Année politique Suisse 2012 : Sozialpolitik / Soziale Gruppen
 
Politique familiale
En réponse à un postulat Stump (ps, AG), le Conseil fédéral a publié son rapport intermédiaire sur la violence dans les relations de couple. Le postulat demandait au Conseil fédéral d’examiner la violence domestique et de proposer des mesures pour lutter contre ces violences. Le Conseil fédéral a donc présenté en février un train de vingt mesures, comprenant entre autres une amélioration de l’information dans l’espace public, des études permettant de mieux comprendre la problématique ou encore des mesures de perfectionnement pour les professionnels. En évaluant les premiers résultats de ces mesures partiellement mises en œuvre, le gouvernement a annoncé avoir une meilleure connaissance de la violence domestique grâce à la statistique policière de la criminalité et à la bonne collaboration entre les offices fédéraux, ainsi qu’entre les cantons et la Confédération. Le Conseil fédéral a également salué la mise en place d’un groupe de travail interdépartemental et la mise en œuvre partielle d’une mesure visant à sensibiliser les victimes, particulièrement les femmes et les populations migrantes, aux violences domestiques [54].
En mai, le Conseil fédéral s’est exprimé contre l’initiative « Financer l'avortement est une affaire privée » sans lui opposer de contre-projet. L’initiative demande que l’interruption de grossesse soit exclue du catalogue des prestations de l’assurance obligatoire sauf dans certains cas « acceptables ». Le gouvernement a motivé sa position en démontrant premièrement que les exceptions prévues par l’initiative, c’est-à-dire les cas d’avortement qui seraient remboursés, sont formulées de manière trop vague et donneront ainsi lieu à des pratiques divergentes. Deuxièmement, le Conseil fédéral a expliqué que, suivant l’initiative, la situation économique des femmes deviendrait un facteur central pour une décision qui relève plus de convictions morales, éthiques ou théologiques. Finalement, le gouvernement relève que l’économie réalisée en excluant l’interruption de grossesse des prestations de base sera trop faible pour justifier les conséquences de l’acceptation de l’initiative. La commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS CN) a suivi le gouvernement en rejetant l’initiative par 18 voix contre 5 et 1 abstention. Les chambres devront encore se prononcer sur le sujet [55].
Déposée en 2007, l’initiative parlementaire Hochreutener (pdc, BE) demandant la création d’un article constitutionnel sur la famille a été traitée par les chambres au cours de l’année sous revue. Cette initiative cherche à ancrer dans la constitution un article visant à soutenir la famille et à permettre une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Premier à s’exprimer sur le sujet, le Conseil national a modifié le projet suivant la proposition de sa commission. Il a ainsi biffé l’article 4 concernant une harmonisation des pensions alimentaires par 96 voix contre 80 et 4 abstentions, une courte majorité face à la proposition de minorité demandant de conserver l’article déposé par des membres du PS, du PEV et du PDC. Lors de la discussion par article, une proposition Bortoluzzi (udc, ZH) qui voulait faire bénéficier les parents qui gardent eux-mêmes leurs enfants d'une déduction fiscale au moins égale à celle accordée aux parents qui confient la garde de leurs enfants à des tiers a été refusée par 112 voix contre 55. Au vote sur l’ensemble, l’article a été accepté par le Conseil national par 111 voix contre 68 et 1 abstention. Les 68 voix opposées à l’article sur la famille se comptent dans les rangs de l’UDC et du PLR. L’article 4 concernant les pensions alimentaires a également fait débat au sein du Conseil des Etats. A l’inverse de sa commission qui proposait de s’aligner sur la proposition du projet, les sénateurs ont préféré suivre la minorité par 22 voix contre 19 et ont ainsi corroboré la proposition du Conseil national. Le peuple se prononcera sur cette modification de la constitution en 2013 [56].
La commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ CN) a suivi son homologue du Conseil des Etats en donnant suite à une initiative cantonale zurichoise qui demande qu’une base légale soit créée afin d’harmoniser les avances et le recouvrement des pensions alimentaires [57].
