Année politique Suisse 2010 : Infrastruktur und Lebensraum / Verkehr und Kommunikation
 
Trafic routier
Lors de la session de printemps, les chambres ont repris l’examen du projet de loi relative à la vignette autoroutière afin d’éliminer l’ultime divergence concernant le contrôle et la poursuite pénale en procédure simplifiée à la frontière. Si le Conseil national a réaffirmé, par 105 voix contre 49, son opposition à la privatisation de cette tâche étatique, le Conseil des Etats a quant à lui réitéré, par 31 voix contre 10, son soutien au projet gouvernemental, visant à permettre aux services douaniers de recourir aux services spécialisés de sociétés privées. La conférence de conciliation a proposé, par 14 voix contre 9, d’adopter la solution du Conseil fédéral. Après que les chambres ont tacitement approuvé cette proposition, elles ont adopté la loi en votation finale, respectivement par 133 voix contre 58 et à l’unanimité [15].
L’autorisation provisoire dont bénéficient les camions de 60 tonnes dans certains pays membres de l’UE (notamment la Suède et la Finlande) a suscité de très nombreuses réactions négatives à travers le pays. L’opposition unanimement exprimée à ce que de tels camions empruntent les routes suisses a souligné le risque que cela représenterait pour la sécurité du trafic et la dégradation considérable de l’infrastructure routière qui en résulterait. Les cantons de Bâle-Ville, de Genève, de Lucerne, de Neuchâtel, du Tessin et d’Uri ont fait usage de leur droit d’initiative afin que les chambres fédérales interdisent la circulation de ces mégacamions sur le territoire national. Lors de l’examen préalable de ces initiatives, la CTT-CE a décidé de déposer une motion de commission allant dans le même sens. Partageant l’avis des initiants, elle a en outre relevé qu’autoriser la circulation de tels camions irait manifestement à l’encontre de l’objectif de transfert du trafic de marchandises de la route au rail poursuivi par la Confédération. Toutefois, constatant que ces camions sont d’ores et déjà interdits en raison de leur poids, la commission a estimé que la principale revendication des initiatives était satisfaite. Elle a par contre souligné que la longueur des camions, en constante augmentation, constituait aussi un problème, dans la mesure où cette évolution exigerait une adaptation très coûteuse de l’infrastructure routière. C’est pourquoi la commission a proposé d’inscrire dans la loi la longueur maximale de 18,75 mètres pour les véhicules automobiles et de charger le Conseil fédéral de communiquer à la Commission européenne la position de la Suisse sur cette question. Sur préavis favorable du gouvernement, les chambres ont tacitement adopté la motion de la CTT-CE et décidé de ne pas donner suite aux initiatives [16].
Contrairement au Conseil national l’année précédente, le Conseil des Etats a rejeté, par 33 voix contre 5, la motion Messmer (plr, TG) visant à réviser l’ordonnance concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers de sorte à remplacer l’actuel contrôle général annuel par un contrôle général tous les quatre à cinq ans et un contrôle annuel limité à la sécurité pour les voitures automobiles lourdes. Les sénateurs ont suivi leur CTT, laquelle a estimé que, compte tenu du nombre élevé de défaillances en matière de sécurité constatées chaque année, le maintien du contrôle annuel était nécessaire [17].
La CTT-CE a présenté un projet de modification de la loi sur la circulation routière (LCR) consistant en la suppression de la vignette pour les vélos et concrétisant ainsi l’initiative parlementaire Stähelin (pdc, TG) à laquelle le Conseil des Etats et la CTT-CN avaient décidé de donner suite l’année précédente. La commission a motivé la suppression de cette assurance responsabilité civile (RC) obligatoire pour les cyclistes par ses coûts administratifs jugés excessifs et par le fait que plus de 90% de la population est couverte par une assurance RC privée. Cette assurance obligatoire subsistera cependant pour les cyclomotoristes [18].
Le Conseil fédéral s’est dit favorable en principe à la suppression de la vignette pour les vélos. Il a cependant mis en garde contre les inconvénients de cette suppression en matière de protection des personnes lésées. Selon le projet de la CTT-CE, une victime ne pourra en effet plus exiger la couverture du dommage directement auprès d’une assurance autorisée à pratiquer en Suisse : elle devra en premier lieu s’adresser à l’auteur du dommage, puis, si nécessaire, le poursuivre en justice. En outre, elle ne pourra bénéficier d’un soutien financier du Fonds national suisse de garantie (FNG) qu’à titre subsidiaire et sans doute plusieurs années après les faits, si l’auteur du dommage ne dispose pas d’une assurance RC privée. Pour ces raisons, le gouvernement a exigé l’octroi à la personne lésée d’un droit de créance contre le FNG, lorsqu’aucune assurance RC n’est tenue à des prestations ou que l’absence d’assureur est contestée [19].
