Année politique Suisse 1974 : Eléments du système politique / Droits, ordre public et juridique / Droit pénal
L'entraide judiciaire internationale en matière pénale fut évoquée à deux occasions : d'une part, lorsque le Conseil fédéral a soumis aux Chambres l'accord signé en 1973 avec les Etats-Unis ; de l'autre, lorsque dès cette année-là, le DFJP a ouvert la consultation sur une base légale générale pour de tels accords. Le
traité conclu avec les Etats-Unis cherche à concilier les systèmes juridiques du monde anglo-saxon et de l'Europe continentale. Le premier permet à une instance pénale étrangère d'entrer en contact direct avec les autorités et les personnes privées lorsqu'il s'agit de se procurer des informations et des preuves, alors que le second fait dépendre toute entraide judiciaire d'une base légale du droit national. Ce traité — le premier du genre conclu par les Etats-Unis — autorise jusqu'à un certain point l'application des règles de procédure de l'Etat requérant dans le pays auquel s'adresse la demande, dans certains cas en présence même d'une personnalité officielle de l'Etat en question. Des délits touchant aux domaines militaire et politique ou relevant du droit cartellaire et des trusts en sont exclus ; cependant, la Suisse a accepté, pour certains cas bien précis, d'englober les délits fiscaux et de lever, dans une certaine mesure, le secret bancaire envers l'étranger lorsqu'il s'agit de « crime organisé ». Une clause de sauvegarde, en revanche, permet de refuser l'entraide judiciaire lorsque des intérêts nationaux essentiels sont en jeu. L'intervention qui en découle, sensible pour le système judiciaire fédéraliste suisse, a rendu nécessaire l'inhabituelle élaboration d'une loi spéciale dans laquelle sont réglées les compétences des organes suisses concernés et qui comprend notamment la création d'une commission d'experts appelée à conseiller le DFJP dans l'application de la clause de sauvegarde
[23].
Le Conseil national a approuvé, sans sérieuse opposition, ce traité dont la préparation exigea plusieurs années de travaux et à l'élaboration duquel les milieux économiques participèrent. En revanche — en dépit de l'opposition socialiste — il a modifié la loi spéciale en renforçant la commission consultative, appelée à devenir selon lui un organe permanent sous la présidence d'un juge fédéral.
L'avant-projet d'une loi générale d'entraide judiciaire a soulevé nombre de critiques ; dans les milieux industriels et bancaires, on a fait remarquer que la Suisse va trop loin dans sa volonté de coopération
[24].
[23] Traité : FF, 1974, II, no 39, p. 582 ss. ; cf. APS, 1973, p. 65 et infra, part. I, 2 et 4b. Loi spéciale : FF, 1974, II, no 39, p. 632 ss.
[24] Conseil national : BO CN, 1974, p. 1885 ss. Loi générale : GdL (ats), 71, 26.3.74 ; NZZ (ats), 143,,26.3.74 ; cf. aussi APS, 1973, p. 17.
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