La modification du code civil suisse demandant l’introduction de l’autorité parentale conjointe en cas de divorce ou de concubinage a été acceptée par le Conseil national en septembre. Les élus ont accepté cette modification par 151 voix contre 3. En outre, ils ont modifié le projet du Conseil fédéral en donnant à la loi un effet rétroactif sans limite temporelle, alors que le Conseil fédéral souhaitait la limiter à cinq ans. Cet objet est également discuté dans la partie I, 1b (Zivilrecht) [58].
Pour répondre à une réglementation insuffisante en matière de placement des enfants, la conseillère nationale Christine Bulliard-Marbach (pdc, FR) a déposé une motion demandant que les organisations qui placent des enfants soient soumises au régime de l’autorisation. En outre, la situation des enfants à long terme et la transparence des coûts de ces organisations privées devront aussi être surveillées. Le Conseil des Etats et le Conseil national ont adopté la motion, malgré une opposition du parti agrarien [59].
La révision de la loi sur la procréation assistée a avancé de quelques pas lors de l’année sous revue. Les amendements au projet ont été acceptés en juin par les participants à la consultation. Ainsi, le diagnostic préimplantatoire, interdit par la législation actuelle, serait permis à des conditions strictes. Un diagnostic préimplantatoire serait possible uniquement pour des couples encourant le risque de transmettre des maladies génétiques graves à leur enfant. De ce fait, il sera toujours interdit de dépister la trisomie 21. Egalement interdit, la possibilité de sélectionner un embryon qui pourrait donner des tissus ou cellules à un frère ou une sœur malade, un « bébé sauveur ». La première ébauche de la loi, qui prévoyait de développer trois embryons in vitro, a été modifiée permettant d’analyser huit embryons. Les parents avec un risque génétique seront ainsi à égalité avec les autres parents. Finalement, il sera possible de congeler les embryons afin de les implanter ultérieurement. Le projet sera transmis aux chambres en 2013. La discussion sur ce projet de loi s’est poursuivie en cours d’année suite à l’arrivée sur le marché d’un test qui permettrait de dépister la trisomie 21 grâce à une simple prise de sang. Les associations de défense des handicapés ont fait part de leur inquiétude concernant la possibilité d’une pression sociale croissante en faveur des avortements [60].
Le Conseil fédéral a mis en consultation un avant-projet pour adapter la question des pensions alimentaires. Dans le cas des enfants nés hors-mariage, la loi tiendra dorénavant compte du coût lié à la prise en charge de l’enfant par le parent qui en a la garde dans le montant de la pension alimentaire. Cependant, le parent responsable de la garde sera généralement toujours responsable d’un éventuel remboursement de l’aide sociale. Le Conseil fédéral a refusé de partager ce remboursement entre les deux parents [61].
Dans un postulat, la conseillère nationale Jacqueline Fehr (ps, ZH) a prié le Conseil fédéral d’établir un rapport sur la situation de la maternité de substitution, communément appelé recours aux « mères porteuses ». Malgré son interdiction sur le sol helvétique, des couples suisses feraient appel à des mères porteuses à l’étranger. Au vu du manque de connaissance à ce sujet, le rapport permettrait de clarifier le nombre et la situation des enfants, des couples, ainsi que des mères porteuses. Le Conseil national a transmis le postulat en décembre [62].
Suite à des études démontrant des disparités importantes dans la mortalité infantile et maternelle entre population suisse et migrante, un postulat Maury-Pasquier (ps, GE) a réclamé au gouvernement la rédaction d’un rapport sur la situation de santé maternelle et infantile des populations migrantes, ainsi qu’une étude des moyens qui pourraient remédier à ce problème. Suivant l’avis du Conseil fédéral, le Conseil des Etats a transmis ce postulat [63].
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Prise en charge d’enfants hors du foyer familial
Pour pallier au manque de place dans les crèches, une motion Malama (plr, BS) a été déposée en juin afin de diminuer la charge bureaucratique et de renforcer les mécanismes du marché en la matière. Le conseiller national demande au gouvernent un rapport sur les différentes pratiques cantonales, les conséquences de ces différentes législations et les implications d’une éventuelle harmonisation de la législation fédérale pour les crèches. En dépit de l’opposition du camp vert-rose, la motion a été acceptée par 120 voix contre 63 et 7 abstentions [64].
