Année politique Suisse 2012 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Europe: UE
Déposée en novembre 2010, l’initiative populaire fédérale « Pour un
moratoire sur l’adhésion à l’UE » qui demandait l’instauration d’un moratoire de 10 ans sur toute négociation d’adhésion n’a pas récolté le nombre nécessaire de signatures. Cette initiative avait été lancée par un comité alémanique de sympathisants de l’UDC et du PLR, mais sans le soutien officiel de leur parti
[15].
Les cantons ont également été entendus dans le dossier européen, puisque le directeur de la
Conférence des gouvernements cantonaux, Pascal Broulis, ainsi que le ministre de l’économie et le ministre des affaires étrangères ont signé une convention qui instaure la création d’un organe de direction politique dédié à l’échange entre la Confédération et les cantons en matière de politique européenne
[16].
La motion Favre (plr, NE) qui demande d’exclure le chapitre du
tabac des négociations européennes relatives à la santé publique, a été adoptée en seconde lecture suite à une modification du Conseil des Etats. cf. supra, partie I, 7b (Suchtmittel)
[17].
Les questions concernant les accords fiscaux « Rubik », ainsi que leur appréciation par l’UE, sont traitées dans la partie I, 4b (Geld, Währung und Kredit).
En début d’année, le nouveau ministre des affaires étrangères, Didier Burkhalter, a présenté sa
stratégie sur les relations avec l’UE. Là où son prédécesseur prônait une approche simultanée et coordonnée de tous les dossiers, Didier Burkhalter souhaite se concentrer sur un dossier, celui de l’électricité, afin de trouver une solution qui pourrait servir de modèle aux autres dossiers en suspens. L’accord sur l’électricité permettrait également de régler les questions institutionnelles, dont la discussion fait office de condition
sine qua non pour Bruxelles. L’idée de régler les questions institutionnelles par un accord particulier a rencontré le scepticisme des experts, des politiciens, ainsi que de l’ambassadeur de l’UE en Suisse
[18].
Au mois de février, le Conseil fédéral a présenté une
feuille de route concernant les prochaines étapes des
négociations bilatérales avec l’UE. Les négociations actuelles portent sur l’agriculture, sur la sécurité des produits alimentaires et de la santé publique, sur le commerce des droits d’émission de CO2, sur les programmes de navigation par satellite Galileo et EGNOS, sur la collaboration en matière de concurrence et enfin sur l’électricité/énergie. Ce dernier dossier a été qualifié de prioritaire par le Conseil fédéral, puisqu’il devrait servir de modèle pour les autres négociations. Le gouvernement a également rappelé son intention de suivre une stratégie qui permette d’apporter des solutions aux questions institutionnelles, ainsi que son refus de toute reprise automatique du droit européen. L’accueil bruxellois à cette feuille de route a été plutôt réservé. En effet, les Européens ont regretté que la Suisse poursuive une stratégie qui met sur la table des questions procédurales au détriment des questions substantielles. De plus, le refus helvétique d’instaurer des mécanismes garantissant l’adaptation des accords bilatéraux aux avancées législatives et juridiques européennes, ainsi que l’opposition à l’établissement d’un organe de contrôle judiciaire efficace ont créé des tensions lors de la rencontre entre l’UE et la Suisse en mars. Afin de répondre aux exigences européennes, le Conseil fédéral a transmis des propositions pour résoudre ces questions institutionnelles dans le courant du mois de juin. A Bruxelles, l’évaluation de ces propositions par l’UE a été très critique. La Commission a jugé ces propositions insuffisantes, un avis partagé par les Vingt-Sept. Dans un rapport rendu à la fin de l’année sous revue, les Etats-membres ont exclu la conclusion de nouveaux accords bilatéraux d’accès au marché intérieur européen tant que ne seront pas réglées les fameuses questions institutionnelles, soit la reprise la plus automatique possible par la Suisse de la législation européenne pour les domaines concernés, ainsi que l’établissement d’un organe de surveillance et d’un tribunal pour régler les litiges. Les discussions reprendront l’année prochaine
[19].
