Année politique Suisse 2009 : Infrastruktur und Lebensraum / Erhaltung der Umwelt
 
Protection des eaux
Lors de la session spéciale d’avril, le Conseil national s’est saisi du projet de loi fédérale sur la protection des eaux élaboré par la commission de l’environnement du Conseil des Etats (CEATE-CE) au titre de contre-projet indirect à l’initiative populaire « Eaux vivantes (Initiative pour la renaturation) ». En dépit de l’opposition unanime de l’UDC et d’une majorité de députés libéraux-radicaux, jugeant le projet trop coûteux et dangereux pour l’utilisation de la force hydraulique, le plénum a suivi la majorité de la CEATE-CN et approuvé, par 94 voix contre 60, l’entrée en matière.
Lors de la discussion par article, le débat a essentiellement porté sur la conciliation des objectifs environnementaux et des intérêts économiques et énergétiques. Une minorité Killer (udc, AG) de la commission a proposé de réduire drastiquement les débits minimaux exigés de sorte à laisser une marge de manœuvre maximale aux producteurs d’énergie hydroélectrique. Le plénum a suivi, par 97 voix contre 73, la majorité de sa CEATE, laquelle jugeait que cet amendement viderait de sa substance le projet de loi. Le débat s’est ensuite concentré sur les dérogations possibles en faveur de l’utilisation de la force hydraulique. Afin de garantir un potentiel de croissance de 200 gigawattheures, le Conseil des Etats avait décidé d’assouplir les conditions de dérogation en autorisant des débits minimaux inférieurs pour les tronçons en aval d’installations hydroélectriques situées à une altitude supérieure à 1500 mètres (contre 1700 actuellement). Si la majorité de la CEATE-CN a suivi les sénateurs, une minorité Girod (pe, ZH) a proposé d’introduire une condition supplémentaire en restreignant l’octroi de dérogations aux tronçons présentant un faible potentiel écologique, touristique ou paysager. Le plénum a rejeté cette proposition, par 113 voix contre 57, la jugeant excessive. Il a toutefois privilégié, par 128 voix contre 42, une solution de compromis Landolt (pbd, GL) selon laquelle une dérogation est possible à la triple condition que le point de prélèvement soit situé à une altitude supérieure à 1500 mètres, que le cours d’eau soit non piscicole et que son débit résiduel minimal soit inférieur à 50 litres par seconde. Concernant l’espace réservé aux eaux, le plénum a suivi, par 105 voix contre 59, la majorité de la CEATE-CN en adoptant le principe d’une exploitation agricole extensive (sans engrais, ni produits phytosanitaires) contre une minorité Teuscher (pe, BE) préconisant un mode plus proche des conditions naturelles. Mais contrairement au Conseil des Etats, la chambre basse a estimé que les terres concernées ne pouvant plus être exploitées intensivement, elles ne sauraient être considérées comme des surfaces d’assolement. Les députés ont en outre introduit dans le projet de loi le principe d’une compensation complète de la perte corrélative de terres exploitables intensivement par les agriculteurs en fonction des quotas cantonaux de surfaces d’assolement édictés par la Confédération. Contrairement aux sénateurs, la majorité de la CEATE-CN a proposé de rendre facultative la planification par les cantons des mesures de revitalisation. Le plénum a toutefois décidé, par 94 contre 75, de suivre une minorité Bäumle (pev, ZH) et d’obliger les cantons à établir une telle planification. Par 89 voix contre 79, les députés ont suivi une minorité Bourgeois (plr, FR) et refusé le régime d’expropriation particulier élaboré par la CEATE-CE qui supprime l’obligation d’autorisation (permis de construire, etc.), afin de faciliter les opérations de revitalisation des cours d’eaux, de protection contre les crues et de construction de bassins de compensation pour les débits irréguliers. La majorité a en effet estimé que le droit foncier rural en vigueur garantit déjà la primauté de l’intérêt public. Au vote sur l’ensemble, la chambre basse a approuvé le projet de loi sur la protection des eaux par 104 voix contre 68, malgré l’opposition unanime de l’UDC et d’une majorité de libéraux-radicaux.
Lors de l’examen des divergences, le Conseil des Etats a repris les conditions édictées par la chambre basse pour l’octroi de dérogations aux débits résiduels minimaux en les reformulant légèrement. Concernant les terres réservées aux mesures de renaturation, la chambre haute a refusé la requalification voulue par les députés. Enfin, les sénateurs ont maintenu tacitement le régime particulier d’expropriation. Lors de la session d’hiver, les députés ont campé sur leur position au sujet des conséquences de la création d’espaces réservés aux eaux sur la production agricole et du principe d’une compensation complète des surfaces d’assolement. En revanche, ils ont approuvé, par 102 voix contre 82, l’institution du régime d’expropriation voulu par le Conseil des Etats, tandis que ce dernier s’est rallié tacitement au Conseil national sur l’autre point de désaccord majeur ainsi que sur trois divergences mineures. En votation finale, les sénateurs et les députés ont adopté le projet de loi, respectivement à l’unanimité et par 126 voix contre 63 [13].
