Année politique Suisse 1997 : Infrastruktur und Lebensraum / Verkehr und Kommunikation / Chemins de fer
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NLFA et autres infrastructures ferroviaires
S'étant saisie, en début d'année, du projet relatif à la réalisation et au financement des grandes infrastructures ferroviaires (NLFA, Rail 2000, raccordement de la Suisse occidentale au réseau grande vitesse, lutte anti-bruit), la commission des transports et des télécommunications (CTT) du Conseil national a proposé une approche radicalement différente de celle suivie jusqu'alors tant par le Conseil fédéral que par le Conseil des Etats: craignant un enlisement définitif du projet, la CTT a en effet suggéré de séparer désormais la question du financement de celle de la réalisation des différents ouvrages: plus précisément, selon la proposition de la commission, seules les différentes sources de financement devraient figurer dans l'article constitutionnel soumis à l'approbation du peuple et des cantons, les éléments relatifs à la réalisation des différents projets devant être réglés à travers des arrêtés fédéraux soumis au référendum facultatif. De l'avis de la CTT, seule une telle approche pouvait garantir que l'article constitutionnel obtienne l'approbation du peuple et des cantons: ne comprenant pas la question hautement controversée de savoir quelle NLFA construire en premier, un article exclusivement centré sur la question du financement permettrait d'éviter que la polémique sur la priorité et les tracés des deux NLFA n'empêche de se doter de la base constitutionnelle indispensable. En outre, traiter des projets au niveau législatif devrait permettre une plus grande souplesse dans le futur au cas où les projets nécessiteraient d'être modifiés pour une raison ou pour une autre.
Sur les questions proprement dites du mode de financement et de l'échelonnement ou non des travaux dans le dossier des NLFA, la commission du Conseil national a également proposé des modifications par rapport à ce qui avait été décidé en 1996 par le Conseil des Etats. En ce qui concerne le financement, la CTT a proposé de recourir uniquement à titre subsidiaire - c'est-à-dire uniquement en cas de besoin - à une augmentation du prix de l'essence. Craignant que cette mesure touchant très lourdement les automobilistes ne fasse capoter en votation l'ensemble du projet, la commission a en outre décidé de limiter l'éventuelle hausse à 5 centimes par litre. Sur les autres sources de financement prévues - à savoir la taxe poids lourd (actuelle et future), la taxe alpine, le prélèvement sur les revenus des droits d'entrée sur les carburants et l'emprunt - la commission a en revanche adhéré au projet adopté par le Conseil des Etats l'an dernier. A la différence de la petite chambre, elle a néanmoins tenu à ce que les diverses ponctions fiscales puissent être opérées tant que les travaux ne seraient pas achevés, et non pas uniquement jusqu'en 2022 au plus tard, ce afin d'offrir la garantie que même en cas de construction échelonnée des deux NLFA, les ressources n'auront pas été épuisées par la construction du premier axe [38].
En ce qui concerne la question des projets proprement dits (arrêté sur le transit alpin), les modifications de la commission furent encore plus importantes. Alors que le projet adopté par la chambre des cantons prévoyait la construction simultanée des deux transversales ainsi que des voies d'accès, la CTT a en effet proposé un échelonnement en trois étapes des travaux. Dans un premier temps (1999), seuls les percements du tunnel du Lötschberg et, sur la ligne du Gothard, de ceux annexes du Zimmerberg (ZH/ZG) et du Monte Ceneri (TI) pourraient débuter. Lors d'une seconde étape uniquement (autour de 2001), le tunnel de base du Gothard - entre Erstfeld (UR) et Bodio (TI) - serait pour sa part construit. Enfin, dans un troisième temps (indéterminé), les voies d'accès seraient réalisées. Justifiant la priorité accordée au Lötschberg, la commission des transports a relevé qu'une donnée fondamentale avait été à l'origine de sa décision: à savoir l'ampleur, jusque là sous-estimée par les ingénieurs, des difficultés géologiques que rencontrera le percement du tunnel de base du Gothard sur une partie du tracé [39]. Selon la commission, ce changement fondamental de circonstances obligeait à différer le lancement des travaux afin de pouvoir débuter en possession de toutes les informations et techniques nécessaires sur la manière d'affronter le tronçon délicat. Tenant à rassurer les cantons de Suisse centrale et du Tessin, la commission a relevé que son projet ne signifiait nullement l'abandon du Gothard, le financement de ce dernier étant garanti par l'article constitutionnel parallèlement présenté. Elle a également relevé que son projet d'arrêté fédéral mentionnait que la décision de débuter les travaux sur l'axe du Gothard ne serait pas soumise au référendum facultatif, un arrêté simple de la part du parlement suffisant [40].
