Année politique Suisse 2013 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik / Relations bilatérales
print
France
Les relations franco-suisses n’ont pas débuté l’année 2013 sous de bons auspices. En effet, un véritable coup de tonnerre diplomatique a éclaté en janvier : la France a annoncé unilatéralement que ses expatriés fiscaux ne bénéficieraient plus de la convention de double-imposition. Cette mesure touche les ressortissants français vivant en Suisse au bénéfice d’un forfait fiscal majoré et touchant encore des revenus en France [77].
La révision de la convention franco-suisse sur les successions a connu de nombreux rebondissements durant l’année sous revue. Alors que, faute d’un accord, la France avait envisagé de dénoncer la convention avant la date butoir du 30 juin, créant ainsi un vide juridique, un contact téléphonique entre les deux ministres des finances, Pierre Moscovici et Eveline Widmer-Schlumpf, a permis de rétablir le dialogue. En juillet, la ministre suisse s’est donc rendue à Paris pour signer la nouvelle convention sur l’imposition des successions; convention qui remplacera l’ancien traité datant de 1953. Dès sa signature, l’accord a été perçu comme un asservissement de la Suisse devant son voisin français. En effet, le nouvel accord considère que le pays déterminant l’impôt sur la succession n’est plus seulement celui du défunt, mais est également pris en considération le pays de l’héritier. La France ayant un taux d’imposition sur les successions pouvant s’élever jusqu’à 45%, l’accord s’est attiré les foudres de nombreux acteurs économiques. Ainsi, la Conférence latine des directeurs cantonaux des finances a dénoncé un accord contenant des dispositions « inacceptables ». Les politiciens romands ont été plus loin en organisant une conférence de presse où trônait un cercueil marqué « RIP – Fédéralisme et Etat de Droit ». Emmenée par Philippe Nantermod (VS, plr), cette coalition des partis de droite a, elle aussi, dénoncé la convention. Le gouvernement s’est défendu en argumentant que toute solution était préférable à un vide juridique en la matière. Le sort de cette convention s’est scellé au parlement, où sans grande surprise, la chambre du peuple a refusé d’entrer en matière par 112 voix contre 53 et 11 abstentions. Seuls les verts et les socialistes ont apporté leur soutien à l’accord. Les aspects techniques de cet objet sont traités dans la partie I, 5 (Direkte Steuern).
L’arrestation du banquier Pierre Condamin-Gerbier pour espionnage économique, soit pour avoir livré des informations sur des comptes non-déclarés aux mains de politiques français, n’a pas arrangé les relations franco-suisses. Effectuée par le ministère de la Confédération, cette arrestation a reçu le feu vert du Conseil fédéral et a ainsi mis de l’huile sur le feu entre la Suisse et la France. Les parlementaires français ont même dénoncé l’arrestation d’un « juste » par son voisin helvétique [79].
Les chambres fédérales ont adopté les accords avec la France et le CERN concernant le droit applicable aux prestataires de services actifs avec le CERN. Cet accord marque une rupture avec le principe de territorialité. En effet, il demande que l’endroit déterminant le droit à appliquer soit l’endroit où les services seront majoritairement effectués. Craignant un nivellement des salaires par le bas et partageant les préoccupations des syndicats genevois et des associations patronales genevoises, le PS s’est exprimé contre cet accord. Cette position n’a pas freiné les chambres qui ont accepté les accords par 138 voix contre 42 et 1 abstention au Conseil national et à l’unanimité au Conseil des Etats [80].
 
[77] Lib, 7.1.13.
[79] LT, 17.7.13.
[80] MCF 12.075: FF, 2013, p. 4207s.; BO CE, 2013, p. 56s., 647; BO CN, 2012, p. 708ss., 1211; voir APS 2012, p. 129.