Année politique Suisse 1996 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
 
Europe: EEE et UE
Alors qu'en 1995 le Conseil fédéral avait simultanément pris position sur les initiatives populaires "Négociations d'adhésion à la CE: que le peuple décide!" des Démocrates suisses/Lega et "Pour notre avenir au coeur de l'Europe" du Comité "Né le 7 décembre", le parlement s'est quant à lui limité à l'examen de la première des deux initiatives, laissant en suspens la seconde compte tenu de son éventuel retrait au cas où l'initiative des jeunes "Oui à l'Europe" viendrait à aboutir [6].
La majorité des députés siégeant au Conseil national s'étant entendue sur la nécessité de se limiter au strict traitement de l'initiative des Démocrates suisses et de la Lega - à savoir à la question de l'opportunité de modifier ou non la répartition des compétences prévues par la Constitution en matière de politique étrangère - la discussion relative à cet objet n'a pu être à l'origine d'un nouveau débat de fond sur la question de l'intégration de la Suisse au sein de l'Europe. C'est dès lors principalement sur les terrains formel et institutionnel que les différents groupes parlementaires sont intervenus pour finalement tous rejeter, à l'exception des initiants et du groupe du parti de la liberté, l'initiative déposée en janvier 1994 par les Démocrates suisses et la Lega. Les arguments invoqués pour justifier ce rejet massif ont principalement porté sur le fait que le report de compétences du Conseil fédéral au souverain prévu dans l'initiative conduirait ni plus ni moins à l'atrophie et à l'immobilisme total de la politique étrangère helvétique. Par ailleurs, nombre de députés ont mis l'accent sur la nécessité de ne voir intervenir le peuple et les cantons en matière de politique extérieure qu'une fois connus le contenu et les résultats des négociations, ce qui au demeurant n'entraîne aucun déficit démocratique puisque, en fin de compte, la décision finale incombe au souverain. De leur côté, les défenseurs de l'initiative ont principalement soutenu que face à l'ouverture de négociations engageant pareillement l'avenir du pays, il n'était pas concevable de laisser au seul gouvernement le pouvoir de décider et qu'en conséquence, il fallait que cette prérogative soit transférée au peuple et aux cantons.
Si la Chambre du peuple a ainsi recommandé au peuple et aux cantons de rejeter cette initiative à une très forte majorité, elle a également refusé de présenter un contre-projet au texte des Démocrates suisses/Lega, conformément au souhait exprimé par la Commission de politique extérieure [7].
Une fois achevé le débat relatif à l'initiative des Démocrates suisses et de la Lega, le Conseil national a en outre traité à la suite divers motions et postulats ayant pour objet la politique d'intégration européenne de la Suisse. Ainsi, la motion déposée en 1994 par le groupe de l'Union démocratique du centre selon laquelle le gouvernement est chargé de donner une nouvelle orientation à la politique extérieure de la Suisse en renonçant avant tout à l'adhésion à l'UE comme objectif stratégique a été transmise comme postulat. Bien que poursuivant une finalité fort différente de celle de la motion du groupe UDC, la motion Comby (prd, VS) - qui enjoint le Conseil fédéral de réactiver la demande d'adhésion de la Suisse à l'UE sitôt connu le résultat des négociations bilatérales - a également été transmise sous la forme moins contraignante du postulat, et ce en dépit de l'opposition formulée par les députés Reimann (udc, AG) et Frey (udc, ZH). En revanche, la motion Keller (ds, BL) chargeant le Conseil fédéral de baser sa politique étrangère sur le strict maintien de la neutralité du pays et, à ce titre, de renoncer notamment à l'adhésion de la Confédération à l'Union européenne n'a pas été transmise par les députés du National. Un postulat du même auteur demandant au gouvernement de revoir son rapport sur la politique étrangère de la Suisse en tenant compte de l'opinion exprimée par la majorité des citoyens lors du vote sur l'EEE devait d'ailleurs connaître le même sort [8].
C'est au terme d'une discussion nettement plus circonscrite - durant laquelle fut à nouveau soulignée la nécessité de ne pas modifier la répartition des compétences en matière de politique étrangère telle que définie par la Constitution - que les députés du Conseil des Etats ont eux aussi rejeté sans contre-projet l'initiative des Démocrates suisses/Lega [9].
