Année politique Suisse 1973 : Partis, associations et groupes d'interêt / Partis
 
Système des partis
Les efforts tendant à revaloriser les partis ont été poursuivis en 1973. Le débat s'est concentré autour du projet officiel prévoyant l'inclusion des partis dans la Constitution fédérale. Donnant suite à l'annonce faite en 1972 par le Conseil fédéral dans ses Grandes lignes de la politique gouvernementale, le DFJP a soumis en avril aux partis et cantons un avant-projet se fondant sur une consultation faite en 1971 ; il reconnaissait la liberté de fonder un parti, la participation des partis suisses à la formation de la volonté populaire ainsi que le droit d'être consultés dans la procédure préparlementaire et donnait la compétence à la Confédération de subventionner les partis. Il s'agissait par là de prévenir notamment un noyautage des partis par des groupes d'intérêts économiques [1].
Le résultat de la consultation fut ambigu. Le PDC qui, dans son programme de 1971 déjà avait formulé des revendications dans le sens d'un subventionnement des partis n'obtint un appui que de la part du PSS, de l'UDC et du Parti évangélique populaire ; les autres partis ne se prononcèrent que pour un soutien indirect (indemnisation pour frais d'expédition ou d'imprimerie, notamment à l'occasion d'élections ou de votations), à l'exception des libéraux-démocrates qui se montrèrent opposés à toute forme d'encouragement par l'Etat. La réponse des cantons fut tout aussi disparate et encore moins positive [2]. On reprochait au système des subsides directs de détacher davantage encore les électeurs des partis et de contenir le danger d'une dépendance à l'égard de dEtat. Des questions relatives à la clef de répartition et aux comptes à rendre publiquement furent également soulevées [3].
Parallèlement à la consultation sur l'article concernant les partis, les Chambres fédérales délibérèrent de la hausse des subventions aux groupes parlementaires. La conférence des présidents de groupes proposa, sous forme d'une initiative parlementaire, de doubler les montants décidés en 1971. Les porte-parole des radicaux, des indépendants et du groupe libéral et évangélique s'exprimèrent contre une augmentation aussi rapide à une époque de tension financière ; on se référa aussi aux efforts tendant à un subventionnement direct des partis. Le projet, conçu comme un moyen de renforcer le parlement de milices envers l'exécutif, fut adopté cependant dans les deux conseils [4]. Sur le plan cantonal, des subsides aux groupes furent introduits en Valais, où une base législative existait depuis 1972. Une tentative analogue à Bâle-Ville échoua par contre lors du référendum facultatif ; les citoyens, dans une proportion de plus de 5 contre 1, rejetèrent l'innovation [5].
La collaboration entre les quatre partis gouvernementaux, appelée à renforcer non seulement le gouvernement mais aussi les partis qui le forment — et dont les principes sont consignés depuis 1972 dans une convention concernant. les buts de la législature — n'a pas été sans mal. Durant l'été, l'UDC se plaignit que la convention ne portait guère de fruits et réclama un bilan intermédiaire. Les secrétariats des partis entreprirent des travaux préalables dans ce sens [6]. Après les élections au Conseil fédéral de décembre, ce fut au tour du secrétaire général du PDC, U. Reinhardt, de parler d'une crise de la coalition, celle-ci n'ayant pas cherché à s'entendre sur les candidats présentés ; il constata une décomposition progressive des groupes et mit en garde contre le danger d'une disparition de la formule magique. Ce cri d'alarme ne resta d'ailleurs pas sans réplique [7].
Dans certains cantons romands, la tendance à regrouper les partis en un camp bourgeois et un camp de la gauche s'est renforcée, non seulement en raison de l'accentuation des oppositions entre eux mais encore par suite de l'apparition de nouvelles formations de droite. A Genève et en Pays de Vaud, le PS et le PdT/ POP ont fait des déclarations communes sur une collaboration qui doit notamment concerner la redistribution du produit national et l'opposition aux restrictions apportées à la liberté d'expression politique [8]. Néanmoins, lors des élections au Grand Conseil genevois, on n'assista pas à un apparentement des listes entre les deux partis et l'entente ne fut que partielle lors des élections communales vaudoises [9]. Dans le canton de Vaud, d'autre part, les radicaux, les libéraux, les agrariens et les démocrates-chrétiens — suivant en cela l'exemple genevois — formèrent une Entente vaudoise et élaborèrent un programme fondamental très diversifié [10].
 
[1] Bund, 95, 25.4.73 ; TLM, 115, 25.4.73. Cf. APS, 1971, p. 177 ; 1972, p. 164, note 10.
[2] Résultat de la consultation : Bund, 248, 23.10.73 ; TG, 247, 23.10.73 ; TLM, 296, 23.10.73 ; Union libérale-démocratique suisse, Bulletin d'information, 51 (1973), p. 17 s. Cf. en outre NZ, 69, 3.3.73 ; PDC, Programme d'action 71, p. 12 s.
[3] Cf. aussi Ww, 18, 2.5.73 ; TG, 250, 26.10.73 ; Lib., 47, 24/25.11.73.
[4] FF, 1973, I, no 22, p. 1430 ss. ; BO CN, 1973, p. 823 ss. ; BO CE, 1973, p. 510 ss. Cf. APS, 1971, p. 22.
[5] Valais : TLM, 39, 8.2.73 ; APS, 1972, p. 146. Bâle-Ville : BN, 260, 5.11.73 et supra, p. 143. Cf. aussi TLM, 13, 13.1.73.
[6] Bund, 155, 6.7.73 ; Ww, 32, 8.8.73 ; TA, 208, 8.9.73. Cf. APS, 1972, p. 20.
[7] NZZ, 12, 9.1.74 ; cf. aussi Vat., 302, 31.12.73.
[8] Genève : TG, 121, 25.5.73 ; Vaud : VO, 142, 23.6.73.
[9] TLM, 298, 25.10.73 ; 299, 26.10.73. Pour les élections au Conseil d'Etat, le PS et le PdT présentèrent une liste commune ; cf. supra, p. 30.
[10] Forum libéral, 1973, nos 8 et 9 ; 1974, no 1 ; BN, 248, 22.10.73. Sur l'Entente nationale à Genève, cf. Michel Baettig, Radiographie des 7 partis politiques genevois (tiré à part du JdG), Genève 1973, p. 35 s., 60 s.