Année politique Suisse 1970 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
Chemins de fer
Comme déjà mentionné, la politique des chemins de fer s'est spécialement engagée à harmoniser les conditions de base pour les différents moyens de transport, mais il lui a été reproché de porter préjudice à la conception globale des transports. Au premier plan figurait une
indemnisation des prestations des CFF dans la loi sur les chemins de fer de 1957, mais qui n'avait été effectuée en 1961 que sous la forme d'une élévation du capital de dotation. Grâce à l'augmentation des tarifs de 1968, les CFF ont pu produire en 1969 des comptes équilibrés, bien que le budget ait prévu un léger déficit
[52]. D'après les résultats provisoires, les comptes d'exploitation pour 1970 se sont maintenus dans les mêmes proportions que l'année précédente
[53]. Il n'a évidemment pas été possible de songer à une rémunération du capital de dotation. Le Conseil fédéral a alors proposé d'indemniser les CFF de ce manque à gagner sur la base des prix de revient dans le transport des travailleurs et des écoliers, ainsi que dans le trafic des colis de détail. Cent millions de francs. par année devraient y être consacrés provisoirement et le Conseil fédéral devrait entreprendre périodiquement des ajustements
[54]. Des critiques émanant des milieux radicaux et de l'Alliance des indépendants ont fait valoir à l'encontre de cette proposition que les prestations à payer seraient en partie supprimées et que leur calcul par les CFF était contestable. Une mise en garde a également été formulée: les autres moyens de transport et notamment les chemins de fer privés dont les prétentions à l'indemnisation sont calculées sur la base des amortissements, pourraient en effet, sur la base de la réglementation prévue, présenter de nouvelles exigences
[55]. Le Conseil national a cependant approuvé le projet en décembre, sans modification importante
[56]. Dans le budget de la Confédération pour 1971, le montant d'indemnisation proposé a été immédiatement engagé sans soulever d'opposition
[57]. Le budget des CFF prévoyait une perte sèche de 45,9 millions de francs, sans indemnisation. Vu les revendications salariales des associations du personnel, la rémunération du capital de dotation, indemnisation comprise, a été également considérée comme incertaine, si bien que l'on a déjà parlé d'une nouvelle hausse des tarifs
[58].
De nouvelles mesures de soutien furent proposées également en faveur des
chemins de fer privés. Comme les moyens alloués en 1967, sur la base de la loi sur les chemins de fer, pour favoriser l'investissement, contribuer à la reconversion des entreprises, couvrir le déficit et indemniser les dégâts naturels touchaient à leur fin, le Conseil fédéral demanda un nouveau crédit-cadre de 140 millions de francs. La couverture du déficit n'y fut cependant pas comprise; comme celui-ci apparaissait sans équivoque dans les comptes des chemins de fer, elle put désormais être incluse directement dans le budget de la Confédération. Bien qu'il ait laissé entrevoir en 1966 une disparition prochaine des exigences de l'aide à l'investissement, le Conseil fédéral donna connaissance d'une enquête de l'Office des transports, dont il ressortait que les chemins de fer privés avaient encore besoin pour les années 1971-1980 d'un capital étranger s'élevant à 706 millions de francs
[59]. Pour accroître son aide à l'investissement, il proposa dans un message particulier de faire participer la Confédération à 95 % des frais de construction, sous la Furka, d'un tunnel de base qui rendrait possible le trafic durant toute l'année sur la ligne Brigue—Andenmatt—Disentis et comblerait en grande partie le déficit d'exploitation; le nouveau tracé parut également propre à ouvrir la partie supérieure de la vallée du Rhône au tourisme et répondit en plus aux voeux des autorités militaires
[60]. Mais ce n'est pas uniquement en faveur de cette intervention particulière au profit de cantons financièrement faibles que le Conseil fédéral voulait dépasser le taux maximum de participation de 70 % prévu par la loi sur les chemins de fer; sur une requête appenzelloise, il proposa d'élever dans la loi elle-même ce taux à 85 % pour des cas d'exception
[61]. Une certaine opposition se manifesta, avant tout contre le projet du tunnel de la Furka, dont l'utilité fut mise en doute et la priorité critiquée
[62]; mais le Conseil des Etats l'approuva après y avoir apporté quelques simplifications sur les instances de sa commission
[63]. En ce qui concerne le nouveau crédit d'aide aux chemins de fer privés, c'est surtout la mise à l'écart de la couverture du déficit qui souleva de l'opposition; c'est pourquoi le Conseil des Etats la réintégra, mais sans approuver la réduction du montant global proposée par la commission
[64]. L'élévation du taux de participation qui devait être traitée d'abord par le Conseil national fut adoptée pratiquement sans opposition
[65].
