Année politique Suisse 1996 : Infrastruktur und Lebensraum / Erhaltung der Umwelt
Politique de protection de l'environnement
Dans son rapport sur le
programme de législature 1995-1999, le Conseil fédéral a défini les lignes directrices qui guideront sa politique en matière de protection de l'environnement durant les quatre prochaines années. Parmi celles-ci figure la volonté de mieux intégrer les objectifs environnementaux dans les autres politiques sectorielles de la Confédération. A cet égard, le gouvernement a d'ailleurs annoncé qu'un plan d'action destiné à assurer le développement durable du pays serait mis en oeuvre d'ici à 1999. Il a en outre fait savoir qu'il entendait favoriser l'application du
principe de responsabilité causale ainsi que celui de la transparence des coûts. Ses objectifs en matière de protection de l'environnement durant les années 1995 à 1999 couvriront des domaines aussi divers que le renforcement de la coopération internationale, l'adoption de mesures en faveur de la biodiversité et l'intensification de la lutte contre la pollution de l'air
[1].
Conscientes des limites désormais atteintes par les moyens traditionnels auxquels l'Etat a jusqu'ici eu recours en matière de protection de l'environnement (subventions et prescriptions), les autorités fédérales ont exposé début avril la
nouvelle philosophie sur laquelle se fondera à l'avenir la politique environnementale helvétique. Basée sur la généralisation du principe du pollueur-payeur ainsi que sur le recours accru aux mesures volontaires et à la coopération avec les instances cantonales et les milieux économiques, cette véritable réorientation de l'action menée par la Confédération dans ce domaine fera la part belle aux
taxes d'incitation dont les premières seront introduites dès le 1er juillet 1997, date de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur la protection de l'environnement (LPE). Face à ce changement de cap de la politique environnementale suisse, les organisations écologistes ont émis certains doutes quant à la volonté des autorités fédérales de poursuivre une action déterminée en la matière. Elles ont d'ailleurs fait part de leur point de vue dans le cadre d'une rencontre fin août avec la cheffe du DFI au cours de laquelle elles ont revendiqué l'adoption de mesures concrètes lors de la fixation des ordonnances d'application de la LPE. Le document que l'OFEFP a transmis fin octobre aux organisations de protection de l'environnement pour les informer des mesures que le Conseil fédéral entendait prendre à ce titre n'a pas été de nature à apaiser leurs craintes, puisque celles-ci les ont jugées insuffisantes
[2].
Une enquête pilote menée par l'Office fédéral de la statistique (OFS) auprès de la Confédération, de sept cantons, de 141 communes et de 2200 entreprises privées a évalué à quelque 6 milliards de francs le montant des
dépenses auxquelles la Suisse a consenti durant les années 1992/1993
pour la préservation de son environnement. Sur l'ensemble de cette somme, 2,2 milliards de francs (soit 37% du total) ont été supportés par le secteur privé. Les pouvoirs publics ont investi pour leur part près de 2,1 milliards de francs (34%), dont 846 millions ont été assumés par les cantons, 765 millions par les communes et 461 millions par la Confédération. Quant au solde - soit 1,7 milliard - il a été pris en charge par les ménages à raison de 1,5 milliard de francs, l'agriculture ayant couvert les 200 millions restants. Sur la base de ces résultats, l'étude de l'OFS est parvenue à la conclusion que les dépenses environnementales de la Suisse sont comparables à celles des autres pays européens
[3].
Le Conseil national a décidé de ne pas donner suite à une initiative parlementaire Misteli (pe, SO) qui demandait que soit inscrit dans la Constitution le principe selon lequel la Confédération conforme l'ensemble de son action au précepte du développement durable. En choisissant de ne pas satisfaire la requête de la députée écologiste soleuroise, les membres de la Chambre du peuple ont ainsi suivi les considérations de la majorité de la Commission des institutions politiques qui a estimé que s'il était envisageable d'introduire ce principe dans la législation suisse, encore fallait-il examiner l'opportunité de le voir figurer dans la loi fondamentale.