Réunis à Lucerne dans le cadre du premier Forum "Europa-Dialog", les ministres des affaires étrangères d'Autriche, de Suède, de Finlande et de Norvège ont fait part aux autorités helvétiques ainsi qu'à un public d'un millier de personnes de leurs expériences mutuelles au sein et en dehors de l'UE. Bien que les représentants des trois nouveaux membres de l'Union aient jugé de façon positive leur entrée au sein de l'Europe des Quinze, ils se sont néanmoins gardés de dresser une image par trop idyllique de la construction européenne, reconnaissant que celle-ci ne résoud en aucun cas de façon automatique les problèmes des Etats-membres. Mettant en exergue le poids important accordé aux petits pays dans le processus décisionnel européen, les ministres autrichien, suédois et finlandais ont invité la Suisse à profiter de l'échéance de 1998 - année durant laquelle l'UE considérera son élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale - pour se présenter aux portes de l'Union. De son côté, le dignitaire norvégien a déclaré que son pays n'envisageait pas d'organiser un nouveau référendum en vue d'adhérer à l'UE après l'échec de novembre 1994. Tirant un bilan positif de ce forum, les organisateurs de l'"Europa-Dialog" ont fait part de leur intention de réitérer cette manifestation en 1997 [10].
A l'appel du Mouvement pour l'Europe, de la ville de Zurich, du canton de Genève et des trois quotidiens "Tages Anzeiger", "La Regione" et "Le Nouveau Quotidien", quelque 3000 personnes se sont réunies à Zurich pour commémorer le 50e anniversaire de la proclamation du discours sur les "Etats-Unis d'Europe" par Winston Churchill. Invité d'honneur de cette fête intitulée "Europe, notre cause commune", l'ex-chancelier de la République fédérale d'Allemagne Helmut Schmidt a adressé un vibrant appel en vue de la participation de la Suisse au processus de construction européenne [11].
Munie de 106 442 signatures récoltées non sans mal, l'initiative "Oui à l'Europe" a été déposée dans le courant du mois de juillet à la Chancellerie fédérale. Rappelons que cette initiative demande que la Confédération engage sans délai des négociations avec l'UE en vue d'y adhérer; elle constitue pour l'heure la troisième initiative populaire pendante concernant les relations Suisse-UE [12].
Au vu de l'avancée difficile des négociations bilatérales entre la Suisse et l'UE, l'option visant à faire revoter une seconde fois le peuple helvétique sur l'Espace économique européen ("EEE bis" ou "EEE-bis à l'essai") a rassemblé les suffrages d'un nombre grandissant de proeuropéens, tant parmi les partis gouvernementaux - exception faite de l'UDC - qu'au sein des milieux économiques et syndicaux. Jugeant que l'adhésion de la Suisse à l'UE n'est pas envisageable dans le contexte actuel, les partisans de cette voie médiane ont laissé entendre que pareil scrutin pourrait avoir lieu en 1997 ou 1998. Sous l'impulsion d'une interpellation déposée par le député valaisan Simon Epiney (pdc), une dizaine de parlementaires favorables à la réactivation du dossier EEE devait même recommander au Conseil fédéral de retirer la demande d'adhésion de la Suisse à l'Union, ceci afin de dépassionner le débat sur l'Europe et de préparer le terrain pour cette seconde votation populaire sur l'Espace économique européen. Cette proposition de retrait fut d'ailleurs reprise par l'UDC lors des entretiens de la Maison de Watteville qui se tinrent au début du mois de novembre: présentée comme un moyen à même de faciliter l'aboutissement des négociations bilatérales ainsi que l'acceptation de leurs résultats par le peuple suisse, cette voie sembla alors trouver un écho grandissant auprès des présidents des partis socialiste et radicaux. Elle fut en revanche fraîchement accueillie par le Conseil fédéral qui s'est attaché à répéter son intention de maintenir le cap dans la conduite des affaires européennes.
De leur côté, les opposants à toute forme d'intégration de la Confédération à l'UE devaient réitérer à maintes reprises leur volonté d'empêcher la conclusion de tout accord passé avec l'UE qui pourrait être dommageable aux intérêts helvétiques. Ainsi, la menace d'un référendum contre le résultat des négociations bilatérales menées avec les Quinze dans les domaines clés de la libre circulation des personnes et des transports terrestres s'est faite pressante tout au long de l'année, limitant par là-même la marge de manoeuvre des négociateurs suisses à Bruxelles [13].
