Année politique Suisse 1970 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
Navigation aérienne
L'expansion de la navigation aérienne s'est poursuivie en 1970. Le danger accru suscité par les attentats terroristes à motivation politique ne lui a causé que très peu de tort
[86]. Les besoins croissants d'investissement ont déterminé pourtant la Swissair à une nouvelle élévation de son capital ainsi qu'à l'acceptation, pour la première fois, d'un crédit étranger
[87]. Une collaboration technique existait déjà avec les sociétés de navigation aérienne scandinave, hollandaise et une société française; vers la fin de l'année, des négociations ont été entreprises avec l'Autriche pour renforcer les liens entre la Swissair et les Austrian Airlines
[88]. A travers le développement technique et économique, le besoin d'une nouvelle réglementation juridique du trafic aérien s'est fait sentir avec une acuité croissante. Le Conseil fédéral l'a souligné nettement dans son rapport de gestion pour 1969
[89]. Le directeur de l'Office fédéral de l'air, W. Guldimann, a cité comme points essentiels la création de zones d'aéroport dotées de prescriptions particulières en ce qui concerne la construction, la limitation du bruit produit par les avions, notamment durant la nuit, la participation de la Confédération aux frais des grands aéroports, éventuellement sous forme d'établissements publics autonomes, la réglementation des questions de concessions pour le trafic de ligne et celui de navette ainsi que l'augmentation de la sécurité technique et politique
[90]. L'initiative lancée en 1969 pour inscrire dans la Constitution fédérale l'interdiction du passage du mur de son a obtenu l'appui de tous les partis gouvernementaux sans atteindre pourtant à la fin de l'année le nombre requis de signatures
[91]. Une enquête d'opinion a révélé toutefois une nette majorité favorable à l'interdiction
[92].
Dans divers cantons,
l'agrandissement ou les nouveaux aménagements des terrains d'aviation se sont heurtés à la résistance des populations touchées par le bruit ou d'autres mouvements du trafic aérien. Pour l'aménagement de l'aéroport de Kloten, le gouvernement zurichois avait proposé à la fin de 1969 un crédit de 139 millions de francs en comptant sur une subvention fédérale de 50 % à ajouter à ce montant; en même temps, il avait présenté une loi prévoyant des restrictions à la construction et des dédommagements pour les zones dites de bruit
[93]. La commission consultative du Grand Conseil a étendu le projet jusqu'à concurrence de 172 millions de francs pour le canton
[94]. L'opposition qui s'est concentrée dans l'Association pour la protection des populations riveraines de l'aéroport de Zurich, fondée en 1967, a combattu l'agrandissement prévu du système des pistes et a exigé une interdiction des vols de nuit; elle a seulement obtenu que le Grand Conseil adopte, dans la loi sur les zones de bruit, une interdiction de décoller et d'atterrir pendant au moins six heures de la nuit, mesure dont le Conseil exécutif déterminerait l'extension exacte
[95]. Une telle interdiction ne relève évidemment pas de la compétence cantonale; elle nécessite une base juridique fédérale. Malgré cette concession, l'Association a décidé le rejet du crédit d'aménagement
[96]. Une tentative de la commune de Höri préoccupée de sa survie, de mettre en échec la votation populaire cantonale par une plainte de droit public déposée auprès du Tribunal fédéral n'a obtenu aucun succès
[97]. Le crédit et la loi sur les zones de bruit ont été acceptés après une ardente campagne, particulièrement onéreuse pour les partisans
[98]. Une semblable controverse s'est élevée à Genève, où le Conseil d'Etat avait demandé un crédit de 48 millions de francs pour des bâtiments et des installations à l'aéroport de Cointrin. Ce montant devait être couvert pour un tiers par une participation fédérale
[99]. Plusieurs partis s'engagèrent ici dans l'opposition. Les premiers, les socialistes, exigèrent une distinction nette entre les travaux de rénovation indispensables et les mesures qui visaient à un agrandissement de l'aéroport, rejetant ces dernières en considération des quartiers d'habitation tout proches
[100]. Ils échouèrent cependant au Grand Conseil, malgré l'appui des communistes, et le crédit fut alloué
[101]. Les Vigilants ainsi qu'un comité interparti bénéficiant du soutien des socialistes et du Parti du Travail recoururent au référendum; ce dernier aboutit avec un nombre élevé de signatures
[102]. A Genève également, la demande d'une interdiction des vols de nuit fut exprimée
[103].
Dans le canton de Berne, les préoccupations se sont portées sur un projet d'aéroport près de Kallnach, dans le Grand Marais, qui devrait servir au trafic européen. Un rapport de la direction administrative compétente engagea la commission du Grand Conseil qui s'occupait de la question de l'aéroport depuis 1967, à charger le gouvernement de la poursuite de ce projet
[104]. Une violente opposition s'éleva parmi la population de la région concernée; elle se concrétisa dans la fondation d'une association de défense et par des manifestations
[105]. Le canton et la Banque cantonale enregistrèrent des pertes dans la compagnie charter Tellair, fondée en 1968 et mise en faillite par suite principalement de manque de capitaux
[106].