En 2009, le groupe libéral radical déposait une motion demandant au Conseil fédéral d’entrer en négociation avec l’UE pour garantir
l’accès réciproque au marché des services financiers transfrontaliers. Au courant de l’année 2011, cette motion avait été largement acceptée par le Conseil national malgré une opposition de l’UDC. Au cours de l’année sous revue, le Conseil des Etats n’a pas suivi cette voie. En effet, ce dernier a refusé la motion par 27 voix contre 7. La principale crainte du Conseil des Etat et de sa commission s’est révélée être la reprise automatique du droit européen dans des domaines particulièrement sensibles, tels la concurrence ou la protection des consommateurs. Il semblerait également que les tensions survenues suite aux différents fiscaux avec l’UE aient amené le Conseil des Etats à rejeter la motion en mars de l’année sous revue. Le Conseil des Etats a cependant exprimé son soutien à la politique bilatérale du Conseil fédéral qui permet de conclure des accords plus spécifiques avec chaque état de l’Union
[20].
Suite au référendum sur l’adhésion à l’UE,
le peuple croate a décidé de rejoindre l’UE en janvier 2012 par 66% des voix. Cette décision a réveillé les opposants suisses à la libre circulation des personnes. Face à la colère des zones frontalières, premières concernées par les pressions salariales, le président du PS, Christian Levrat, a également reconnu que la question de l’introduction d’un contingentement régional des travailleurs européens devait se poser
[21].
L’introduction de la
clause de sauvegarde permettant à la Suisse d’introduire un contingentement de travailleurs étrangers a été au centre des débats du gouvernement au printemps. Des discussions similaires avaient eu lieu en 2009, mais le Conseil fédéral avait finalement renoncé à activer cette clause. Bien qu’economiesuisse et les représentants de l’agriculture et de l’hôtellerie aient clairement déclaré leur opposition à un tel scénario, le PLR a reconnu que l’activation de cette clause de sauvegarde permettrait de contrer l’initiative de l’UDC « contre l’immigration de masse » qui signerait la fin de la libre circulation
[22].
Dans le courant du mois d’avril, le Conseil fédéral a annoncé
l’activation de la clause de sauvegarde envers les Etats de l’UE-8 (Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie et République Tchèque). Cette activation a signé la réintroduction de contingents pour les autorisations de séjours de catégorie B délivrées aux ressortissants estoniens, hongrois, lettons, lituaniens, polonais, slovaques, slovènes et tchèques durant une année. Le Conseil fédéral a relevé les effets économiques positifs de la libre circulation des personnes, mais a également noté l’importance de mener un débat sur les questions de l’immigration et de la politique économique. Cette activation a contrarié non seulement les pays concernés, mais également l’UE. En effet, la clause de sauvegarde peut être activée si le nombre d’autorisations délivrées en une année dépassent de 10% la moyenne des permis délivrés au cours des trois dernières années. Ce dépassement est observé en Suisse pour les pays concernés, mais non si l’on tient compte de l’ensemble des arrivants de nationalité européenne. Cette différence a amené Bruxelles à qualifier la décision suisse de discriminatoire. Les effets de cette décision devraient cependant être minimes, car elles ne concerneraient que 4 000 personnes. Bien que conscients de la portée limitée et symbolique de cette décision, qualifiée même de « non-événement qui ne résoudra rien » par le président du PS, tous les partis ont reconnu la nécessité d’intervenir dans ce dossier. La presse a également relayé la position de Natalie Rickli (udc, ZH) qui a déclaré que la Suisse aurait également dû appliquer la clause de sauvegarde à l’Allemagne pour limiter l’importante immigration allemande: « Les Allemands pris séparément ne me dérangent pas. La masse me dérange ». Les réactions ont été vives autant en Suisse qu’en Allemagne où le
Spiegel Online a titré « Eclat autour d’une discrimination des Allemands »
[23].
L’arrêté fédéral concernant la
modification de l’annexe III à l’accord sur la libre circulation des personnes a été accepté à l’unanimité au Conseil des Etats et par 189 voix contre 5 au Conseil national. L’objectif de ce changement est de mettre en place un système non seulement de reconnaissance, mais aussi de contrôle des qualifications professionnelles acquises par des citoyennes ou citoyens de pays de membres de l’UE ou de l’AELE qui souhaiteraient exercer une profession règlementée en Suisse
[24].