Commanditée par les sept plus importantes organisations nationales de protection de l'environnement et d'entraide en vue de relancer le débat sur le développement durable en Suisse, l'étude "
Au-dessus de nos moyens - chiffres et objectifs pour une Suisse durable" est parvenue à la conclusion que pour que ce principe autour duquel le Sommet de la Terre de Rio s'était cristallisé soit traduit dans les faits, la population helvétique devrait réduire entre trois et huit fois sa consommation en énergie, en eau ainsi qu'en matières premières. Forts de ce constat, les mandataires de l'expertise ont préconisé des changements radicaux dans les habitudes de consommation des Suisses. Parmi les réductions les plus significatives auxquelles il serait nécessaire de consentir pour parvenir à l'établissement d'une société écologiquement viable à long terme, l'étude a évalué que la consommation d'énergies fossiles devrait être réduite de 23% d'ici à l'an 2010 et de 74% d'ici à 2050. Souhaitant que pareille réflexion sur le développement durable se prolonge au-delà de la simple publication de cette expertise, la Ligue suisse pour la protection de la nature a cherché à nouer le dialogue avec des personnalités des mondes politique, économique et scientifique en organisant à cet effet plusieurs rondes de discussion
[5].
La Chambre basse a transmis un postulat Eymann (pl, BS) invitant le gouvernement à reconduire le
crédit-cadre de 300 millions de francs qui avait été octroyé à l'occasion du 700e anniversaire de la Confédération pour le financement de projets en faveur de l'environnement mondial
[6].
Afin d'améliorer la collecte et le traitement des
données relatives à l'environnement, le Conseil fédéral a décidé de mettre sur pied un nouvel organe (Ikub) chargé de coordonner la récolte des observations faites dans ce domaine et de les harmoniser avec celles des autres pays européens
[7].
Après que le Conseil national eut approuvé fin 1995 la
Convention de la CEE-ONU
sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, la Chambre haute s'est à son tour penchée sur cet accord et a décidé à l'unanimité d'habiliter le gouvernement à le ratifier. Les sénateurs ayant toutefois apporté une modification d'importance mineure à l'arrêté fédéral autorisant la ratification, cet objet a nécessité une procédure d'élimination des divergences entre les deux Chambres au terme de laquelle le National s'est rallié à la formulation retenue par le Conseil des Etats
[8].
Le conseiller fédéral Flavio Cotti a participé, début octobre, au lancement d'une campagne de sensibilisation d'envergure mondiale menée par le WWF. Lors d'un discours retransmis par satellite dans une trentaine de pays, le chef du DFAE a rappelé l'attachement que porte la Suisse au principe de développement durable. Parrainée par le prince Philipp et le vice-président américain Al Gore, l'action du
WWF intitulée
"Planète vivante" a pour objectif d'enrayer la logique purement économique induite par la mondialisation en appelant les milieux économiques internationaux à contribuer à la préservation de l'ensemble de l'écosystème
[9].
Le Conseil fédéral a pris acte du
rapport sur le développement durable en Suisse que le Comité interdépartemental pour le suivi de Rio (CI-Rio) lui avait transmis à la fin de l'année 1995 avec un retard de plus d'une année et demie sur le calendrier fixé initialement. En raison des difficultés à obtenir un consensus autour de ce concept et de ses implications pratiques, les ambitions du rapport ont été revues à la baisse, puisque loin de dresser un catalogue de mesures précises permettant la concrétisation à l'échelon national des objectifs établis dans l'"Agenda 21", ce document se contente de définir des lignes directrices en matière de développement durable. Parmi celles-ci figure notamment la nécessité d'appréhender conjointement les problèmes environnementaux, économiques et sociaux dont l'interdépendance appelle des solutions ne privilégiant aucune de ces dimensions au détriment des deux autres. Au titre des mesures concrètes capables de parvenir à un développement durable en Suisse, le rapport reconnaît par ailleurs le bien-fondé des instruments d'action conformes à l'économie de marché (tels que les taxes d'incitation), davantage en adéquation avec le contexte socio-économique actuel que les prescriptions étatiques. A la publication de ce document, les organisations de protection de l'environnement ont estimé qu'au vu du faible degré de contrainte qu'il consacrait, le comité interdépartemental n'avait pas rempli son mandat. Il est néanmoins à relever que le Conseil fédéral a chargé le CI-Rio d'élaborer d'ici à 1997 un véritable
plan d'action comprenant non seulement les objectifs à atteindre, mais également les mesures, les moyens financiers et les délais nécessaires à leur réalisation
[10].
