tout particulièrement O. Stich, s'est engagé vigoureusement en faveur de l'adhésion de la Suisse
[73].
Après une campagne référendaire animée, les citoyens suisses ont accepté par 55,8% des suffrages l'adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods. Soutenu par le Conseil fédéral et une large majorité de la classe politique, l'adhésion au FMI et à la Banque mondiale était combattue par deux courants politiques diamétralement opposés, à savoir, d'un côté, la gauche tiers-mondiste et une partie du PS et de l'autre côté, l'extrême droite et une partie de l'UDC.
Les partisans du oui ont surtout mis l'accent sur le fait que seule l'action des Etats dans un cadre multilatéral pouvait encore être capable d'apporter des solutions aux problèmes économiques, sociaux et écologiques qui ont atteint une dimension internationale. Dans ce contexte nouveau, l'adhésion de la Suisse constituerait un acte de solidarité vis-à-vis de la communauté internationale et mettrait fin à son isolement. Pour un pays aussi fortement dépendant de l'économie internationale que la Suisse, il serait dans son intérêt de participer aux plus importantes organisations internationales de coopération économique et monétaire et d'en influencer les orientations. Ces dernières années, les commandes adressées à l'industrie helvétique, dues à la Banque mondiale, se sont montées à 500 millions de francs par année; un tel recours aux entreprises suisses aurait pu être remis en cause en cas de victoire du non. De surcroît, en adhérant avant la fin de l'année 1992, la Suisse aurait eu de bonnes chances d'être admise au Conseil d'administration des deux institutions.
Les
opposants écologistes et de gauche ont surtout mis l'accent sur les répercussions sociales et écologiques des programmes d'ajustement structurel imposés par le FMI dans les pays du Tiers-monde et sur le fait que la participation de la Suisse à cette institution ne modifierait pas son orientation. Pour les opposants de droite, c'est surtout le coût financier de l'adhésion qui a motivé leur rejet
[74].
Selon l'analyse Vox, la confiance des votants envers le gouvernement a joué un rôle prépondérant dans leur choix sur un objet aussi complexe et mal connu. Malgré les nombreux objets soumis à votation le 17 mai, les personnes interrogées semblent avoir plutôt bien compris les enjeux. Les Suisses romands, les rentiers et les personnes disposant d'une formation supérieure se sont montrés les plus favorables à l'adhésion, alors que les agriculteurs et les ouvriers se sont révélés les plus réticents. Contrairement aux sympathisants du PDC et du PRD, qui ont suivi les mots d'ordre du parti national, ceux de l'UDC ont majoritairement rejetés le projet des autorités. Les votants écologistes et proches du PSS ont dans l'ensemble plutôt penché pour le oui. Un quart des opposants ont invoqué des raisons financières pour justifier leur non; un autre quart s'est prononcé négativement pour des motifs tiers-mondistes. Parmi les partisans, les arguments anti-isolationnistes ont été exprimés le plus souvent, notamment la possibilité pour la Suisse de co-décider au sein des organisations internationales
[75].
Adhésion de la Suisse aux institutions de Bretton Woods. Votation du 17 mai 1992
Participation: 38,8%
Arrêté fédéral concernant l'adhésion:
Oui: 923 685 (55,8%)
Non: 730 553 (44,2%)
Loi fédérale sur la participation:
Oui: 929 929 (56,4%)
Non: 718 254 (43,6%)
Mots d'ordre:
Oui: PRD (1*), PDC, UDC (6*), PL, AdI, PEP; Vorort.
Non: PES (4*), PdT, DS, PA; USAM, ASIN.
Liberté de vote: PS (7*); USS.
* Recommandations différentes des partis cantonaux.
Dès le résultat de la votation connu, le Conseil fédéral et la diplomatie helvétique ont mené des tractations serrées pour tenter d'obtenir un si
ège au Conseil d'administration du FMI et de la Banque mondiale. Bien que, depuis plusieurs mois, la création d'un 23e siège était prévue, son obtention par la Suisse devenait très compromise en raison de la candidature récente de la Russie. Durant les mois précédant l'assemblée annuelle du FMI de septembre où devaient avoir lieu certains remaniements en raison de nombreuses adhésions, les diplomates suisses ont multiplié les contacts avec les représentants de différents pays membres afin d'obtenir leur soutien ou d'accepter de participer au groupe de pays dont la Suisse deviendrait le chef de file
[76]. La Turquie et l'Afrique du Sud ont ainsi été approchées, mais sans succès
[77]. Par contre, plusieurs autres pays (Pologne, Azerbaïdjan, Tadjikistan, Ouzbékistan, Turkménistan et Kirghizie) ont accepté de se joindre à la Suisse en échange du financement d'une partie des frais d'adhésion
[78]. Ces intenses efforts diplomatiques ont porté leurs fruits puisque le groupe de pays emmené par la Suisse s'est vu attribué par le Conseil des gouverneurs du FMI un 24e siège dans les organes exécutifs des deux principales institutions de Bretton Woods. Le groupe dirigé par la Suisse rassemble 2,77% du total des voix du Conseil d'administration du FMI, ce qui le met au 18e rang des 24 groupes de pays; à la Banque mondiale, le groupe dirigé par la Suisse représente 2,74% des voix
[79].
Le choix du représentant suisse au Conseil des gouverneurs du FMI a donné lieu à plusieurs hésitations, la BNS et le DFF convoitant ce siège. Le Conseil fédéral a finalement désigné M. Lusser, président de la Banque nationale, au détriment d'O. Stich, chef du DFF, qui s'était également porté candidat. Ce choix a été critiqué par la gauche qui y a vu l'expression de la priorité accordée aux problèmes monétaires sur la politique d'aide au développement. Le siège au Conseil des gouverneurs de la Banque mondiale est revenu à J.P. Delamuraz, ce qui ne fut contesté par personne
[80].
[73] FF, 1992, I, p. 1266 ss.; presse des 11.1. et 25.3.92; APS 1991, p. 82 ss.
[74] Presse des mois d'avril et mai 1992; cf. aussi APS 1991, p. 82 ss. pour une présentation plus complète des arguments des partisans et adveraires de l'adhésion.
[75] FF, 1992, V, p. 443 s.; presse du 18.5.92; Vox, Analyse des votations fédérales du 17 mai 1992, Berne 1992.
[76] Hormis pour les grandes puissances économiques, la participation au Conseil d'administration se fait par groupe de pays.
[77] Sur les négociations avec l'Afrique du Sud: NQ, 23.9. et 24.9.92.
[78] Le DFF a précisé que ce montant ne dépasserait pas 2 millions de francs et serait prélevé sur l'aide en faveur de l'Europe centrale et orientale (presse du début du mois d'août et 12.8.92).
[79] Presse des 19.5.. 25.8., 23.9., 24.9. et 25.9.92; NQ 14.6. et 5.9.92; BaZ, 11.7.92; FF, 1993, I, p. 365 ss.
[80] Presse du 3.6.92; Suisse 1.9.92.
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