La mise en danger de la sécurité aérienne par des
attentats terroristes — il en a été parlé à propos de la politique extérieure
[107] — a causé de gros soucis aux responsables du trafic aérien. Aussitôt après la catastrophe de Würenlingen, en février, le contrôle de l'aéroport de Zurich a été renforcé
[108]; après le détournement de septembre, le Conseil fédéral a ordonné, à la demande de Swissair et en accord avec les cantons possédant un aéroport, que les avions de Swissair soient escortés par des employés armés de la sûreté fédérale et cantonale, qui reçurent une formation particulière
[109]. A partir de la fin septembre, des troupes furent mobilisées pour la surveillance des aéroports de Kloten et Cointrin
[110]. De plus, le Conseil fédéral adopta une requête parlementaire en faveur de l'adjonction au code pénal de sévères sanctions contre les atteintes à l'aviation civile et les entraves à la circulation aérienne
[111].
[86] NZZ (ats), 501, 28.10.70; NZZ, 171, 15.4.71.
[87] Cf. APS, 1969, p. 104; JdG. 92, 22.4.70; 95, 25./26.4.70; NZZ, 593, 21.12.70.
[88] NZZ, 598, 29.12.70; cf. aussi GdL, 95, 25./26.4.70.
[89] Rapp. gest., 1969, p. 220 s.
[90] Tat, 251, 26.10.70; NZZ, 548, 24.11.70.
[91] NZZ (ats), 573, 9.12.70. Prises de position des partis: cf. NZZ (ats), 331, 20.7.70 (PCCS); NZZ, 394; 26.8.70 (PRDS); NBZ, 201, 29./30.8.70 (PAB); Tw. 249, 24./25.10.70 (PSS). Cf. aussi APS, 1969, p. 105.
[93] NZZ, 24, 16.1.70; Lb, 12, 16.1.70; cf. APS, 1969, p. 104 et 156 s. On espère joindre au crédit cantonal une subvention fédérale de 59 millions de francs.
[95] NZZ, 23, 15.1.70; 42, 27.1.70; 162, 9.4.70; 284 et 285, 23.6.70; 296, 30.6.70; 308 et 309, 7.7.70; 320, 14.7.70; NZ, 135, 23.3.70.
[97] NZZ (ats), 401, 30.8.70; NZZ, 406, 2.9.70. La plainte a été refusée (NZZ, 599, 24.12.70).
[98] Adoption du crédit, par 103.867 voix contre 64.152; de la loi sur la lutte contre le bruit par 134.501 voix contre 32.590 (NZZ, 450, 28.9.70). Sur la campagne, cf. en particulier les journaux suivants : NZZ, NZN, Tat et AZ du 18 au 26.9.70 (articles et annonces). Tous les grands partis ont recommandé l'adoption (Tat, 210, 7.9.70; Lb, 211, 11.9.70; AZ, 212, 14.9.70; NZZ, 429, 15.9.70; NZN, 217, 17.9.70; NBZ, 217, 17.9.70).
[99] 15 millions seraient assurés par la Confédération (JdG, 119, 26.5.70; TdG, 120, 26.5.70).
[100] TdG, 228, 30.9.70; PS, 235, 14.10.70; 238, 17.10.70.
[101] TdG, 262, 9.11.70; JdG. 261, 9.11.70.
[102] TdG, 268, 16.11.70; 269, 17.11.70; JdG, 268, 17.11.70; 292, 15.12.70; 304, 30.12.70; VO, 264, 17.11.70. Le nombre des signatures s'est élevé à 15.811. Le crédit a été voté de justesse par le peuple le 7.2.71 (TdG, 31, 8.2.71).
[103] TdG, 259, 5.11.70; JdG. 272, 21./22.11.70; VO, 270, 1.12.70.
[104] Bund, 50, 2.3.70; 63, 17.3.70; 64, 18.3.70. Cf. APS, 1967, p. 93.
[105] Bund, 220, 21.9.70; TdG, 243, 17./18.10.70; Tat, 302, 24.12.70.
[106] NZ, 255, 9.6.70; 545, 25.11.70; Bund, 276, 25.11.70. Cf. APS, 1968, p. 95.
[107] Cf. supra, p. 42 s.
[109] TdG, 215, 15.9.70; NZZ, 430, 16.9.70; NZ, 425, 16.9.70; JdG, 215, 16.9.70.
[111] Motion Bärlocher (ccs, SG), adoptée par le CN le 8.10. (Bull. stén. CN, p. 667 ss.), et par le CE le 15.12. (NZZ, 586, 16.12.70).
Copyright 2014 by Année politique suisse
Ce texte a été scanné à partir de la version papier et peut par conséquent contenir des erreurs.