Année politique Suisse 1996 : Infrastruktur und Lebensraum / Verkehr und Kommunikation
Trafic routier
A la suite du Conseil national, le Conseil des Etats a transmis une motion Maitre (pdc, GE) demandant au gouvernement de préparer un arrêté fédéral qui autorise à titre exceptionnel le
prélèvement d'un péage pour l'utilisation de l'ouvrage routier envisagé pour relier les deux rives de la Rade de Genève
[16].
A l'instar de ce qu'avait décidé le Conseil des Etats en 1995, le Conseil national a transmis une motion Loretan (prd, AG) demandant au gouvernement de présenter un projet de modification de la loi sur la circulation routière qui permette de
déléguer aux cantons un certain nombre de tâches (admission et contrôle des véhicules appartenant à la Confédération notamment). Il a fait de même avec un postulat Steinemann (pdl, SG) invitant l'exécutif à procéder aux modifications législatives nécessaires afin que la
bifurcation à droite aux feux de signalisation soit autorisée même lorsque le feu est rouge. Les députés ont en effet estimé que ce dispositif avait fait ses preuves dans certains pays, contribuant notamment à la fluidité du trafic. La chambre du peuple a en outre transmis comme postulat une motion Spielmann (pdt, GE) demandant au Conseil fédéral de procéder aux modifications légales nécessaires afin de mettre à disposition des
plaques interchangeables valables pour une automobile et un motocycle. Enfin, la grande chambre a transmis comme postulat une motion de la commission des affaires juridiques enjoignant le gouvernement de supprimer la possibilité pour un particulier d'obtenir de la part des
renseignements téléphoniques (111) le nom et l'adresse du détenteur d'un véhicule déterminé. Si les conseillers nationaux ont en effet estimé que cette disposition posait effectivement problème du point de vue de la protection de la personnalité, ils n'ont cependant pas voulu lier les mains du gouvernement, lequel est en train de procéder à une révision de la loi concernée (LCR)
[17].
Le Conseil fédéral a publié son message concernant la taxe poids lourd liée aux prestations. Cette dernière devrait être introduite en 2001 et remplacera l'actuelle redevance forfaitaire conformément à l'article constitutionnel adopté en 1994 par le souverain. Selon le projet du gouvernement, le montant de la taxe pourrait varier de 1,6 à
3 centimes par tonne et kilomètre parcouru, le Conseil fédéral décidant du montant précis selon les conditions du trafic et de l'économie ainsi qu'en fonction de la fiscalité pratiquée par l'UE. Vraisemblablement, la taxe sera cependant introduite de manière progressive, passant de 1,6 centime lors de son introduction à 2,5 centimes en 2005, ce afin d'éviter tout renchérissement brutal du trafic de marchandises. Le produit de la taxe - 750 millions ou 1,2 milliard de francs pour une taxe de respectivement 1,6 ou 2,5 centimes - reviendra pour deux tiers à la Confédération et pour un tiers aux cantons. Ces derniers devront affecter cette manne financière à la lutte contre le bruit du trafic routier alors que la Confédération pourra allouer les deux tiers de sa part au financement des grands travaux d'infrastructures ferroviaires (NLFA, Rail 2000, parois antibruit, raccordement TGV).
Lors de la présentation de son message, le Conseil fédéral a souligné que cette future redevance - véritable clé de voûte de la politique helvétique en matière des transports - poursuivait de nombreux buts. Parmi ces derniers, la vérité des coûts - mentionnée par ailleurs explicitement dans le mandat constitutionnel - constituait sans aucun doute l'objectif principal dans la mesure où le montant de la taxe avait été calculé pour couvrir l'ensemble des coûts internes du trafic poids lourd ainsi qu'une partie de ceux externes (ceux liés aux accidents, au bruit et à la santé ainsi que ceux résultant des dommages aux bâtiments). Outre cette référence au principe du pollueur-payeur, le gouvernement a également relevé que la future redevance constituait un des instruments principaux pour réaliser le transfert du trafic de la route au rail exigé par l'initiative des Alpes. Cet élément prenait d'ailleurs d'autant plus d'importance dans la mesure où la Suisse envisageait d'abandonner, sur pression européenne, la limite des 28 tonnes: l'exécutif pourra en effet rehausser, le cas échéant, le montant de la redevance parallèlement à la levée progressive de la limite du tonnage. Enfin, il fut mentionné que la taxe poids lourd kilométrique permettrait de financer les grands projets d'infrastructures ferroviaires et, ultérieurement, de les rentabiliser en annulant certains effets de distorsion de la concurrence favorables jusqu'alors à la route.