Une revendication similaire a été exprimée par le groupe libéral-radical dans leur motion « Construction et gestion de structures d'accueil collectif de jour pour enfants. Suppression des obstacles bureaucratiques ». En effet, le PLR demande un examen des prescriptions applicables aux structures d’accueil pour enfants afin d’éviter que ces structures soient soumises à des règlements disproportionnés, notamment en matière de denrées alimentaires. Dans certains cantons, les structures qui accueillent des enfants pour manger peuvent être soumises aux mêmes règlementations qu’une cuisine de restaurant. Si les conclusions du rapport gouvernemental démontrent une trop grande sévérité envers les structures d’accueil, le Conseil fédéral devra intervenir afin de permettre une interprétation plus souple des lois, évitant ainsi une surcharge administrative et financière pour les structures d’accueil. Le Conseil des Etats a accepté cette motion s’alignant ainsi sur le Conseil national [65].
Le Conseil fédéral a publié son message concernant l’initiative de l’UDC « Initiative pour les familles: déductions fiscales aussi pour les parents qui gardent eux-mêmes leurs enfants ». Il propose de rejeter l’initiative en raison du biais fiscal qu’elle crée. En effet, le droit fiscal n’influence aujourd’hui aucunement les parents à faire un choix en matière de garde des enfants. Il argumente que jusqu’en 2010, il n’existait aucune déduction fiscale pour les parents faisant garder leurs enfants par des tiers. Suite à de nombreuses interpellations demandant l’introduction d’une telle déduction notamment en raison du critère de capacité économique, cette déduction fiscale a été introduite pour les parents faisant garder leurs enfants par un tiers. Selon le Conseil fédéral, l’initiative impliquerait soit l’abrogation de cette déduction économique et conséquemment la violation du principe de capacité économique, soit l’introduction d’une déduction pour les familles ne faisant pas garder leurs enfants par un tiers et donc, un avantage fiscal pour les parents qui décident de rester à la maison [66].
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Allocations familiales
En novembre, le PDC a déposé une initiative « Aider les familles ! » qui demande que les allocations pour enfants et allocations de formation professionnelle soient complétement exonérées d‘impôts. Dans le même temps, le PDC a déposé une seconde initiative «Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage», dont les détails se trouvent dans le sous-chapitre Mariages (cf. infra) [67].
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Droit du mariage et du divorce
Les chambres fédérales ont adopté une loi visant à lutter contre les mariages forcés. L’acceptation de cet objet a entrainé des modifications dans la loi sur les étrangers et la loi sur l’asile. La suspicion d’un mariage forcé ou d’un mariage avec un ou une mineure bloquera notamment les procédures de regroupement familial. Le développement de cet objet se trouve dans la partie I, 1b (Zivilrecht) [68].
Un postulat Bea Heim (ps, SO) a été transmis au Conseil fédéral par le Conseil national. Il demande que la Suisse mette en place un système identique au « Force Marriage Protection Order » que connaît le Royaume-Uni et qui permettrait une meilleure protection des victimes potentielles de mariages forcés. Plus de détails sur cet objet peuvent être trouvés dans la partie I, 1b (Zivilrecht) [69].
En novembre, le PDC a déposé une initiative « Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage ». Le texte demande que les personnes mariées ne soient plus pénalisées en matière de fiscalité et au niveau des assurances sociales. Suivant l’initiative, les couples mariés bénéficieraient par exemple de deux rentes AVS au lieu d’une et demi, comme le veut la pratique actuelle. Le manque à gagner fiscal n’a pas encore été calculé, mais le PDC donne l’exemple de l’AVS qui perdrait 1.8 à 2 milliards de francs. Afin de pallier ces dépenses, le PDC a lancé quelques idées: un financement par la TVA ou encore une taxe pour les couples sans activité lucrative et sans tâches éducatives ou pour les retraités aisés. L’initiative introduit également un changement dans la constitution en stipulant que le « mariage est l'union durable et réglementée par la loi d’un homme et d’une femme ». Cette formulation a été critiquée par les associations de défense des homosexuels et des transgenres [70].