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Négociations bilatérales avec l'UE
Les négociations entre la Suisse et l'Union européenne concernant la conclusion d'accords bilatéraux sectoriels se sont poursuivies tout au long de l'année sous revue sans pour autant que les deux parties n'arrivent à s'entendre de façon définitive sur les questions particulièrement conflictuelles de la libre circulation des personnes et des transports routiers. Au vu des principes de "globalité et de parallélisme approprié" établis dès le début des négociations par les Quinze, aucun des sept accords sectoriels n'a ainsi pu être conclu d'ici la fin de l'année, et ce bien que les dossiers qualifiés de techniques (recherche, obstacles techniques aux échanges, produits agricoles et accès aux marchés publics) aient fait l'objet d'un large assentiment tant du côté helvétique que de celui des négociateurs européens.
Pressé dès le début d'année par les associations faîtières de l'économie suisse désireuses de voir aboutir les pourparlers dans les semaines qui suivaient, le Conseil fédéral chargea dans un tout premier temps ses négociateurs de rédiger des clauses évolutives "acceptables de part et d'autre" non plus pour le seul domaine de la libre circulation des personnes, mais également pour ceux des transports terrestres et aériens: concernant la libre circulation des personnes, le gouvernement devait initialement réitérer sa volonté de se limiter dans une première phase à une amélioration qualitative du statut des travailleurs européens en Suisse (abolition du statut de saisonnier, regroupement familial, mobilité géographique et professionnelle), suivie par la suite d'un nouveau tour de table sur la libre circulation à proprement parler. Dans le domaine des transports routiers, la stratégie à deux vitesses chère au gouvernement helvétique tablait sur une augmentation du nombre des 40 tonnes autorisés à circuler en Suisse, ou sur un élargissement de la zone frontière dans laquelle ces véhicules auraient été admis. Le second volet des négociations relatif à ce dossier aurait alors porté sur une éventuelle levée de la limite des 28 tonnes à partir de 2005 ainsi que sur l'introduction de taxes d'incitation favorisant le transit alpin par le rail.
Bien que le principe même de l'introduction de clauses évolutives n'ait pas été exclu par les Quinze, le voeu des autorités suisses de voir s'achever le dur exercice des bilatérales d'ici à la moitié de l'année 1996 ne devait toutefois pas se réaliser en raison des divergences de vue entre les parties concernant la question du contenu de ces clauses. Ne prévoyant la fixation d'aucune date ni moyens pour parvenir aux objectifs finaux des négociations - menace de référendum oblige -, la position helvétique ne pouvait en effet convenir aux négociateurs européens désireux de voir la Confédération prendre des engagements précis et contraignants sur les questions relatives à la libéralisation de son marché du travail et à la levée de l'interdiction des 40 tonnes. Conscients des craintes que pareilles revendications ne manqueraient pas de susciter dans l'opinion publique suisse, les Quinze laissèrent néanmoins déjà entrevoir la possibilité d'inclure une clause de sauvegarde à laquelle la Suisse pourrait avoir recours en cas d'afflux massif de travailleurs étrangers sur son territoire.
Afin de sortir de l'impasse dans laquelle se trouvaient à nouveau négociateurs suisses et européens à la fin du mois de janvier, les autorités helvétiques lièrent de nombreux contacts informels durant les mois de février et mars avec les délégués de tous les pays membres de l'Union ainsi qu'avec la Commission européenne. Au terme de ces discussions exploratoires dont la teneur fut largement tenue confidentielle - mais au cours desquelles la Suisse aurait pour la première fois lancé l'idée d'abandonner la préférence accordée sur son marché du travail aux personnes domiciliées en Suisse, puis le système de contingentement de la main-d'oeuvre étrangère -, le Conseil fédéral procéda à une évaluation de la situation. Prenant acte de l'accueil fort mitigé réservé par les Quinze aux nouvelles propositions helvétiques à l'occasion notamment de la réunion en mars des ministres européens des transports, le gouvernement se déclara alors prêt à modifier le mandat de négociation suisse afin d'éviter que le processus bilatéral engagé depuis la fin 1994 se solde sur un constat d'échec.