Au sujet du montant de la future redevance, le Conseil fédéral a relevé que celui-ci n'était ni catastrophique pour l'économie - contrairement à ce qu'affirmaient les détracteurs du projet - ni disproportionné par rapport aux tarifs en vigueur sur les grands axes européens. En ce qui concerne les conséquences pour l'économie, le gouvernement a fait valoir que le renchérissement serait minime, étant donné notamment le gain de productivité que permettrait d'engendrer le vraisemblable abandon de la limite des 28 tonnes. S'adressant aux milieux routiers, l'exécutif a en outre souligné que des coûts externes importants du trafic poids lourd - tels que ceux résultant des dommages à l'environnement - n'avaient pas été pris en compte, les coûts sur la santé n'étant pour leur part couverts que lorsque la taxe aura été élevée à 2,5 centimes. Au sujet de la comparabilité de la redevance avec les tarifs en vigueur au sein de l'UE, l'exécutif a mis en évidence que le montant de 210 francs (pour une taxe de 2,5 centimes) dont devra s'acquitter un 28 tonnes en transit était tout à fait comparable avec les taxes en vigueur sur les axes de transit européens (de 200 à 300 francs sur les axes du Brenner et du Mont-Blanc).
Le parlement a pour sa part débloqué les 5,1 millions de francs prévus dans le budget 1997 pour le développement de l'appareil électronique nécessaire à la mise en oeuvre de la taxe poids lourd kilométrique. Alors que ce même poste avait été biffé en 1995 par les députés, ceux-ci ont estimé que les raisons ayant prévalu à leur refus l'année précédente n'avaient plus lieu d'être. D'une part, le gouvernement avait depuis lors publié son message et ainsi éclairci nombre d'éléments d'application. D'autre part, l'UE - par la voix de la Commission européenne - avait déclaré son intention d'édicter des mesures similaires, dissipant ainsi les craintes de voir la Suisse faire cavalier seul.
Le gouvernement a mis en consultation un
projet de révision partielle de la loi sur la circulation routière visant à améliorer la sécurité sur les routes. La principale innovation porte sur la formation des conducteurs. Outre l'introduction du permis d'élève conducteur dès l'âge de 16 ans, le projet du gouvernement prévoit que la réussite de l'examen ne donnera droit, dans un premier temps, qu'à un permis à l'essai: le conducteur n'obtiendra son permis définitif que s'il n'a pas compromis de manière sérieuse la sécurité routière dans les trois ans suivant la réussite de l'examen et après avoir suivi un cours complémentaire de 16 leçons. En revanche, s'il a commis des infractions graves au code de la route, il devra repasser l'examen d'élève conducteur. Outre cette réforme de la formation des automobilistes, la révision proposée envisage de punir plus sévèrement les récidivistes. Ainsi, chaque nouvelle infraction commise à intervalles rapprochés devrait être suivie d'une mesure plus sévère et finalement, le cas échéant, d'un retrait de permis pour une durée indéterminée. Le projet du gouvernement prévoit également des dispositions relatives à la conduite en état d'ébriété. Désormais, il devrait être possible pour la police de procéder à des contrôles même si le conducteur ne présente aucun signe extérieur suspect. En matière de contrôle des conducteurs sous influence de stupéfiants ou de produits pharmaceutiques, l'exécutif propose par ailleurs d'uniformiser au niveau fédéral les procédures jusqu'alors cantonales et très disparates. Dans ce domaine, aucune tolérance n'est prévue (valeur limite zéro). En revanche, des prises de sang ou des examens d'urine ne pourront être ordonnés que s'il existe des soupçons bien établis
[20].
