Année politique Suisse 1974 : Partis, associations et groupes d'interêt / Partis
 
Parti socialiste
Parmi les partis gouvernementaux, c'est le Parti socialiste (PSS) qui a fait éclater le plus nettement ses tensions internes. Lors du congrès de Lucerne, le comité connut trois défaites. En dépit d'une proposition contraire, un représentant des jeunes socialistes a été nommé au comité directeur, cela après un intervalle de deux ans. Ensuite le rapport d'une commission sur les structures de commandement et la discipline de l'armée (« Innere Führung »), qui avait reçu l'approbation du comité directeur, a été rejeté. Lors du congrès de 1972, on n'avait pas réussi à s'entendre, mais cette fois-ci ce fut un contre-projet qui l'a emporté. Emanant des milieux zurichois, il exige une participation très prononcée des soldats. Enfin, les délégués ont approuvé une série de thèses, proposées par la commission, mais rejetées par le comité, concernant une nouvelle initiative sur le droit foncier, l'élément principal de cette initiative, la distinction du droit de disposition et du droit de jouissance, n'a toutefois pas été déclaré obligatoire [6]. Par la suite, diverses voix se sont fait entendre au sein du parti, voix contestant la représentativité du congrès de Lucerne, auquel seulement un tiers des sections locales s'était fait représenter. La section de Berne-Ville a tenté au lendemain du congrès d'en appeler aux membres et a pris l'initiative de demander un vote de la base contre la décision concernant l'armée ; elle ne parvint cependant pas à mobiliser les appuis nécessaires dans le délai imparti [7]. A Zurich, les rapports entre diverses tendances sont demeurés tendus ; vers la fin de l'année, F. Schumacher, de la tendance d'extrême-gauche, a été exclu du groupe parlementaire cantonal, pour n'avoir pas respecté la discipline de ce dernier [8].
Le président du parti, Arthur Schmid, qui passe pour modéré, mais qui a été battu lors de l'élection au Conseil fédéral en 1973, a proclamé lors du Congrès la reconnaissance sans réserve par le PSS du nouveau conseiller fédéral socialiste W. Ritschard. Il a été confirmé à son siège présidentiel, mais a démissionné pour l'année 1975 ; le comité a désigné, en automne, le conseiller national H. Hubacher (BS) pour lui succéder [9]. Le conseiller fédéral Ritschard a manifesté son intérêt pour l'unité du parti en jouant avec succès le rôle d'intermédiaire entre le comité directeur et les jeunes socialistes, dont on ne voulait pas reconnaître les statuts. Les jeunes socialistes ont souligné, sur le plan cantonal notamment, leur position propre, plaidant à plus d'une reprise pour une collaboration avec les partis d'extrême-gauche [10].
Des tensions apparurent également au sujet du problème des étrangers. L'initiative de l'Action nationale a été rejetée par les instances du parti, mais elle connut un certain succès auprès d'une partie des travailleurs, comme ce fut déjà le cas en 1970 avec l'initiative Schwarzenbach. Pour tenter de faire pièce à cette tendance, le quotidien socialiste « Tagwacht » a lancé l'idée d'une initiative comprenant une diminution des étrangers, mais sans mesures d'expulsion. D'autre part, certains milieux socialistes ont manifesté de l'intérêt pour l'initiative des travailleurs catholiques (KAB), qui met l'accent sur l'intégration des étrangers. La direction du parti s'est vu obligée dans cette situation de démarquer davantage sa position : elle a chargé des groupes de travail d'élaborer une conception qui doit combiner stabilisation et humanisation [11]. En outre, elle a conclu avec la fédération suisse du Parti socialiste italien un accord de collaboration et a garanti, en principe, le droit aux représentants des organisations d'étrangers socialistes d'assister en observateurs aux séances du comité du parti [12].
 
[6] Secrétariat central du PS suisse, Congrès 74, Procès-verbal des décisions; AZ, 121, 27.5.74 ; NZZ, 240 et 241, 27.5.74 ; VO, 119, 27.5.74. Cf. APS, 1972, p. 49 et supra, part. I, 3 et 6 c.
[7] Cf. BN, 149, 29.6.74 ; Ldb, 149, 2.7.74.
[8] TA, 281, 3.12.74 ; NZ, 401, 23.12.74. Cf. aussi R. Lienhard, « Zürich : SP vor der Wahl », in Profil, 1974, p. 42 ss.
[9] Désignation du CN Hubacher : NZZ (ats), 488, 11.11.74 ; NZ, 356, 14.11.74.
[10] Médiation du CF Ritschard : Infrarot, 1974, no 15, p. 18 et communication de la part du comité directeur. Extrême-gauche : TLM, 32, 1.2.74 ; Bund, 282, 2.12.74.
[11] Tw, 146, 27.6.74 ; 231/232, 4/5.10.74 ; 258, 5.11.74. Sur l'attitude des ouvriers à l'égard des initiatives contre l'emprise étrangère, cf. APS, 1970, p. 131 s. et supra, part. 1, 7.
[12] NZZ (ats), 98, 28.2.74. Observateurs étrangers : communication de la part du comité directeur.