Année politique Suisse 1975 : Eléments du système politique / Elections / Elections fédérales
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Lutte électorale
La lutte électorale pour le Conseil national a été considérée en général comme peu animée, notamment en Suisse alémanique [17]. Les programmes des principaux partis ne pouvaient l'aviver. Le PS a surtout cherché à se mettre en évidence par une campagne contre la motion Brunner (prd, ZG), déposée en été et préconisant un nouveau mode de financement de l'AVS. Cette motion, signée par nombre de radicaux et de représentants d'autres partis bourgeois, y compris des indépendants, mais par aucun socialiste, fut qualifiée d'attaque contre cette populaire institution sociale [18]. Les campagnes étaient plus vives dans les cantons où des sièges aux Etats étaient en jeu [19]. Adolf Muschg, écrivain, professeur de littérature et candidat socialiste zurichois aux Etats, imprima un style particulier aux débats qui l'opposaient, ainsi que le membre de l'Action nationale, le conseiller national H. Müller, aux deux députés sortants, Honegger (prd) et Heimann (adi). Contrairement aux praticiens de la politique, il mit l'accent sur une critique fondamentale de l'ordre social et évita de prendre ses distances à l'égard de l'extrême-gauche ; cette omission fournit à ses adversaires un argument de poids à Zurich, où la situation était différente de celle des cantons de Genève et Vaud [20]. Dans divers cantons, la campagne prit un tour distrayant : promenades sous conduite, excursions en car, fêtes et spectacles de cabaret établissaient le contact entre candidats et électeurs [21]. Les radicaux de Soleure et Zurich, afin d'améliorer leur image, répondaient à des préoccupations plus graves en instituant un service de conseils aux sans-travail [22]. Dans les cantons alémaniques les plus importants, la propagande individuelle à coups d'imprimés et d'annonces connut un nouveau succès [23]. La récession ne semble guère avoir eu de répercussion sur les budgets électoraux des partis, associations et candidats. Une proposition discrète de l'Alliance des indépendants, tendant à une limitation d'un commun accord des frais électoraux, ne rencontra un accueil favorable qu'auprès des petits partis [24].
Les autorités et les « mass media » s'efforçaient d'informer au mieux les électeurs. La Chancellerie fédérale, comme en 1971, présentait dans une brochure gratuite, les aspects juridiques et techniques des élections ; vu la forte demande, il a fallu rééditer la version allemande [25]. Nombre de journaux exposaient les programmes électoraux ou cédaient la parole aux représentants des divers partis [26] ; certains commentaient l'activité du parlement sortant ou la situation électorale dans l'ensemble des cantons [27]. Par des tables rondes ou des interviews incisives, radio et TV tentaient d'amener les candidats à s'exprimer aussi sur des questions que les partis avaient laissées à l'arrière-plan [28]. Le temps d'antenne reservé aux partis était fonction de la force électorale de chacun d'entre eux, ce qui amena des protestations et des recours de la part de groupements modestes [29]. La Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR) décréta d'autre part que les collaborateurs de ses programmes se présentant aux élections ne pouvaient passer sur les ondes durant la campagne, ni continuer d'assumer leur fonction antérieure en cas d'élection ; cet ordre a suscité des objections [30].
 
[17] BZ, 244, 18.10.75 ; NZ, 330, 23.10.75 ; NZZ, 247, 24.10.75. Suisse romande : BN, 247, 23.10.75 ; JdG, 251, 28.10.75.
[18] Cf. infra, part. I, 7c (Assurance-vieillesse et survivants).
[19] ZH, SZ, FR, BL, SH, TI, VD, VS, NE et GE.
[20] NZZ, 233, 8.10.75 ; 241, 17.10.75 ; Ldb, 235, 11.10.75 ; Tw, 240. 14.10.75 ; TA, 249, 27.10.75. La candidature de Muschg fut proposé contre l'avis du comité du PS zurichois (TA, 136, 16.6.75). Cf. aussi son interview dans l'hebdomadaire du PdT Vorwärts (42, 16.10.75) et la réaction du PRD zurichois (Ldb, 246, 24.10.75).
[21] Exemples : Promenades du PDC lucernois (Vat., 233, 8.10.75), excursions en car du PRD zurichois et fête socialiste à Zurich (TA, 235, 10.10.75), cabaret des candidats radicaux bernois (Bund, 240, 14.10.75).
[22] NZZ, 215, 17.9.75.
[23] Bund, 244, 19.10.75 ; Vat., 247, 24.10.75. Romandie : BN, 247, 23.10.75.
[24] Selon un sondage effectué par l'Agence télégraphique suisse, les partis ont dépensé plus de 8 millions de francs (PS 1,4 million, PRD 1,6 à 2 millions, PDC 1,4 million, UDC 800 000, Ad! 1,2 million, Libéraux 250 000, PdT 200 000, MNA 270 000, AN 155 000, PEP — publicité personnelle incluse — 320 000). D'autre part, on estima le coût de la propagande privée à 2 millions de francs (NZZ, sda, 299, 24.12:75). Initiative de l'AdI : Tat, 232, 3.10.75.
[25] Les élections au Conseil national, Berne 1975. Première édition : 80 000 exemplaires allemands, 30 000 français, 10 000 italiens. En 1971, la brochure fut distribuée à tous les ménages (Information de la Chancellerie fédérale).
[26] Cf. NZ, 291, 18.9.75 et ss. ; Tat, 232, 3.10.75 et ss. ; TG, 238, 13.10.75 et ss. ; BN, 240, 15.10.75 et ss.
[27] Cf. TA, 209, 10.9.75 et ss. ; NZ, 289, 16.9.75 ; BN, 231, 4.10.75 ; JdG, 232, 6.10.75 et ss.
[28] NZZ, 234, 9.10.75 ; 239, 15.10.75 ; 24 Heures, 235, 10.10.75.
[29] TA, 83, 11.4.75 ; NZ, 251, 14.8.75 ; 24 Heures, 244, 21.10.75.
[30] 24 Heures (ats), 153, 4.7.75 ; TA, 163, 17.7.75 ; NZZ (sda), 205, 5.9.75. Deux collaborateurs de la radio, Salzmann (adi, BE, sortant) et Blum (ps, BE) furent élus ; ils restent pourtant au service de la SSR (Information de la SSR) ; cf. LNN, 263, 12.11.75.