Dans la perspective de procéder en avril aux adaptations nécessaires de l'offre suisse dans les domaines de la libre circulation des personnes et des transports routiers, une large procédure de consultation auprès des partis politiques, des cantons et des partenaires sociaux fut ouverte. Fort du soutien que devaient à cette occasion lui témoigner les instances dirigeantes de l'ensemble des partis gouvernementaux - UDC y compris - ainsi que les commissions de politique extérieure du parlement, le Conseil fédéral décida en conséquence d'élargir le mandat de ses négociateurs à Bruxelles dans le dossier clé de la libre circulation des travailleurs ainsi que dans celui des transports routiers: déterminé à rester en deçà des dispositions comprises dans le Traité EEE de 1992, le gouvernement proposa à ce titre que l'accord sur la libre circulation entérine dans un premier temps l'abandon de la préférence reconnue aux Suisses et aux étrangers munis d'une autorisation d'établissement vis-à-vis des ressortissants de l'UE déjà établis sur le territoire helvétique, suivi deux ans plus tard et toujours sur une base réciproque de la suppression pure et simple de cette disposition pour l'ensemble de la main-d'oeuvre en provenance de l'Union. Quant aux négociations portant sur la suppression potentielle des contingents, la nouvelle offre suisse prévoyait que celles-ci débutent cinq ans après l'entrée en vigueur de la première étape. Concernant le domaine des transports terrestres, le Conseil fédéral se dit par ailleurs prêt à procéder à une adaptation progressive du poids maximal des camions dès 2001, pour autant que le passage des 28 aux 40 tonnes soit associé à une hausse coordonnée avec l'UE des taxes routières afin que le transfert de la route au rail soit promu et que les coûts externes du trafic routier soient internalisés. En contrepartie de ces concessions, les autorités suisses formulèrent à nouveau leurs revendications en matière de transports aériens, à savoir que l'Union offre la possibilité aux compagnies nationales d'organiser dès l'entrée en vigueur de l'accord sectoriel des vols vers l'Europe, puis que des améliorations progressives leur soient consenties afin que cinq ans plus tard les avions suisses puissent effectuer des vols internes dans les pays européens.
Cette percée spectaculaire qui, l'espace d'un instant, laissa présager l'aboutissement proche des négociations bilatérales fut néanmoins d'emblée hypothéquée par les déclarations des Démocrates suisses et du député UDC et président de l'ASIN, Christoph Blocher, qui annoncèrent leur intention de lancer un référendum contre les accords sectoriels avec l'UE au cas où ceux-ci seraient conclus sur la base des dispositions comprises dans la nouvelle offre des autorités fédérales. Le recours à la procédure référendaire fut d'ailleurs également évoqué par le parti de la liberté et les Verts. Quant aux Quinze - dont la Suisse espérait un signal favorable suite aux concessions accordées -, la majorité d'entre eux accueillit de manière positive les nouvelles propositions de la partie helvétique. Plusieurs Etats-membres, Espagne et Portugal en tête, rappelèrent toutefois qu'à leurs yeux la Suisse se devait de souscrire à l'objectif de la libre circulation avant qu'une modification des directives de négociation données à la Commission européenne ne soit entreprise [15].
Au terme d'un examen détaillé de l'offre helvétique, les ministres des affaires étrangères des Quinze reconnurent à leur tour que celle-ci avait imprimé une nouvelle dynamique au processus bilatéral entre la Confédération et l'UE. En dépit de cette appréciation générale favorable, les partenaires de l'Union firent cependant clairement comprendre aux négociateurs suisses que s'ils approuvaient désormais officiellement l'approche par étapes telle que suggérée par le Conseil fédéral, ils attendaient en revanche davantage de concessions dans les deux domaines clés des négociations: ainsi, les Quinze devaient avant tout rappeler leur attachement à une mise en oeuvre pleine et entière de la libre circulation des personnes, en échange de quoi ils se déclarèrent disposés à octroyer à la Suisse la clause de sauvegarde ad hoc. Ils réitérèrent par ailleurs leur revendication concernant l'accès des poids lourds de 40 tonnes aux centres économiques du Plateau suisse dès l'entrée en vigueur de l'accord sectoriel et insistèrent sur le fait qu'un certain nombre de règles soit d'ores et déjà fixé pour s'assurer que la redevance alpine suisse sera proportionnelle et non-discriminatoire.
