Année politique Suisse 1970 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
 
Navigation
Le conflit de la navigation intérieure est entré dans une nouvelle phase. Ainsi que le conseiller fédéral Bovin l'avait convenu en 1969 avec les cantons bordiers du Haut-Rhin, de l'Aar et des lacs du pied du Jura, tous les cantons ont été invités à prendre position sur les différents rapports élaborés depuis 1965. Au rapport sur la navigation et à celui complémentaire du Conseil fédéral est venu s'ajouter, en plus de l'enquête de l'Institut Battelle élaborée à la demande de la Société Transhelvetica, l'expertise attendue depuis 1967 de trois professeurs neutres [77]. Ces derniers ont contesté l'idée avancée par l'Institut Battelle selon laquelle l'aménagement de l'Aar jusqu'aux lacs du pied du Jura permettrait un rendement social plus élevé. Ils ont par contre affirmé que les investissements qu'un tel travail exigerait ne seraient pas plus en mesure que ceux opérés dans d'autres moyens de transport, de favoriser la croissance économique. Mais comme ils pensent qu'à long terme les ports bâlois ne pourront pas supporter l'accroissement constant du trafic, ils ont recommandé une extension de la voie d'eau jusque dans la région de Zurich–Winterthour (Kaiserstuhl ou Eglisau) [78]. Certains partisans romands de la navigation ont objecté à l'expertise que l'équilibre confédéral serait remis en question si l'on pourvoyait la région de Zurich, mais non la Suisse romande, d'une voie navigable [79]. Dans leurs réponses, 19 cantons y compris tous les riverains, à l'exception de Soleure et Schaffhouse, se sont prononcés pour un aménagement du Rhin jusqu'à l'embouchure de l'Aar et quant au fond, pour une protection du tracé des cours d'eau jusqu'au lac de Constance et jusqu'aux lacs du pied du Jura, en même temps que l'on insistait toutefois sur la nécessité de prescriptions fédérales accompagnant cette ouverture. Par contre, seuls treize cantons ont pu se décider en faveur de l'aménagement des voies navigables jusqu'aux lacs mentionnés; Zurich, Berne et Argovie ne figurent pas parmi eux [80]. La nouvelle communauté d'action Aqua Viva, à laquelle sont associés principalement les milieux intéressés à la protection des eaux, a pour but de s'opposer à la navigation; elle a menacé de lancer un référendum à la fois contre une loi fédérale de protection des tracés et contre un traité avec la République fédérale de l'Allemagne relatif à la navigation sur le Haut-Rhin [81]. A la différence des précédentes prises de position de son pays, le chef du gouvernement du Bade-Wurtemberg, M. Filbinger, a rejeté un projet d'aménagement du Haut-Rhin jusqu'à l'embouchure de l'Aar, en considération de la protection des eaux du lac de Constance [82]. Le Conseil fédéral a laissé entrevoir pour le début de 1971 un rapport complémentaire final aux bons soins de la commission du Conseil des Etats [83].
Le trafic fluvial vers les ports rhénans est allé croissant et a atteint un nouveau record; sa participation au trafic global du commerce extérieur a continué cependant à diminuer [84]. L'accord conclu en 1969 avec la France et qui, grâce à un prêt, vise à éliminer le goulot d'étranglement du Rhin entre Strasbourg et Lauterburg, a reçu l'approbation des Chambres fédérales [85].
 
[77] GdL, 25, 31.1.70; JdG, 25, 31.1./1.2.70; TLM, 227, 15.8.70. Cf. APS, 1969, p. 103; en outre APS, 1965, in ASSP, 6/1966, p. 185 s., et APS, 1967, p. 91.
[78] H. BIERI, A. NYDEGGER, P.-R. ROSSET, Analyse commentée des rapports traitant des problèmes de la navigation intérieure suisse par le collège d'experts, rapport final, 1970 (multigr.).
[79] JdG, 25, 31.1./1.2.70; 169, 23.7.70; TdG, 27, 2.2.70.
[80] JdG, 269, 18.11.70; TdG, 251, 27.10.70; 270, 18.11.70; NZZ, 578, 11.12.70.
[81] Lb, 58, 12.3.70; 175, 1.8.70.
[82] Ostschw., 152, 3.7.70; NZZ, 603, 29.12.70. Cf. APS, 1966, p. 88.
[83] NZZ (ats), 83, 19.2.70; 541, 20.11.70.
[84] NZZ, 55, 3.2.71.
[85] FF, 1970, I, p. 490 ss.; Bull. stén. CE, 1970, p. 244 ss.; Bull. stén. CN, 1970, p. 570 ss. Cf. APS, 1969, p. 104.