Lors de sa session d'été, le Conseil national s'est penché sur les propositions de sa commission. Acceptant le principe de séparer la question du financement de celle des projets proprement dits ainsi que rejetant les propositions de l'UDC de renvoyer l'ensemble du projet au gouvernement, voire même de ne pas entrer en matière, la grande chambre n'en a pas moins apporté des modifications d'importance aux textes qui lui étaient soumis [41].
En ce qui concerne l'article constitutionnel sur le financement, de multiples propositions sur les diverses sources possibles furent discutées. Parmi celles-ci, une proposition Cavadini (prd, TI) de se passer de la taxe alpine fut adoptée par la chambre du peuple, les représentants tessinois parvenant à convaincre leurs pairs que cette taxe, de peu d'importance pour le financement des différentes infrastructures (50 millions), pénaliserait de manière inacceptable leur canton. Outre cette modification, les conseillers nationaux ont encore décidé, sur proposition d'une minorité de droite de la CTT et avec l'acquiescement tacite du ministre des transports, de remplacer l'éventuelle hausse du prix de l'essence par une hausse de 0,1% de la TVA. A l'opposé de l'opinion exprimée par les socialistes et les verts qui estimaient justifié de faire peser sur les usagers de la route le financement d'ouvrages destinés à diminuer les nuisances du trafic routier, la majorité bourgeoise du National a en effet été de l'avis qu'il était équitable de solliciter, pour des projets d'envergure nationale, des couches plus larges de la population, ajoutant que l'impact moins perceptible d'une hausse de la TVA sur le porte-monnaie des citoyens faciliterait le succès du projet en votation populaire. La chambre du peuple a par ailleurs également adopté une proposition Ratti (pdc, TI) visant à permettre la participation de capitaux privés au financement des différentes infrastructures, certains députés ainsi que le chef du DFTCE exprimant cependant leur scepticisme face aux résultats obtenus sous d'autres cieux (Eurotunnel) par ce genre de solution [42].
Sur les autres sources de financement prévues par la CTT - taxe poids lourd, recours à l'emprunt, droits d'entrée sur les carburants -, la grande chambre n'a en revanche pas suivi ceux qui désiraient apporter des modifications ou suggérer de nouvelles sources de financement. Ainsi, concernant notamment la redevance poids lourd, les députés ont largement rejeté une proposition Giezendanner (udc, AG) de soumettre la perception de cette taxe à l'exigence que celle-ci soit acceptée par l'UE. Les conseillers nationaux ont également rejeté une proposition Binder (udc, ZH) de prélever une redevance sur le trafic ferroviaire de marchandises et de personnes, les parlementaires arguant, de concert avec le ministre des transports, que cette solution avait été précédemment abandonnée suites aux échos négatifs rencontrés lors de la procédure de consultation. Enfin, les députés ont également suivi la commission sur la question de la durée des différents prélèvements, estimant judicieux que ceux-ci puissent être opérés tant que les travaux ne seraient pas achevés.
Concernant l'arrêté sur le transit alpin, la grande chambre eut à examiner un nombre encore plus élevé de propositions. En effet, outre le projet de la CTT, pas moins de 14 variantes, défendant chacune des combinaisons différentes, furent soumises à l'aval des députés. Parmi celles-ci, certaines, à l'instar de celle du Tessinois Carrobio (ps), proposaient de construire simultanément les deux tunnels de base, renvoyant à plus tard la construction des voies d'accès et des galeries du Zimmerberg et du Monte Ceneri. D'autres, au contraire, tranchaient clairement en faveur de l'un ou l'autre axe, à l'instar de celle de l'Argovien Giezendanner (udc) qui proposait de construire en premier lieu la transversale du Lötschberg et soumettait la construction du Gothard à une clause du besoin ou de celles prônant une solution inverse et défendues par une coalition hétéroclite de radicaux alémaniques, d'écologistes, d'indépendants et de députés UDC. D'autres encore, à l'instar d'une proposition libérale, visaient à ne construire qu'un seul axe, laissant le soin au gouvernement de décider en connaissance de cause. D'autres enfin, telles celles des députés Bezzola (prd, GR) et Ratti (pdc, TI), reconnaissaient certes l'égale nécessité des deux axes, mais ne voulaient cependant pas que le parlement en arrête d'ores et déjà les différentes étapes, préférant que cette question soit tranchée, en possession des connaissances adéquates, au fur et à mesure de l'avancée des travaux (principe de la planification permanente).
