Année politique Suisse 1999 : Wirtschaft / Landwirtschaft
Production animale
Etape marquante de la nouvelle politique agricole 2002, la
libéralisation du marché laitier au 1er mai de cette année a engendré immédiatement une baisse des prix payés aux producteurs de quelque dix centimes par kilo de lait. Désormais, le prix-cible (donc non-garanti) se situe à 0,77 franc, avec toutefois une variation de quelques centimes selon qu’il s’agit de lait destiné à la consommation immédiate ou à la fromagerie. Les grands distributeurs ont répercuté la baisse sur les consommateurs dans une fourchette comprise entre 10 et 15 centimes par litre de lait. Le passage à la nouvelle organisation du marché du lait n’a en fin de compte pas causé les répercussions immédiates appréhendées. Notamment, la crainte des producteurs de voir le prix-cible non-atteint s’est révélée erronée
[24].
Créée sous forme d’une coopérative en 1914,
l’Union suisse du fromage (USF) a voté sa dissolution au début de l’année. Depuis 1969, cette institution était devenue semi-étatique et se chargeait d’acheter à prix fixes toute la production de sbrinz, d’emmental et de gruyère pour l’écouler selon les possibilités du marché. Concrètement, c’était la Confédération qui épongeait ses déficits chroniques (309 millions en 1998). Avec la libéralisation de l’agriculture, l’USF n’avait plus de raison d’être et ce sont les interprofessions qui ont pris le relais à partir du 1er mai. Cent cinquante collaborateurs ont perdu leur emploi. La gestion du contingentement laitier et du prix du lait sont désormais fixés par le marché et les principaux acheteurs. La « Butyra », qui remplissait pour le marché du beurre un rôle identique, a également été dissoute. C’est désormais l’Organisation sectorielle du beurre qui devra gérer la production et l’écoulement en fonction du marché
[25].
L’Union centrale suisse des producteurs de lait (UCPL) s’est réorganisée et a changé de nom pour devenir la
Fédération des coopératives de producteurs suisses de lait (PSL). A l’avenir, elle devrait se concentrer sur des tâches syndicales. Afin d’affronter la libéralisation, elle a notamment constitué un fonds de soutien de 27 millions de francs pour éviter l’effondrement des prix tout en consolidant la production
[26].
Le spectre de l’entrée en vigueur de la « Politique agricole 2002 » a généré chez les producteurs un certain nombre de craintes largement exprimées au parlement. Combattue par la députée socialiste Fässler (SG), la discussion sur une motion Kunz (udc, LU) a été renvoyée. Ce dernier demandait que le Conseil fédéral renonce à exiger le remboursement des
contributions aux investissements accordées à l’économie fromagère, lorsque celles-ci permettent de réaliser des améliorations structurelles et de maintenir une exploitation répondant aux intérêts du secteur laitier. Le Conseil fédéral a précisé que 350 fromageries étaient touchées par ces mesures dont 194 fabricants d’Emmental et 102 de Gruyère et qu’il attendait les effets de l’introduction des nouvelles règles sur le marché du lait pour infléchir sa politique de remboursement le cas échéant
[27].
Sur le même sujet, le Conseil national a transmis un postulat Eberhard (pdc, SZ) afin d’attirer l’attention du Conseil fédéral sur les problèmes structurels dans les
fromageries artisanales. Le texte demande qu’un régime de nature à atténuer les charges soit mis en place, notamment par le biais de mesures de désendettement et par un assouplissement des demandes de remboursement de la Confédération
[28].
Une nouvelle affaire de
lait au noir s’est terminée devant le Tribunal dans le canton de Vaud. Vingt-neuf agriculteurs ont été condamnés pour avoir transféré des contingents laitiers dans le but de dissimuler une surproduction. Au total, 252 350 kilos de lait excédentaires ont été écoulés illégalement
[29].
Les 497 vaches acheminées au Kosovo dans le cadre de l’aide humanitaire de la Suisse ont constitué la totalité des
exportations helvétiques de bovins en 1999. L’année précédente, seuls 3 bovidés avaient été exportés, alors qu’avant la crise de la vache folle, la Suisse exportait bon an mal an 10 000 à 15 000 têtes de bétail
[30].
Le
marché de la viande bovine en Suisse est en légère reprise mais demeure globalement saturé avec une consommation de viande indigène avoisinant les 95%. La Coopérative suisse d’approvisionnement en bétail de boucherie et en viande (CBV) a dégagé 1300 tonnes pour les faire parvenir comme aide humanitaire en Corée du Nord. Prônant une réduction de la production afin de diminuer les stocks, la CBV a dit appréhender le versement de nouvelles contributions qui pourraient inciter les paysans à produire encore davantage de viande de bœuf. Depuis 1996 et le début de la crise, la Confédération a dû soutenir le marchéà raison d’une somme de 106 millions. Pour la première fois, le prix de la viande de bœuf est également remonté lors de l’année sous revue
[31].
La
demande en dommages et intérêts déposée en 1997 contre la Confédération par 2206 agriculteurs suisses a été rejetée, a confirmé le Conseil fédéral suite à une interpellation Dupraz (prd, GE). Autorité compétente en la matière, le Département fédéral des finances (DFF) a considéré que la Confédération n’avait commis aucun acte illicite engageant sa responsabilité dans le dossier de l’encéphalite spongiforme bovine (ESB ou
maladie de la vache folle). Les producteurs estimaient que la prise de décisions très tardives avaient largement contribué à l’effondrement du marché en Suisse. Un recours administratif devant le Tribunal fédéral a finalement été déposé par l’UPS et AGORA au nom des agriculteurs
[32].