Au Conseil des Etats, lors du débat d’entrée en matière, la suppression a été combattue par des sénateurs socialistes, qui ont rappelé que si elle permettait d’économiser 1 franc de coûts administratifs par vignette, elle engendrerait sans aucun doute une hausse des primes de la RC privée. Or si cette augmentation excède 4 francs, alors le nouveau système sera plus coûteux que l’ancien. L’entrée en matière a toutefois été décidée sans opposition. Lors de la discussion par article, le projet de la CTT n’a pas suscité de débats et les sénateurs ont approuvé tacitement l’amendement proposé par le Conseil fédéral. Au vote sur l’ensemble, ils ont adopté cette modification de la LCR par 25 voix contre 6 et 2 abstentions.
Au Conseil national, une minorité verte de la CTT-CN s’est opposée à l’entrée en matière, au motif que le système en vigueur fonctionne à satisfaction et que plusieurs associations de transports sont favorables à son maintien. Par 93 voix contre 56, les députés ont rejeté cette proposition, puis, sans discussion, ils ont adopté le projet, par 96 voix contre 51. En votation finale, les chambres ont confirmé leur premier vote, respectivement par 38 voix contre 2 et par 127 voix contre 58 [20].
Le Conseil fédéral a adapté les prescriptions sur la durée du travail et du repos des chauffeurs professionnels aux réglementations européennes afin que les entreprises de transport suisses et étrangères soient soumises aux mêmes conditions. Ainsi, la durée de travail maximale autorisée a été élevée de 56 à 60 heures par semaine, la limite maximale du temps de travail annuel demeurant cependant inchangée. Cette réforme est censée garantir une flexibilité accrue dans la gestion des variations de l’activité de transport. En outre, le gouvernement a supprimé le système de compensation applicable au temps de repos quotidien réduit au profit de la généralisation de l’obligation d’un repos quotidien d’une durée de 9 heures au minimum. L’entrée en vigueur de cette révision de l’ordonnance sur les chauffeurs a été fixée au 1er janvier 2011 [21].
Le Conseil fédéral a décidé de simplifier la procédure d’autorisation pour les trajets effectués le dimanche ou la nuit. Le transport nocturne et dominical de certaines marchandises, comme les denrées alimentaires fraîches, le bétail de boucherie ou les fleurs coupées, ne sera plus soumis à autorisation. Cette mesure permettra à l’administration fédérale et aux entreprises d’économiser le temps et l’argent que coûtent actuellement quelque 6000 procédures par an. L’OFROU a par ailleurs précisé que cette modification de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière n’engendrerait pas d’augmentation du trafic nocturne et dominical, dans la mesure où les marchandises concernées figurent déjà aujourd’hui sur la liste des exceptions donnant droit à des autorisations spéciales [22].
Concernant l’initiative populaire « Pour des véhicules plus respectueux des personnes et de l’environnement », cf. infra, partie I, 6d (Politique de protection de l’environnement).
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Sécurité routière
Après dix ans de travaux préparatoires, le Conseil fédéral a transmis au parlement le message concernant Via Sicura, le programme d’action de la Confédération visant à renforcer la sécurité routière. Le gouvernement y rappelle que, même si le nombre de morts sur les routes a chuté de plus de 40% ces dernières années, 349 personnes y ont encore perdu la vie en 2009 et 4708 autres y ont été grièvement blessées. Il entend réduire d’un quart le nombre de victimes grâce au programme Via Sicura, qui comporte, outre des mesures préventives et répressives, des améliorations de l’application des règles en vigueur et des mesures relatives aux infrastructures et à la statistique des accidents. Parmi les mesures préventives, le gouvernement propose d’abaisser à 0,1 pour mille le taux d’alcoolémie toléré pour les nouveaux conducteurs et les chauffeurs professionnels, de rendre obligatoire l’usage diurne des phares, de fixer à 7 ans l’âge minimal pour la conduite d’un vélo sur la route et d’obliger les cyclistes à porter un casque jusqu’à l’âge de 14 ans. Au niveau répressif, le Conseil fédéral prévoit, en cas de délits graves, la confiscation et la vente du véhicule, un examen obligatoire de l’aptitude à la conduite, ainsi que l’installation d’enregistreurs de données de type « boîte noire » et d’éthylomètres anti-démarrage sur le véhicule des délinquants. Il propose en outre que, en cas de dommages résultant d’une infraction commise au moins par négligence grave, les assureurs RC des véhicules concernés soient tenus de recourir contre la personne responsable de l’accident. Concernant l’amélioration de l’application des règles en vigueur, la qualité des examens sur l’aptitude à conduire devra être certifiée et la fourniture à titre commercial d’avertissements concernant les contrôles policiers (y compris, les radars) sera interdite. La durée de validité du permis de conduire sera par ailleurs limitée : le permis expirera lorsque son détenteur atteint l’âge de 50 ans, puis pourra être renouvelé de 10 ans en 10 ans sous réserve du résultat positif d’un examen de la vue. En matière d’infrastructures, le gouvernement entend éliminer les points noirs et autres endroits dangereux du réseau routier et améliorer l’examen des projets de construction routière sous l’angle de la sécurité. Quant à la statistique des accidents, la cartographie des accidents est censée permettre une identification rapide et certaine des endroits dangereux. Enfin, répondant à la requête exprimée par plusieurs cantons et par le parlement, le Conseil fédéral a joint au projet une autre modification de la LCR afin d’interdire formellement, pour raison de sécurité, la circulation des mégacamions (ou « gigaliners ») en inscrivant dans la loi les limites de longueur et de poids actuellement en vigueur (cf. supra) [23].