Dans la foulée, le Conseil national s’est saisi du message du Conseil fédéral concernant l’initiative populaire « Eaux vivantes (Initiative pour la renaturation) ». Son traitement a vu s’opposer frontalement le camp rose-vert et le camp bourgeois. Les groupes socialiste et écologiste ont réitéré leur soutien à l’initiative, jugée plus ambitieuse que le contre-projet indirect et, par là même, plus à même de réaliser l’objectif de renaturation. À l’exception des députés verts libéraux siégeant au sein du groupe PDC, les groupes bourgeois ont exprimé leur rejet catégorique de l’initiative émanant des milieux de la pêche, jugée dangereuse pour le secteur hydroélectrique et excessive du point de vue des droits qu’elle entend accorder aux organisations de pêcheurs et de protection de l’environnement. Ainsi, à la suite du Conseil des Etats l’année précédente, le Conseil national a décidé, par 107 voix contre 65, de recommander au peuple de rejeter l’initiative. En votation finale, les deux chambres ont confirmé leur décision, respectivement par 34 voix contre 2 et par 121 voix contre 63 [14].
Le traitement de ces deux objets a révélé une lacune institutionnelle dans la procédure s’appliquant aux initiatives populaires accompagnées d’un contre-projet indirect de l’Assemblée fédérale. Selon la procédure en vigueur, le comité d’initiative peut décider le retrait de son initiative s’il est satisfait du contre-projet législatif adopté par le parlement. Ce dernier étant soumis au référendum facultatif, le risque est alors que le contre-projet soit rejeté en votation populaire. Afin de pallier cette carence, les commissions des institutions politiques des deux chambres ont décidé de donner suite à une initiative parlementaire du sénateur Lombardi (pdc, TI) et soumis au parlement un projet de loi introduisant la possibilité d’un retrait conditionnel des initiatives populaires. Concrètement, le nouveau dispositif permet au comité d’initiative de déclarer retirer son initiative à la condition expresse que le contre-projet indirect ne soit pas rejeté en votation populaire. Cette révision de la loi sur les droits politiques a été adoptée par les chambres lors de la session d’automne, si bien que l’Association suisse de la pêche a pu user de ce nouveau droit en décidant le retrait conditionnel de son initiative peu après l’adoption du contre-projet indirect par les chambres [15].
Selon un rapport publié par l’OFEV à l’automne, une centaine de stations d’épuration des eaux usées (STEP) devraient être équipées de systèmes d’élimination des micropolluants. En effet, les techniques traditionnelles ne permettent pas d’éliminer les résidus de produits biocides (herbicides, fongicides, etc.), de médicaments, de produits de beauté et de nettoyage. Or, même à des concentrations très faibles, cette pollution nuit aux plantes et animaux aquatiques, ainsi qu’à la qualité des réserves d’eau potable. Ainsi, bien que les concentrations mesurées depuis 2006 ne présentent pas de danger immédiat pour les humains, l’OFEV a préconisé une série de mesures à titre préventif, telles que l’installation de procédés d’épuration spécifiques (par ex. l’ozonisation) dans une centaine de STEP (sur les 700 que compte le pays). L’OFEV doit étudier le financement de cet investissement estimé à 1,2 milliard de francs, auquel il convient d’ajouter 120 millions de francs pour les coûts d’exploitation annuels supplémentaires, dans le cadre de la révision de l’ordonnance sur la protection des eaux instituant cette nouvelle tâche [16].
Suite à la constatation de contaminations par les PCB des eaux et des poissons dans les cantons de Fribourg et du Jura l’année précédente, l’OFEV et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) ont publié des recommandations à destination des autorités cantonales censées permettre d’évaluer précisément la gravité de la contamination et, le cas échéant, de prendre les mesures adéquates [17].
L’OFEV, l’OFSP et l’Office fédéral de l’agriculture ont tiré un bilan positif des projets d’assainissement des eaux souterraines et de l’eau des lacs réalisés dans le secteur agricole par les cantons et les communes avec le soutien de la Confédération. Les objectifs de réduction des teneurs en nitrates, en phosphore et en produits phytosanitaires ont été largement atteints grâce à des mesures telles qu’un mode d’assolement approprié, une technique de culture respectueuse du sol, l’aménagement de surfaces herbagères, de bordures tampons et de prairies naturelles. Il en résulte que les eaux souterraines et les lacs satisfont aux critères de propreté garantissant la qualité de l’eau potable [18].
Concernant l’augmentation de la redevance hydraulique, voir supra, partie I, 6a (Energie hydro-électrique).
 
[13] BO CN, 2009, p. 638 ss., 1912 ss. et 2353; BO CE, 2009, p. 874 ss., 1113 s. et 1311; presse du 29.4 et du 1.12.09. Cf. APS 2008, p. 183 s. Au CN, la quasi totalité du groupe UDC et huit députés PLR ont rejeté le projet.
[14] BO CN, 2009, p. 1916 ss. et 2352; BO CE, 2009, p. 1310. Cf. APS 2008, p. 183 s.
[15] NZZ, 19.10 et 17.12.09 (retrait); TA, 25.11.09; SZ, 26.11.09; NZZ,. Concernant cette révision de la loi sur les droits politiques, cf. supra, partie I, 1c (Volksrechte).
[16] BZ et NZZ, 2.10.09; OFEV, communiqué de presse, 1.10.09.
[17] OFEV, communiqué de presse, 15.1.09. Cf. APS 2008, p. 184.
[18] NZZ, 23.10.09; OFAG, communiqué de presse, 22.10.09.