Année politique Suisse 2004 : Infrastruktur und Lebensraum / Energie / Energie nucléaire
Fort du rejet par le peuple des deux initiatives antinucléaires, les groupes électriques Atel, Axpo et FMB BKW ont annoncé leur volonté de réactiver l’option nucléaire en
construisant une nouvelle centrale en Suisse. Ils justifient cette nécessité par une constante augmentation de la consommation d’électricité en Suisse, alors que, d’ici à l’an 2020, la centrale de Mühleberg et les deux blocs de Beznau devront être arrêtés pour raison d’âge. Ces centrales produisant 13% de l’électricité utilisée dans le pays, les trois groupes électriques craignent un risque de pénurie électrique et une augmentation des importations. A ce propos, un groupe de travail a été créé par Axpo pour réfléchir à l’après-Beznau. A l’OFEN, un groupe d’étude a également été constitué avec un partenariat industriel, à l’enseigne de « Perspectives énergétiques ». Trois options sont à l’étude : la réduction de la demande grâce à des économies d’énergie, le remplacement des centrales nucléaires par d’autres moyens de production et le renouvellement des centrales nucléaires actuelles par des réacteurs de nouvelle génération. La droite est venue apporter son soutien aux groupes électriques, alors qu’à l’inverse les socialistes et les écologistes, ainsi que les organisations de protection de l’environnement ont critiqué cette option, lui préférant un investissement massif dans le développement d’énergies renouvelables. Le débat s’est aussi invité sur la scène politique bernoise. Le Grand Conseil bernois a désavoué la politique énergétique du gouvernement en décidant de renvoyer le rapport sur la stratégie énergétique du canton de Berne. Dans ce dernier, le Conseil d’Etat refuse, pour des raisons économiques et écologiques, la construction d’une nouvelle centrale nucléaire. L’exécutif bernois devra donc représenter un document qui n’écarte pas l’option de l’atome. Interpellé par la revendication des producteurs d’électricité, Moritz Leuenberger a indiqué qu’il était illégitime de penser à construire une nouvelle centrale, tant que la question des scories nucléaires n’était pas réglée. De plus, le conseiller fédéral donnait peu de chance de succès en cas de tenue du référendum obligatoire
[20].
Malgré les oppositions de Greenpeace, des autorités de Waldshut (D), du Land du Voralberg (A) et du gouvernement autrichien, le Conseil fédéral a accepté la demande la Nordostschweizerische Kraftwerke AG (NOK) visant à
supprimer la limite de la durée d’exploitation de la centrale nucléaire de Beznau II [21]. Sa décision se fonde sur l’expertise de la DSN et de la Commission fédérale pour la sécurité des installations nucléaires (CSA). Néanmoins, si la centrale ne répond pas ou plus aux conditions d’autorisation d’exploiter, elle peut à tout moment être arrêtée ou se voir retirer son autorisation pour des raisons de sécurité. Les critères de mise hors service ressortent de la nouvelle ordonnance sur l’énergie nucléaire (voir supra)
[22].
Afin de prévenir un manque de place, la société Kernkraftwerk Gösgen-Däniken AG a déposé une demande de construction et d’exploitation d’une
installation intermédiaire d’entreposage en piscine pour combustible usé d’une capacité de 1008 éléments combustibles usés. Celle-ci complétera le dépôt existant d’une capacité de 650 éléments combustibles usés
[23]. Le Conseil fédéral a octroyé à la centrale de
Gösgen ladite autorisation. Il s’est appuyé sur les avis de la DSN et la CSA pour juger que l’exploitation de la nouvelle installation d’entreposage était sans danger
[24].
Aucune opposition n’ayant été formulée lors de la consultation, le Conseil fédéral s’est prononcé en faveur de la demande déposée par la Société nationale pour l’encouragement de la technique atomique industrielle (SNA) en vue de
déclasser la parcelle 925 [25] sur le territoire de la commune de
Lucens (VD). Se basant sur l’expertise de la DSN, le Conseil fédéral est parvenu à la conclusion que les travaux de désaffectation nécessaires ont été réalisés et que les valeurs mesurées de rayonnement radioactif correspondent au rayonnement naturel
[26].
La centrale nucléaire de
Leibstadt (AG) a obtenu l’autorisation du Conseil fédéral de pouvoir prélever et
déverser de l’eau de refroidissement. Les autorités fédérales se sont basées sur la prise de position de l’OFEFP. Celle-ci conclut que le volume d’eau déversé est négligeable par rapport au débit du Rhin et ne représente aucune menace pour les poissons et le reste de la faune du fleuve. Etant presque échue, le gouvernement du canton d’Argovie a également délivré une nouvelle concession de captage des eaux à la centrale de Leibstadt
[27].
[20]
LT, 19.4 (groupes énergétiques), 15.11 (partis) et 17.11.04 (Berne);
Lib., 1.5.04 (groupes énergétiques);
CdT, 27.12.04 (Leuenberger). Voir également
APS 2003, p. 150 s.
[21] Les autorisations d’exploiter des centrales nucléaires de Beznau II et Mühleberg étaient limitées dans le temps depuis le départ. En revanche, les centrales de Beznau I, Gösgen et Leibstadt ont des autorisations d’exploiter illimitées dans le temps.
[22] Presse du 20.4.04;
24h, 17.7.04 (oppositions);
LT, 4.12.04; DETEC,
communiqué de presse, 3.12.04.
[23] Avec la nouvelle loi sur l’énergie nucléaire, les assemblages combustibles usés ne peuvent pas être exportés en vue de leur retraitement pendant une période de dix ans à compter du 1er juillet 2006. Sans le retraitement et sans la nouvelle installation, la société de Gösgen estime que la capacité du dépôt existant suffira jusqu’en 2008.
[24] DETEC,
communiqué de presse, 30.6.04.
[25] Suite à un accident en 1969, la centrale nucléaire expérimentale de Lucens avait dû être arrêtée. Une fois les travaux de désaffectation terminés, le CF avait décidé de déclasser une partie du site de l’ancienne installation. En revanche, il avait retenu que la parcelle 925, sur laquelle étaient encore entreposés des conteneurs renfermant divers déchets radioactifs, restait une installation nucléaire.
[26]
FF, 2004, p. 6757; presse du 20.4.04;
LT, 26.5.04; DETEC,
communiqué de presse, 3.12.04. Voir
APS 1995, p. 162.
[27] DETEC,
communiqué de presse, 3.12.04.
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