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Modes de vie alternatifs
L’adoption par des couples homosexuels a été au centre des débats politiques lors de l’année sous revue. Les revendications des familles arc-en-ciel avaient commencé en 2011 lorsque le Tribunal fédéral avait rejeté la demande d’une personne qui souhaitait adopter les enfants de sa conjointe. Le soutien à ce cas s’était manifesté par le dépôt d’une pétition « même chances pour toutes les familles » à Berne. La commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (CAJ CE) a donné suite à cette pétition et a ainsi proposé la motion « Droit de l’adoption. Mêmes chances pour toutes les familles ». Le Conseil fédéral a pris position sur le sujet en exprimant son soutien à l’adoption des enfants indépendamment de l’orientation sexuelle des couples. Cependant, le gouvernement préfèrerait une limitation de l’adoption aux enfants du partenaire et non un accès sans restriction à l’adoption. Le Conseil des Etats n’a pas souhaité inclure les limitations du Conseil fédéral et a adopté la motion par 21 voix contre 19. Lors du passage de la motion devant le Conseil national, les discussions ont été bouillonnantes et se sont même transformées en attaques personnelles. Deux propositions de minorité antagonistes ont encore accentué les profondes divisions sur le sujet. Une minorité socialiste a proposé l’acceptation de la motion telle qu’au Conseil des Etats, alors qu’une minorité émanant de l’UDC et de quelques membres du PLR a demandé le rejet de la motion. La proposition de la majorité a modifié la motion en limitant l’adoption à l’enfant du partenaire enregistré. Au vote, le Conseil national a suivi la majorité par 113 voix contre 64 et 4 abstentions, l’opposition se retrouvant dans les rangs du groupe pdc-pev et udc. Le Conseil des Etats devra s’exprimer sur le projet modifié en 2013 [71].
La commission nationale d’éthique et de médecine a présenté ses conclusions concernant l’intersexualité. La commission a clairement pris position contre des interventions chirurgicales visant à déterminer artificiellement le sexe d’un enfant né avec un sexe indéterminé en l’absence de problèmes médicaux. En outre, la commission a soutenu une meilleure prise en charge des interventions médicales et a demandé une plus grande souplesse de l’état civil concernant les modifications de sexe [72].
 
[54] Po. 05.3694: FF, 2012, p. 2209ss.; APS 2005, p. 211.
[55] MCF 12.052: FF, 2012, p. 4491ss.; Communiqué de presse de la CSSS CN du 2.11.12.
[56] Iv. parl. 07.149: FF, 2012, p. 1627ss.; BO CN, 2012, p. 290ss., 1234; BO, CE, 2012, p. 415ss., 637; NZZ, 8.3.12; LT, 15.3.12; APS 2011, p. 332.
[57] Iv.ct. 09.301: Communiqué de presse de la CAJ CN du 31.8.12.
[58] MCF 11.070: BO CN, 2012, p. 1625ss.; LT, 30.6.12; NZZ, 27.9.12; APS 2011, p. 335s.
[59] Mo. 11.4147: BO CN, 2012, p. 1206; BO CE, 2012, p. 920.
[60] Communiqué de presse du DFI du 28.6.12; Lib., 29.6.12; LT, 30.7.12; APS 2011, p. 333.
[61] Lib., 5.7.12; LT, 5.7.12
[62] Po. 12.3919: BO CN, 2012, p. 2253.
[63] Po. 12.3966: BO CE, 2012, p. 1019s.
[64] Mo. 11.3982: BO CN, 2012, p. 1205.
[65] Mo. 11.4028: BO CN, 2011, p.2263; BO CE, 2012, p.421; APS 2011, p. 334.
[66] MCF 12.068: FF, 2012, p. 6711ss.
[67] LT, 5.11. et 6.11.12.
[68] MCF 11.018: FF, 2012, p. 5479ss.
[69] Po. 12.3304: BO CN, 2012, p.1211.
[70] LT, 6.11.12.
[71] Mo 11.4046: BO CE, 2012, p. 225ss.; BO CN, 2012, p. 2216ss.; Lib., 23.2.12; APS 2011, p.337.
[72] Lib., 10.11.12.