Au terme d'une procédure de vote en cascade exceptionnellement longue, une assez nette majorité de conseillers nationaux - conglomérat hétéroclite de députés provenant des différents groupes présents au Conseil national - a finalement opté pour la variante défendue par la commission. A titre de principaux arguments avancés en faveur de cette décision, de nombreux représentants ont relevé que les problèmes géologiques rencontrés sur l'axe du Gothard ainsi que la nécessité de pouvoir disposer d'une ligne ferroviaire à travers les Alpes dans les délais prévus par l'accord sur le transit désignaient clairement le Lötschberg comme l'axe qui devait être construit en premier. Soutenant également la solution prônée par la commission, le chef du DFTEC, M. Leuenberger a pour sa part tenu à souligner que le plan arrêté ne devait pas être perçu comme visant à défendre les intérêts d'une région au détriment d'une autre, mais uniquement comme une décision que les réalités techniques imposaient momentanément [43].
De retour six mois plus tard au Conseil des Etats, le dossier connut de nouveaux rebondissements d'importance. Concernant le mode de financement, les sénateurs suivirent leurs pairs du Conseil national au sujet de la taxe alpine (suppression), de la TVA (hausse 0.1%) ainsi qu'au sujet de la possibilité de financer les travaux par des capitaux privés. En revanche, estimant qu'au total les différentes taxes du projet de la grande chambre ne suffiraient pas à alimenter les fonds nécessaires à la réalisation des différents projets, les sénateurs décidèrent, sur proposition de la CTT, d'autoriser l'exécutif à augmenter de 5 centimes le prix de l'essence. Passant outre ceux qui, comme la zurichoise Spoerry (prd), estimaient que la hausse de la TVA (produit: 200 millions) compensait l'abandon de la hausse du prix de l'essence, une large majorité des sénateurs, appuyée par M. Leuenberger, a en effet relevé que la hausse du prix de l'essence étant initialement de 10 centimes dans le projet du gouvernement (produit: 600 millions), le pour mille additionnel de TVA ne suffisait pas pour renoncer à une augmentation du prix à la colonne.
Concernant l'arrêté sur le transit alpin, les modifications furent encore plus spectaculaires. Alors que le projet du Conseil national donnait la priorité au Lötschberg, la chambre des cantons décida, sur proposition de la CTT et avec l'appui du ministre des transports, de rétablir une égalité de traitement entre les deux axes. Plus exactement, les sénateurs ont donné leur préférence à un plan qui prévoit, dans un premier temps, la construction simultanée des deux tunnels de base, puis, dans une seconde étape, celle des galeries du Zimmerberg et du Monte Ceneri, la réalisation des voies d'accès intervenant dans une troisième phase [44]. A titre de justification du revirement opéré, les conseillers aux Etats invoquèrent les derniers résultats des sondages effectués sur l'axe du Gothard. Alors qu'en début d'année, les ingénieurs étaient très pessimistes sur la nature de la roche d'une partie du tracé, les échantillons extraits au début de l'automne laissaient en revanche augurer un percement sans difficultés extraordinaires. Il fut également souligné que seule la construction simultanée des deux tunnels de base permettait d'envisager la votation populaire avec une certaine sérénité. Seuls opposants au plan adopté, les sénateurs de la Suisse orientale et centrale - de l'avis que le peuple jugerait pharaonique un projet comprenant simultanément deux transversales - tentèrent en vain de faire approuver la construction en premier du tunnel de base du Gothard [45].
Outre l'examen de la question du financement et de l'échelonnement ou non des deux NLFA, le parlement avait encore à examiner deux messages présentés l'an dernier par le gouvernement, l'un relatif à la libération de l'ensemble du crédit destiné aux travaux préparatoires au Gothard et au Lötschberg, l'autre ayant trait à une convention bilatérale avec l'Allemagne visant à optimaliser l'utilisation des futures transversales. Sur le premier objet, les deux chambres n'ont suivi que partiellement l'exécutif. Alors que ce dernier désirait pouvoir utiliser pleinement le solde du crédit encore bloqué - quelque 645 millions de francs -, le Conseil national, puis à son tour le Conseil des Etats, ont en effet décidé, sur proposition de leur commission respective, de ne libérer que 225 millions. Les députés ont estimé qu'il fallait se limiter à des investigations relatives à l'évaluation des difficultés techniques et géologiques des tracés afin d'éviter de donner l'impression aux citoyens de pratiquer la politique du fait accompli par l'engagement de crédits trop importants. En ce qui concerne l'arrêté fédéral relatif à la convention avec l'Allemagne, le Conseil des Etats - le Conseil national n'a pu traiter cet objet pendant l'année sous revue - a adopté à l'unanimité le projet qui lui était soumis. Sur proposition du Thurgovien Onken (ps), les sénateurs ont cependant tenu à souligner que les lignes Munich-St-Gall-Zurich et Stuttgart-Schaffhouse-Zurich devaient être également développées parallèlement à l'axe Karlsruhe-Offenbourg-Bâle, ce afin de ne pas isoler la Suisse orientale du réseau ferroviaire européen [46].