Bien que les deux parties aient déclaré vouloir profiter du nouvel élan insufflé par la réponse encourageante de l'Union européenne aux concessions suisses, la réunion en juillet des ministres des affaires étrangères des Quinze se solda sans que ceux-ci ne formulent les contre-propositions détaillées que la partie helvétique s'estimait alors en droit d'obtenir de l'UE. Seule une déclaration d'intention dans laquelle les partenaires de l'Union demandèrent que les négociations bilatérales soient menées à bien dès que possible devait marquer cette rencontre qui ne conduisit cependant à la fixation d'aucune échéance pour parvenir à cet objectif [16].
Le souhait des autorités fédérales de voir aboutir le périlleux exercice des bilatérales avant la fin de l'année ne fut pas davantage exaucé à l'issue des diverses rencontres que tinrent les négociateurs suisses et européens ainsi que les ministres des transports et des affaires étrangères des Quinze durant les mois de septembre à décembre. Bien que la Commission européenne eût, dans une large mesure, reconnu le bien-fondé des thèses helvétiques concernant la mise en place d'une taxe poids lourds reflétant la vérité des coûts du trafic routier, la majorité des pays membres de l'UE - Autriche, Italie et France en tête - rechigna néanmoins à s'engager sur cette voie avant qu'un débat sur la question ne soit mené à l'échelon interne de l'Union. Dans le domaine de la libre circulation des personnes, les Quinze se bornèrent à répéter les revendications formulées jusqu'alors: que la Suisse s'engage de façon contraignante sur ce principe, sans quoi aucun accord sur les bilatérales ne pourrait être trouvé. L'intransigeance de l'UE en la matière fut néanmoins tempérée par une proposition de la Commission européenne visant à introduire une clause de sauvegarde taillée sur mesure en vue d'apaiser les craintes de la population helvétique: baptisée "mécanisme d'évolution contrôlée", ce dispositif complexe de fermeture du marché de l'emploi helvétique en cas d'afflux massif de ressortissants européens pourrait être actionné unilatéralement par la Confédération durant une période transitoire de quelques années, et ce sans que l'Union ne prenne de mesures de rétorsion. Passé ce délai, ce mécanisme se transformerait en clause de sauvegarde classique dont l'utilisation - limitée dans le temps - nécessiterait alors l'accord préalable des deux parties. Malgré cette contre-proposition qualifiée d'intéressante par les autorités helvétiques, la Berne fédérale réitéra une nouvelle fois son refus quant à la conclusion d'un accord entraînant le passage automatique vers la libre circulation intégrale des personnes. Cette divergence de fond entre la Suisse et l'UE devait toutefois singulièrement s'applanir au début du mois de décembre après que négociateurs suisses et européens eurent communément élaboré une solution de compromis: aux termes de cette dernière, l'accord sectoriel consacrerait la suspension des contingents de main-d'oeuvre européenne dès 2005, et ce pour une année d'essai. A l'issue de cette période probatoire durant laquelle la Suisse pourrait actionner la clause de sauvegarde unilatérale, les autorités fédérales et éventuellement le peuple suisse devraient alors se prononcer formellement sur le renouvellement ou non de cet accord limité à sept ans, sans toutefois que cette décision ne fasse l'objet d'un nouveau round de négociations comme la Suisse l'avait exigé jusqu'alors. En cas d'acceptation du principe même de la libre circulation par la Confédération, cette dernière se verrait alors accorder une période transitoire de sept à neuf ans au terme de laquelle tout mécanisme de freinage devrait être abandonné en vue de garantir la libéralisation pleine et entière de son marché du travail. Suite à cette embellie inespérée dans un domaine qui jusqu'alors avait constitué la principale pierre d'achoppement des négociations, le point de friction entre la Suisse et l'UE semble désormais devoir se cristalliser sur le secteur des transports routiers où les positions des deux parties n'ont pour l'heure pu faire l'objet d'aucun compromis concernant la question de la fiscalité à travers l'Arc alpin [17].
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Union européenne
Alors que bon nombre d'observateurs s'étaient accordés à reconnaître le rôle déterminant de la Conférence intergouvernementale (CIG) dans la définition de la future politique d'intégration de l'Union européenne, cette grand-messe - qui a débuté à la fin du mois de mars à Turin (I) - n'a pour l'heure guère répondu aux attentes de révision du Traité de Maastricht. Alors que le sommet de Turin aurait dû se focaliser sur des sujets aussi cruciaux que l'élargissement de l'UE aux pays d'Europe centrale, le passage de la règle de l'unanimité au vote à la majorité qualifiée, l'élaboration d'une politique extérieure et de sécurité commune (PESC) ou encore sur la nécessité de rendre davantage démocratiques et transparentes les décisions de l'UE aux yeux des citoyens européens, celui-ci a en fait été monopolisé en grande partie par le différend opposant la Grande-Bretagne aux autres membres de l'Union au sujet de la crise de la vache folle [18].