La grande majorité des partis politiques ainsi que le TCS
ont accueilli positivement les différentes innovations proposées. Seule la proposition d'abaisser à 16 ans l'âge pour le permis d'élève conducteur a été vivement critiquée: selon les différents milieux, l'expérience montre clairement que les très jeunes conducteurs commettent plus d'accidents. Seul parti à avoir accueilli plutôt froidement le projet gouvernemental, l'UDC a estimé que le renforcement des différentes mesures sanctionnant les infractions ne se justifiait pas du fait du récent renchérissement des amendes d'ordre. Ce parti a également critiqué la possibilité d'ordonner des tests d'alcoolémie même en l'absence de signes d'ébriété. L'Association des familles des victimes de la route (AFVR) a pour sa part réclamé que le permis de conduire soit définitivement retiré aux conducteurs qui ont mis gravement en danger d'autres usagers de la route à plus de deux reprises
[21].
Le Conseil national a transmis une motion Bortoluzzi (udc, ZH) demandant au Conseil fédéral de créer les bases juridiques nécessaires afin de subordonner l'obtention du permis de conduire à la présentation d'un certificat écartant toute
toxicomanie de la part du candidat. Les députés ont en effet estimé qu'une telle mesure s'imposait pour des raisons de sécurité évidentes. Pour des motifs similaires, la grande chambre a refusé de transmettre un postulat Leuba (pl, VD) invitant l'exécutif à renoncer à ses intentions d'abaisser la limite du
taux d'alcoolémie autorisé. Elle a également refusé de transmettre une motion Schenk (udc, BE) ainsi qu'un postulat Scherrer (pdl, BE) demandant tous deux d'abroger la disposition de la LCR qui donne une
priorité absolue aux piétons sur les passages cloutés. Contrairement à ce qu'affirmaient les auteurs des deux textes, les députés ont en effet estimé que cette mesure avait contribué à accroître la sécurité des piétons dans la mesure où elle incitait les automobilistes à la plus grande prudence
[22].
Le Conseil national a transmis un postulat Gusset (pdl, TG) invitant le gouvernement à procéder aux modifications législatives nécessaires afin que la
limite de vitesse s'appliquant aux véhicules avec remorque d'un poids total de plus de 1000 kg soit la même que celle frappant les véhicules tracteurs roulant sans remorque
[23].
[16]
BO CE, 1996, p. 157 ss. Voir également
APS 1995, p. 174. Il est à relever par ailleurs que le CF a donné son accord de principe à un tel projet d'arrêté. La ville de Berne est également concernée par cette autorisation, la cité fédérale désirant financer de cette manière la construction d'un tunnel à proximité de la gare:
NQ, 5.3.96. Au sujet de la votation cantonale sur le projet genevois, cf. infra, part. II, 4b.16
[17]
BO CN, 1996, p. 903 ss. (Loretan), 1862 (Steinemann), 359 ss. (Spielmann) et 2399 s. (CAJ). Voir également
APS 1995, p. 174.17
[20] Presse du 18.4.96.20
[21] Presse du 4.9.96. L'ordonnance d'exécution relative à la nouvelle loi sur les amendes d'ordre est par ailleurs entrée en vigueur au mois de septembre. Le montant des amendes a été, comme annoncé, notablement revu à la hausse, certaines passant du simple au triple: presse du 12.1.96;
NZZ, 5.3.96. Voir
APS 1995, p. 176 s.21
[22]
BO CN, 1996, p. 753 ss. (Bortoluzzi et Leuba) et 1794 ss. (Schenk et Scherrer).22
[23]
BO CN, 1996, p. 1861.23
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