Les autorités fédérales ont annoncé qu’elles n’ouvriront pas les frontières au
bœuf anglais - malgré sa réhabilitation au plan européen - tant qu’une solution globale avec l’UE n’aura pas été trouvée. Une quarantaine de pays à travers le monde (neuf de l’UE) ont décrété un boycott sur le bœuf suisse. A la fin de l’année, la Commission européenne a proposé de classer la Suisse comme un pays à faible incidence en matière d’ESB, contrairement au Portugal ou à l’Angleterre. Cette mesure pourrait permettre à la Suisse de reprendre ses exportations rapidement, mais elle est conditionnée au préalable au feu vert des experts des Quinze. Néanmoins, la décision européenne de prolonger l’
embargo frappant le Portugal a tempéré cette décision. Certains ne voient pas les Quinze effectuer un geste en faveur de la Confédération aussi longtemps que l’un des leurs est sous le coup d’un embargo
[33].
Lors de l’année sous revue,
49 cas de vache folle ont été mis à jour en Suisse (14 en 1998). Cette augmentation est due pour moitié à une nouvelle méthode de dépistage qui concerne également les animaux sains porteurs du prion. En effet, un chercheur suisse a mis au point un test de dépistage rapide qui permet de déceler la maladie à un stade relativement précoce. L’OFV a décidé d’appliquer cette méthode de détection à quelques 13 500 vaches et la Commission européenne a également autorisé son utilisation dans l’UE. Selon l’OFV, l’origine de la contamination est la même pour les animaux nés après l’interdiction des farines animales que pour leurs prédécesseurs, à savoir l’affouragement contenant des composantes provenant d’animaux infectés. La Confédération a par ailleurs renoncé à porter devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) le boycott qu’elle subit. Le commerce de la viande de bœuf étant réglé par une multitude d’accords bilatéraux, les autorités fédérales ont estimé que la probabilité de voir une plainte aboutir face à une telle complexité était trop faible. L’Italie a toutefois décidé de permettre à nouveau l’importation, mais a maintenu l’embargo sur le bétail vivant. Afin d’assurer la « traçabilité » du bétail et des produits d’origine animale, la Confédération a également mis sur pied un nouveau système de contrôle du trafic des animaux. Sans les documents nécessaires, les bêtes ne seront plus commercialisables
[34].
Par le biais d’une motion Gysin (ps, BS) transmise sous forme d’un postulat par la chambre basse, le Conseil fédéral a été chargé d’encourager la mise sur pied d’un accord international sur le
contrôle des aliments pour animaux. Selon l’auteur du texte, l’élaboration de standards minimums de qualité au niveau international doit être réalisée de façon urgente afin de préserver la santé des animaux et des êtres humains. Le Conseil fédéral a annoncé qu’il était prêt à s’engager au sein des organisations internationales concernées pour l’introduction d’une convention sur le contrôle des aliments pour animaux. Il a également rappelé que dans le cadre des accord bilatéraux passés avec l’UE - qui est le plus grand partenaire commercial de la Suisse - il avait été attribué une haute importance à l’harmonisation des contrôles administratifs dans ce domaine. Un postulat Eberhard (pdc, SZ) demandant au gouvernement d’inscrire dans l’ordonnance concernée la séparation des abats comestibles et des déchets et de veiller à ce que les produits importés non conformes soient déclarés comme tels, a également été transmis par la chambre basse
[35].
La Suisse a interdit l’utilisation de
stimulateurs de performance dans la production animale. Après la Suède, elle est le deuxième pays d’Europe à prendre cette mesure. Concrètement, il n’est plus autorisé d’utiliser des antibiotiques ou des facteurs de croissance dans l’alimentation du bétail, sauf en cas de maladie, la déclaration étant alors obligatoire. Le surcoût de cette décision a été estimé à 5% par l’USP
[36].
[24] Presse du 1.5.99 (libéralisation);
24h, 10.7.99 et
Lib., 21.10.99 (crainte).24
[25]
24h, 9.1.99; presse du 16.1 et du 30.4.99. Voir aussi
APS 1998, p. 135 s.25
[27]
BO CN, 1999, p. 497 s.27
[28]
BO CN, 1999, p. 506 s.28
[31]
Lib., 6.2.99 (CBV);
24h, 22.10.99 (106 millions);
LT, 4.12.99 (concommation).31
[32]
BO CN, 1999, p. 1346 ss.;
24h, 17.2 et 17.3.99 (DFF et recours). Voir aussi
APS 1997, p. 139.32
[33]
24h, 9.7.99 (Portugal);
NZZ, 15.7.99 et
LT, 31.7.99 (bœuf anglais);
LT, 27.11.99 (faible incidence).33
[34]
TG, 4.1.99 (OMC);
NZZ, 6.3.99 (Italie);
24h, 23.2.99,
NZZ, 26.2.99 et
TG, 26.6.99 (Test);
QJ, 30.6.99 (traçabilité);
LT, 22.12.99 (statistiques 1999). Voir aussi
APS 1998, p. 136 s.34
[35]
BO CN, 1999, p. 2180 (Gysin) et 2673 (Eberhard).35
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