Le Conseil des Etats a suivi le Conseil national en adoptant la motion Müller (plr, AG) par 21 voix contre 4. Cette dernière demande une meilleure répartition des requérants d’asile, dont les données sont saisies dans le système
Eurodac. Il s’agit de transférer directement les requérants d’asile faisant l’objet d’une non-entrée en matière vers l’Etat Dublin compétant, au lieu de les répartir dans les cantons. La répartition selon les cantons n’interviendrait alors que dans les cas où il existe un motif d’entrée en matière
[25].
Sur proposition de sa commission, le Conseil national a renvoyé le projet de développement de l’acquis de Schengen portant sur la création d’une
agence pour des systèmes d‘information. La raison de ce renvoi se trouve dans les modalités et non dans l’essence du projet. En effet, les modalités, notamment les droits participatifs et la contribution financière de la Suisse, ne sont pas encore clairement déterminées et devront être négociées par le Conseil fédéral lors d’un accord complémentaire. Les parlementaires demandent donc que les conséquences financières et techniques pour la Suisse soient examinées au préalable. Le Conseil des Etats s’est rallié à cette décision
[26].
Dans une motion «
Cas Dublin: Accord de transfert rapide avec l’Italie », la CIP CN a appelé le Conseil fédéral à négocier un accord avec l’Italie permettant d’améliorer l’efficacité et surtout d’accélérer l’exécution des transferts des cas Dublin. Malgré une opposition du bloc rouge-vert et de quelques membres du groupe PDC/PEV, le Conseil national a accepté la motion par 110 voix contre 68. En septembre, les sénateurs n’ont pas suivi leurs homologues et ont refusé la motion. Cependant, lors de la même séance, le Conseil national a accepté une autre motion de sa CIP demandant la réintroduction des
contrôles frontaliers avec l’Italie suite à l’important afflux migratoire nord-africain. Une minorité émanant de membres du PS et des Verts s’est opposée sans succès à la motion adoptée par 105 voix contre 68
[27].
Dans le cadre de la participation helvétique à
Frontex, des gardes-frontières suisses ont été mobilisés pour patrouiller à l’occasion de l’Euro 2010 sur la frontière des deux pays organisateurs, la Pologne et l’Ukraine
[28].
[15]
FF, 2012, p. 5297;
LM, 17.12.12;
APS 2010, p. 78.
[16] Communiqué du DFAE du 5.6.12; cf. supra partie I, 1d (Beziehungen zwischen Bund und Kantonen).
[17] Mo. 10.3195:
BO CN, 2011, p. 1020 ss., p. 1041; 2012, p. 1308s.;
BO CE, 2012, p. 167ss.
[18]
LT, 13.1. et 14.5.12;
NZZ, 2.2.12;
TA, 14.5.12.
[19] Communiqué du DFAE du 1.2. et 30.11.12;
LT, 17.3., 19.9. et 21.12.12;
Lib, 12.3.12.
[20] Mo. 09.3811:
BO CN, 2011, p.1039;
BO CE, 2012, p. 96ss.;
APS 2011, p.140.
[22]
BZ, 28.1.12;
TG, 31.1.12;
LT, 29.2.12;
APS 2009, p. 62s.
[23] Communiqué du DFAE du 18.4. et 27.6.12;
LT, 19.4., 20.4. et 2.5.12 (citation);
24H, 29.4.12 (citation).
[24] MCF 12.047:
FF, 2012, p. 4103ss., 8989ss.;
BO CE, 2012, p. 867ss., 1261;
BO CN, 2012, p. 2034ss., 2283.
[25] Mo. 10.3174:
BO CN, 2011, p. 1706ss.;
BO CE, 2012, p. 79s.;
APS 2011, p.145. Pour les objets traitant de la lutte contre les entorses aux mesures d’accompagnement, voir partie I, 7a (Population et travail).
[26] MCF 12.057:
FF, 2012, p. 5417ss.;
BO CN, 2012, p. 1269ss.;
BO CE, 2012, p. 1154s.
[27] Mo. 12.3336 (Cas Dublin):
BO CN, 2012, p. 1192ss.;
BO CE, 2012, p. 859s.; Mo. 12.3337 (contrôles frontaliers avec l’Italie):
BO CN, 2012, p. 1192ss.
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