Malgré l'insistance des autorités fédérales auprès des Quinze, la Suisse - faute d'être membre de l'Union européenne - s'est vue refuser le droit à prendre part au Forum économique UE-ASEAN qui s'est tenu début mars à Bangkok (Thaïlande) [19].
 
[6] Bund, 13.3.96; presse du 14.3.96. Pour le contenu des deux initiatives, voir APS 1995, p. 71.6
[7] BO CN, 1996, p. 454 ss. et 1276 s.; Lib., 20.3.96; presse du 21.3.96.7
[8] BO CN, 1996, p. 469 ss.8
[9] BO CE, 1996, p. 338 ss.; FF, 1996, III, p. 40; presse du 6.6.96.9
[10] Presse des 19.1 et 20.1.96; NQ, 22.1.96. Voir aussi APS 1994, p. 64 s.10
[11] Presse des 19.9 et 21.9.96; NQ, 23.9.96; TA, 30.9.96.11
[12] FF, 1997, I, p. 1087 s.; presse des 10.4 et 31.7.96; JdG, 15.4.96; Blick, 14.7.96; NQ, 15.7.96; 24 Heures, 1.8, 5.8 et 6.12.96; BaZ, 13.9.96. Il est à relever que malgré l'aboutissement de l'initiative "Oui à l'Europe", le mouvement "Né le 7 décembre" a décidé de ne pas retirer son initiative populaire demandant un nouveau vote sur l'EEE: presse du 9.12.96. Cf. aussi APS 1995, p. 72.12
[13] BO CN, 1996, p. 1238 s. (interpellation Epiney); NZZ, 3.1 et 7.3.96; TA, 3.1 et 23.8.96; NQ, 4.1, 18.3, 17.7 et 8.11.96; 24 Heures, 19.1 et 30.11.96; Lib., 8.2 et 15.11.96; presse des 13.2, 23.2, 6.3, 7-9.3, 11.3, 18.6, 14.8, 7.11, 9.11 (Watteville), 5.12 et 9.12.96; SHZ, 10.3.96; Bund, 27.3.96; SZ, 8.11.96; Blick, 17.11.96. Voir également APS 1995, p. 71.13
[15] Presse des 13.2, 15.2, 2.3, 5.3, 12.3 (ministres des transports des Quinze), 16.3, 28.3, 2-6.4 et 16-18.4.96; Lib. et Express, 22.2, 7.3 et 27.3.96; NQ, 4.3.96; Bund, 8.3.96; 24 Heures, 18.3, 25.3 et 25.4.96; NLZ, 23.3.96; NZZ, 30.3 et 20.4.96; TA, 9.4.96; JdG, 23.4.96.15
[16] Presse des 27.4, 9.5, 23-25.5, 18.6, 6.7, 13.7 et 16.7.96; 24 Heures, 1.5 et 17.6.96; NZZ, 2.5, 15.6 et 5.7.96; JdG, 11.5, 9.7 et 15.7.96; TA, 11.7.96.16
[17] JdG, 16.9, 11.10, 14.10, 15.10, 22.10, 31.10 et 6.11.96; presse des 17.9, 19.9, 20.9, 4.10, 19.10, 8.11, 14.11, 26.11, 3-7.12, 9.12 et 11-13.12.96; 24 Heures, 21.9, 7.10, 12.10 et 29.10.96; TA, 21.9 et 23.11.96; Express, 3.10 et 5.11.96; NZZ, 9.10.96; NQ, 19.12.96. Pour une synthèse des résultats, voir FF, 1997, II, p. 34 ss. (Rapport du CF sur la politique économique extérieure 96/1+2).17
[18] TA, 6.1, 9.2 et 30.3.96; Bund, 17.1.96; BZ, 30.1.96; JdG, 5.2 et 12.6.96; NQ, 1.3, 26.3, 29.3 et 1.4.96; WoZ, 15.3.96; 24 Heures, 22.3 et 28.3.96; presse du 27.3.96.18
[19] NQ, 28.2.96; 24 Heures, 2.3.96. Cf. infra, AELE.19