La deuxième Conférence des Etats parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les
changements climatiques s'est déroulée à Genève dans le courant du mois de juillet. Après avoir réuni pendant plus d'une semaine les experts internationaux de quelque 150 pays qui se sont penchés sur le problème du réchauffement planétaire provoqué par les gaz à effet de serre, la rencontre s'est poursuivie à l'échelon ministériel. A cette occasion, les porte-parole de plusieurs pays industrialisés ont officiellement apporté leur soutien au second rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (IPCC) qui établit pour la première fois l'existence d'un lien entre les changements climatiques et l'activité humaine. Sur la base de cette constatation, de nombreux intervenants se sont déclarés en faveur de mesures supplémentaires afin que la lutte contre le réchauffement climatique puisse être renforcée. Néanmoins, ces déclarations d'intention en faveur d'une diminution des gaz à effet de serre après l'an 2000 ont continué à se heurter à de nombreuses réserves, voire à des oppositions, dont les principaux auteurs furent les pays producteurs de pétrole ainsi que la Chine et la Russie. Conséquence directe de ces multiples résistances, la déclaration ministérielle par laquelle s'est clos la conférence a été publiquement rejetée par quatorze Etats, pour la plupart producteurs de pétrole. Selon ce texte, les pays industrialisés s'engagent à négocier des réductions contraignantes et significatives des émissions de gaz à effet de serre pour le siècle prochain, sans pour autant préciser les buts à atteindre. Les nouveaux engagements devront être précisés d'ici à la 3e Conférence sur le climat qui aura lieu en 1997 à Tokyo.
Côté helvétique, la réunion de Genève sur les changements climatiques aura permis tant à la conseillère fédérale Ruth Dreifuss qu'à Philippe Roch, directeur de l'OFEFP, de confirmer le rôle pilote joué par la Confédération dans ce domaine, puisque tous deux ont affirmé que la Suisse sera sans doute en mesure de stabiliser ses émissions de gaz carbonique en l'an 2000 à leur niveau de 1990. Il est à relever qu'à l'heure où se déroulait la conférence, les autorités fédérales n'avaient pas encore fixé les objectifs à atteindre pour le siècle prochain. Cette lacune devait cependant être comblée dès la fin octobre avec la mise en consultation d'un projet de loi sur la réduction des émissions de CO2 prévoyant une diminution de 10% de celles-ci pour l'an 2010 (cf. supra, part. I, 6a (Politique énergétique)
[11].
Transmis par le Conseil national quelques temps après l'avènement des catastrophes écologiques de Tchernobyl et de Schweizerhalle, le postulat Ott (ps, BL) a inspiré la rédaction d'un
rapport
gouvernemental sur l'opportunité de réviser le Code pénal (CP) afin que soit renforcée la protection de l'environnement. Bien que ce document propose aux Chambres de classer la requête de l'ancien député socialiste, le Conseil fédéral a néanmoins souhaité que certaines questions soulevées par une étude des professeurs Kunz et Jenny de l'Université de Berne soient traitées lors de la révision de la partie générale du CP qui est prévue pour 1997. Parmi ces questions figure notamment la nécessité de rendre davantage transparentes les dispositions pénales en matière d'environnement en les regroupant dans le Code pénal. L'introduction de nouvelles normes pénales relatives à la protection de l'environnement a pour sa part été subordonnée à la résolution préalable des problèmes liés à la création d'une responsabilité pénale des entreprises. C'est par 65 voix contre 34 que la Chambre basse a décidé de prendre acte du rapport du gouvernement
[12].
[1]
FF, 1996, II, p. 289 ss.1
[2] Presse du 2.4.1996;
SHZ, 4.4.96;
JdG, 7.6.96;
TW, 4.9 et 24.12.96. Voir aussi
APS 1995, p. 204 s.2
[5] Presse du 24.1.96;
TW, 29.5.96.5
[6]
BO CN, 1996, p. 1861.6
[8]
BO CE, 1996, p. 59 ss.;
BO CN, 1996, p. 945 s. Cf. aussi
APS 1995, p. 202.8
[10]
Bund, 27.1 et 27.2.96; presse du 29.2.96. Voir également
APS 1995, p. 203.10
[11]
TA, 8.7 et 17.7.96; presse des 9.7, 18.7 et 19.7.96;
NQ, 17.7.96. Cf. également
APS 1995, p. 203 s.11
[12]
BO CN, 1996, p. 1326 s.;
SGT, 8.8.96; presse du 17.9.96.12
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