Pour ce qui touche à la
construction de nouvelles lignes de transit à travers les Alpes, la commission d'experts instituée en 1963 annonça en juin qu'elle s'était prononcée en majorité pour un tunnel de base du Gotthard (Amsteg—Giornico) et l'aménagement simultané de la ligne du Lötschberg sur double voie. Elle répondait ainsi aux voeux des CFF
[66]; les représentants de la Suisse orientale, partisans d'une ligne passant par le Splügen ou par Tödi—Greina et qui se plaignaient de la composition soit-disant unilatérale de la commission, n'abandonnèrent pourtant pas la lutte
[67]. Le rapport de la commission n'était pas achevé à la fin de l'année. Dans la question de la reprise en charge du Berne—Lötschberg—Simplon (BLS) et des Chemins de fer rhétiques par la Confédération, les choses ne progressèrent pas non plus. Les Chambres fédérales renouvelèrent les concessions pour le BLS et chacune des lignes de son groupe d'exploitation jusqu'en 1978 seulement; alors que pour les Chemins de fer rhétiques, elles portèrent la prolongation à 50 ans, malgré l'opposition des Grisons
[68]. Afin de mieux relier l'aéroport zurichois au réseau ferroviaire suisse, les CFF décidèrent la construction d'une ligne à double voie, sur laquelle les trains intervilles pourraient être acheminés entre Zurich et Winterthour, sur une gare d'aéroport située à Kloten
[69]. Le conseiller fédéral Bonvin refusa par contre de présenter au Parlement un projet pour la construction d'une ligne directe à travers la vallée de la Suhr (Aarau—Sursee)
[70].
[52] Gain net: 0,9 million de francs; déficit budgétaire: 15,3 millions de francs. Cf. FF, 1970, I, p. 1219 ss. et APS, 1968, p. 89 s.
[53] NZZ (ats), 54, 3.2.71.
[54] FF, 1970, Il, p. 65 ss. Cf. aussi APS, 1969, p. 100.
[55] Bund, 201, 30.8.70; Tat, 260, 5.11.70; NZZ, 544, 22.10.70; 559, 1.12.70; 576, 10.12.70.
[57] Budget Conf., 1971, p. 77; NZZ, 564, 3.12.70; 573, 9.12.70.
[58] FF, 1970, II, p. 1187 ss. Adoption par le Parlement: NZZ, 565, 4.12.70 (CE) et 584, 15.12.70 (CN).
[59] FF, 1970, II, p. 341 ss. Cf. APS, 1966, p. 84 s., 1967, p. 87 et 1969, p. 101. Dans les 706 millions de francs sont compris 246 millions pour le dédoublement des voies sur la ligne du Lötschberg. Pour les autres travaux, il est prévu une participation fédérale d'environ 50 %.
[60] FF, 1970, I, p. 1285 ss. Cf. APS, 1969, p. 101 s. Les frais de construction ont été devisés à 80 millions de francs.
[61] FF, 1970, II, p. 518 ss. L'augmentation de l'aide devrait profiter en particulier aux Chemins de fer appenzellois. Cf. motion Broger (ccs, AI) au CN (NZZ, 735, 19.12.69; BN, 118, 20.3.70).
[62] Bund, 141, 21.6.70; NZ, 330, 22.7.70; NZZ, 398, 28.8.70; 560, 1.12.70; AZ, 288, 11.12.70.
[63] Bull. stén. CE, 1970, p. 442 ss. Les frais globaux ont été réduits à 74 millions de francs et la contribution fédérale à 70 millions. Sur les délibérations de la commission, cf. NZ, 402, 2.9.70; NZZ, 413, 6.9.70; Bund. 269, 17.11.70.
[64] NZZ, 586, 16.12.70. Le crédit global accordé s'élève à 250 millions de francs. Cf. critique, in Bund, 211, 10.9.70; wf, Dokumentation- und Pressedienst, 38, 21.9.70; Tat, 294, 15.12.70.
[65] Bull. stén. CN, 1970, p. 755 ss.
[66] NZZ, 290, 26.6.70; LITRA, Jahresbericht 1969/70, p. 50 s.
[67] Lb, 145, 26.6.70; NZZ (ats), 314, 10.7.70; 509, 30.10.70; 555, 28.11.70; Tat, 211, 8.9.70. '
[68] BLS: Délib. Ass. féd., 1970, I, p. 15 ss.; NZZ, 103, 3.3.70 (CE); 128, 18.3.70 (CN); cf. APS, 1969, p. 102. Chemins de fer rhétiques: FF, 1970, I, p. 1115 ss.; NZZ, 467, 8.10.70 (CE); 584, 15.12.70 (CN).
[69] Lb, 220, 22.9.70; NZZ, 434, 18.9.70; NZZ (ats), 520, 8.11.70.
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