Le Conseil fédéral a pour sa part publié un message concernant les modalités de financement des grands travaux ferroviaires. Alors que le projet d'article constitutionnel présenté en 1996 prévoyait un financement spécial temporaire intégré au compte financier de la Confédération, le gouvernement a décidé, sur pression du parlement, d'opter pour la solution d'un fonds spécial juridiquement dépendant doté de sa propre comptabilité. Ce dernier sera alimenté par les différentes recettes prévues par le projet d'article constitutionnel ainsi que par les avances que devra faire la Confédération durant les pics d'investissement. Le parlement décidera chaque année des prélèvements nécessaires à opérer sur le fonds. Selon le Conseil fédéral, la solution du fonds a l'avantage de soumettre à l'approbation du législatif non seulement le financement provenant des différents impôts, mais également les avances que devra faire la Confédération. Ceci n'était pas le cas dans l'ancien système puisque les importants montants avancés (au total jusqu'à 4,2 millions) n'étaient pas comptabilisés dans le budget de la Confédération, mais étaient directement capitalisés au bilan [47].
 
[38] JdG, 23.1.97; NZZ, 25.1.97; BaZ, 5.2.97; presse du 20.2.97. Voir également APS 1996, p. 184 ss.38
[39] Au sujet des problèmes géologiques rencontrés sur l'axe du Gothard, voir presse des 7.4, 9.4 et 10.4.97.39
[40] Presse des 9.5 et 21.5.97. Il est cependant à relever qu'une première mouture du projet de la CTT prévoyait de ne construire la galerie de base du Gothard qu'en cas de besoin. Devant le tollé soulevé par cette proposition parmi les cantons de Suisse centrale et du Tessin - déjà fort mécontents de la décision de reporter le début des travaux au Gothard - la CTT a modifié sa copie. En ce qui concerne les autres infrastructures ferroviaires (raccordement TGV, Rail 2000, lutte antibruit), aucun projet d'arrêté fédéral n'a été présenté par la commission, ces différents objets n'étant qu'à un stade très peu avancé d'élaboration.40
[41] Il est à relever que peu avant, lors de la première semaine de la session d'été, le CN avait également rejeté une motion d'ordre du groupe libéral demandant que le traitement du dossier soit renvoyé à la session d'octobre. Il a en outre décidé de ne pas donner suite à une initiative du groupe PdL qui demandait, purement et simplement, d'abroger l'arrêté fédéral sur le transit alpin: BO CN, 1997, p. 1058 ss. (PL) et p. 1388 ss. (PdL).41
[42] Le CN a confirmé son vote sur la question du financement mixte puisqu'il a transmis comme postulat une motion du même député: BO CN, 1997, p. 1478 ss.42
[43] BO CN, 1997, p. 1286 ss.; presse des 19.6 et 20.6.97. Seule concession faite aux partisans du Gothard, une proposition Comby (prd, VS) attribuant au gouvernement, et non plus au parlement, la compétence de décider du début des travaux sur l'axe du Gothard fut adoptée par les députés. Plus farouches opposants de l'arrêté adopté, les députés tessinois n'ont pas manqué de relever que cette modification ne constituait en rien une garantie que le tunnel de base du Gothard serait percé, le parlement conservant toujours la compétence de refuser les crédits d'engagement nécessaires au financement des travaux.43
[44] Relevons encore que la mouture adoptée par le CE laisse également au CF le soin de décider du début des travaux de la seconde étape. Le projet cher aux sénateurs prévoit en outre une amélioration du raccordement de la Suisse orientale à l'axe du Gothard. 44
[45] BO CE, 1997, p. 1138 ss.; presse des 25.10 et 10.12.97. Concernant les sondages géologiques opérés au Gothard, voir presse des 18.9 et 21.10.97. Au sujet de l'activité de lobbying des partisans du Gothard, voir presse des 12.7, 13.9 et 4.10.97. Il est par ailleurs à relever que la région lombarde a clairement fait part, pendant l'été, de son soutien à l'axe du Gothard: CdT, 8.7.97; NQ, 16.7.97; presse du 28.7.97.45
[46] BO CN, 1997, p. 1381 s.; BO CE, 1997, p. 859 ss. (crédit NLFA) et p. 1236 ss. (convention); FF, 1997, IV, p. 761 ss. Voir également APS 1996, p. 187 s. Une motion Onken (ps, TG) et une motion Rechsteiner (ps, SG) au contenu similaire à l'adjonction apportée à la convention ont par ailleurs été transmises comme postulat respectivement par le CE et le CN: BO CE, 1997, p. 1249 ss.; BO CN, 1997, p. 535.46
[47] FF, 1998, p. 261 ss.47