Dans le cadre de la mise en œuvre du programme en faveur de la sécurité des enfants, l’Office fédéral des routes (OFROU) a adopté une décision portant dérogation à l’obligation d’employer un dispositif de retenue pour les enfants à partir de sept ans aux places équipées exclusivement de ceintures abdominales. Cette dérogation est valable jusqu’au 31 décembre 2012 [24].
La CTT-CN a présenté un projet de modification de la LCR en faveur d’un durcissement des sanctions pénales à l’encontre des conducteurs sans permis. Ce projet concrétise une initiative parlementaire Heer (udc, ZH) à laquelle les CTT des deux chambres ont décidé de donner suite, respectivement en 2008 et en 2009. Il prévoit qu’à l’avenir le fait de conduire un véhicule automobile sans avoir le permis de conduire requis soit sanctionné aussi sévèrement que le fait de conduire lorsque le permis a été retiré ou son utilisation interdite. Alors qu’aujourd’hui cette contravention n’est passible que d’une amende, elle vaudra dorénavant à son auteur une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire. La commission entend ainsi garantir l’égalité devant la loi et améliorer la sécurité routière. Le Conseil fédéral a approuvé sans réserve la modification proposée par la CTT-CN, relevant combien elle rejoignait dans l’esprit les propositions gouvernementales relatives au programme Via Sicura [25].
Après avoir décidé l’entrée en matière sans la moindre opposition, le Conseil national a adopté le projet de sa commission sans discussion et à l’unanimité. Le Conseil des Etats ayant fait de même, les deux chambres ont adopté cette modification de la LCR en votation finale, respectivement à l’unanimité et par 41 voix contre 1 [26].
Au printemps de l’année sous revue, l’association des victimes de la route Roadcross et des parlementaires fédéraux issus de tous les partis représentés aux chambres ont lancé une initiative populaire fédérale intitulée « Protection contre les chauffards ». Les initiants proposent de durcir les peines à l’encontre des conducteurs prenant des risques délibérés, soit en commettant de graves excès de vitesse, soit en s’adonnant à des courses sauvages. Le texte déposé prévoit que « toute personne qui, en enfreignant intentionnellement les règles élémentaires de la circulation, s’est accommodée d’un fort risque d’accident pouvant entraîner de graves blessures ou la mort […] est un chauffard passible d’une peine privative de liberté d’une durée comprise entre un à quatre ans ». Outre la confiscation définitive de son véhicule par l’Etat, le contrevenant se verrait retirer son permis de conduire pour au moins deux ans, en cas de première infraction, et pour au moins dix ans, en cas de récidive. Les conducteurs roulant à 100 km/h ou plus à l’intérieur d’une localité, à 140 km/h ou plus hors localité et à plus de 200 km/h sur l’autoroute s’exposeraient à ces sanctions [27].
La commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-CN) a décidé de donner suite à deux initiatives du canton d’Argovie, une initiative du canton de Soleure, ainsi qu’à sept initiatives parlementaires déposées par des députés et des groupes de la chambre basse, toutes en faveur d’une plus grande sévérité à l’égard des chauffards. À l’inverse, elle a décidé de ne pas donner suite à une initiative Amstutz (udc, BE) prévoyant la publication systématique des jugements et l’inscription des condamnations sur le permis de conduire. Elle a en effet estimé que la définition de la notion de chauffard retenue par l’initiant était inapplicable, car elle ne tenait pas compte de la gravité des infractions. Elle a en outre jugé l’initiative inutile dans la mesure où la publication des jugements est d’ores et déjà possible si l’intérêt public, l’intérêt de la personne lésée ou l’intérêt de la personne habilitée à porter plainte l’exigent. Par ailleurs, elle a relevé que les autorités administratives et judiciaires concernées ont déjà accès à ces informations grâce à des registres automatisés. Suivant sa commission, le plénum a décidé, par 90 voix contre 67, de ne pas donner suite à cette initiative [28].
Le Tribunal fédéral a revu sa jurisprudence concernant les chauffards. Admettant pour la première fois le cumul de deux infractions contre un responsable d’accident mortel (homicide par négligence et mise en danger de la vie d’autrui), les juges de Mon Repos lui ont infligé une peine de 6 ans de prison. Au-delà du cas d’espèce, cette jurisprudence ouvre la voie à des sanctions pénales nettement plus sévères que jusqu’alors à l’encontre des chauffards [29].
Contrairement au Conseil national l’année précédente, le Conseil des Etats a tacitement rejeté la motion Philipp Müller (plr, AG) visant à obliger les auteurs d’excès vitesse récidivistes à équiper à leur frais leur véhicule d’un enregistreur de données du type « boîte noire » et à transmettre périodiquement ces données aux autorités cantonales compétentes pour contrôle et, le cas échéant, sanction. Les sénateurs ont ainsi suivi leur CTT, qui a jugé les mesures proposées excessives et difficilement applicables, notamment par rapport au programme Via Sicura qui prévoit également le recours à de telles boîtes noires, mais dans des conditions clairement délimitées [30].
Dans un arrêt rendu à l’automne, le Tribunal fédéral a prononcé l’interdiction de tous les systèmes avertissant les automobilistes de contrôles routiers, indépendamment de la technologie employée (GPS, téléphone portable, etc.). Confirmant la jurisprudence initiée en 2008 par laquelle l’utilisation d’un système GPS avait été prohibée, les juges en ont généralisé la portée lors de l’examen d’une affaire concernant des avertissements par SMS [31].
 
[15] BO CN, 2010, p. 171 ss., 328 et 575; BO CE, 2010, p. 104 s., 266 et 361; FF, 2010, p. 1907 ss. Cf. APS 2009, p. 156 s.
[16] BO CE, 2010, p. 694 s. et 925 s. (BS, TI et UR); BO CN, 2010, p. 2061 ss. Le CF a concrétisé cette motion en marge du programme Via Sicura (cf. infra).
[17] BO CE, 2010, p. 174 ss. Cf. APS 2009, p. 157.
[18] FF, 2010, p. 3767 ss. Cf. APS 2009, p. 157.
[19] FF, 2010, p. 3779 ss.
[20] BO CE, 2010, p. 692 ss. et 1008; BO CN, 2010, p. 1433 ss. et 1672; FF, 2010, p. 5973 ss.
[21] 24h, 9.7.10.
[22] NZZ, 2.10.10; DETEC, communiqué de presse, 1.10.10.
[23] FF, 2010, p. 7703 ss. Cf. APS 2009, p. 157.
[24] FF, 2010, p. 344. Cf. APS 2009, p. 158.
[25] FF, 2010, p. 3579 ss. (CTT-CN) et 3589 s. (CF).
[26] BO CN, 2010, p. 1432 s. et 2181; BO CE, 2010, p. 1047 et 1354; FF, 2010, p. 8221 s.
[27] FF, 2010, p. 2409 ss.; AZ et BaZ, 17.4.10; Blick, 26 et 27.4.10; presse des 27 et 28.4.10. Cf. APS 2009, p. 158. Le comité d’initiative est notamment composé des conseillers nationaux Adrian Amstutz (udc, BE), Chantal Galladé (ps, ZH), Daniel Jositsch (ps, ZH), Peter Malama (plr, BS), Philipp Müller (plr, AG), Yvan Perrin (udc, NE), Pius Segmüller (pdc, LU) et Franziska Teuscher (pe, BE), ainsi que des conseillers aux Etats Liliane Maury Pasquier (ps, GE) et Luc Recordon (pe, VD).
[28] BO CN, 2010, p. 1296 ss. et Annexes III, p. 211 ss. (CAJ).
[29] LT, NLZ, NZZ et TA, 7.5.10.
[30] BO CE, 2010, p. 183 s. Cf. APS 2009, p. 157.
[31] BaZ, NZZ et SoS, 8.10.10. Cf. APS 2008, p. 157.