Année politique Suisse 1975 : Eléments du système politique / Elections / Elections fédérales
Le résultat des élections au Conseil national du 26 octobre a confirmé deux prévisions souvent avancées pendant la campagne : le
renforcement, d'une part, de la position
des partis gouvernementaux face aux partis plus petits,
et, d'autre part,
de la gauche par rapport aux formations plus à droite. L'incertitude planant sur l'avenir économique a diminué l'attrait de formations d'opposition, tendance qui avait marqué les élections de 1967 et 1971 ; les modestes succès de la nouvelle gauche ne changent rien à cet état de fait. Le résultat cependant ne saurait être interprété comme un vote de confiance indiscutable en faveur des partis gouvernementaux. Parmi ces derniers, seuls les socialistes ont réussi à élargir effectivement leur électorat dans l'ensemble du pays ; l'augmentation des parts du PRD et du PDC n'est qu'une conséquence de l'abstentionnisme accru, alors que l'UDC voyait même sa part diminuer. Les grands perdants ont été l'Alliance des indépendants, les républicains et l'Action nationale. Alors que le pourcentage des voix allant à l'ensemble des partis de gauche (PS, PdT et nouvelle gauche) passait de 25,9 à 29,0 %, la part globale de tous les groupes de la nouvelle droite (y compris Union démocratique fédérale, Ligue pour la protection de l'environnement et de la qualité de vie et Vigilance) tombait de 7,7 à 5,9 %
[32]. L'évolution a été cependant fort diverse dans les cantons pris séparément. De tous les grands partis, les socialistes obtiennent le résultat le plus homogène ; leur pourcentage s'est accru dans presque tous les cantons
[33]. Le PRD a progressé dans la plupart des cantons alémaniques, reculant cependant dans toute la Suisse romande. Les démocrates grisons, affiliés à l'UDC, ont subi des revers particulièrement sensibles.
Ces transferts dans la répartition des électeurs par partis ont été moins prononcés que lors des deux années électorales précédentes ; même le succès des socialistes n'a pu compenser leur défaite de 1967
[34]. Favorisé par les aléas de la proportionnelle, le PS a néanmoins gagné 9 sièges, changement que l'on n'avait plus vu depuis 1943. Pour le reste, seuls le PDC (2) et le Partito socialista autonomo (PSA) (1) ont gagné des sièges. Le PRD, en dépit de l'accroissement de sa part d'électeurs, en a cédé deux. Des partis non représentés au gouvernement, l'Alliance des indépendants et les libéraux sont les seuls à avoir réuni assez de mandats pour pouvoir constituer un groupe parlementaire. Le nombre total de sièges des partis de la nouvelle droite est tombé de 11 à 6. Leurs divergences de vues étaient trop grandes pour qu'une collaboration puisse se réaliser au parlement. Le PdT en revanche a pu conserver son groupe grâce à l'adhésion du représentant du PSA
[35]. Pour la première fois depuis l'introduction de la proportionnelle, l'ensemble des partis de gauche occupe le 30 % des sièges du Conseil.
La
représentation féminine s'est accrue. Aux 10 élues de 1971 sont venues se . joindre quatre « viennent-ensuite » en cours de législature. Si trois candidates sortantes n'ont pas été réélues, quatre nouvelles les ont remplacées, si bien qu'elles se retrouvent finalement à quinze. Elles continuent de se répartir assez équitablement entre les trois partis les plus importants ; Zurich domine encore plus qu'auparavant parmi les cantons, alors que les Bernoises, une fois de plus, restèrent sans succès
[36].
Dans l'ensemble, 18 conseillers sortants n'ont pas été confirmés (1971 : 19 ; 1967: 10). En raison du plus petit nombre de démissions, le Conseil s'est renouvelé dans une moindre mesure que quatre années plus tôt : de 25,5 % seulement (1971 : 34 % ; 1967: 22,5 %). Si l'on tient compte du départ de conseillers nationaux en cours de législature, le taux de renouvellement à l'issue des élections de 1975 se monte à 31,5 % (1971 : 40 % ; 1967: 34 %)
[37]. La défaite la plus remarquable a été celle de l'industriel radical zougois Brunner, victime de sa motion sur l’AVS ; il perdit son siège au profit d'un socialiste. Le député indépendant J. Bächtold (BE), un défenseur de la nature, dut son élimination à la perte d'un mandat par son parti. Le conseiller exécutif bernois Köhler, qui avait présidé le National en 1974/75, échouait en raison de la partition régionale de la liste radicale jurassienne. Sept anciens (1971 : 6) ont été relayés par des candidats de leur propre liste. Trois membres du Conseil, portés en 1975 sur une autre liste qu'en 1971, ont perdu leur siège
[38]. Le renouvellement moins prononcé de la chambre trouve son expression dans l'âge moyen de ses membres : avec 52 ans il est à nouveau un peu supérieur à celui de 1971 (51). Sa composition professionnelle n'a pas subi de modifications sensibles
[39].
[32] Prévisions avancées : TLM, 281, 8.10.75 ; TG, 236, 10.10.75. Cf. aussi supra, note 2. Pour les résultats effectifs, cf. Elections au Conseil national 1975, Premier aperçu ; FF, 1975, II, no 48, p. 1941 ss. ainsi que la presse à partir du 27.10.75. Electeurs des partis gouvernementaux en chiffres absolus : PSS 480 400 (+ 28 632), PRDS 428 921 (+ 832), PDC 407 288 (- 590), UDC 192 053 (- 25 831). Cf. aussi APS, 1967, p. 24 s. ; 1971, p. 36 ss.
[33] Dans le canton de SH, le seul à voir diminuer le taux du PS, le double de ses pertes fut gagné par le POCH.
[34] Le PSS recula alors de 26,6 à 23,5 % (Elections au Conseil national 1967, Berne 1968, p. 123).
[35] Nouvelle droite : Vat., 267, 17.11.75. L'AN imputa l'échec des discussions entre les deux groupements à l'intransigeance de J. Schwarzenbach. PdT et PSA : VO, 270, 21.11.75.
[36] PS 5 (1971 : 3), PDC 5 (3), PRD 4 (3), Libéraux 1 (—), PdT — (1). Les seuls cantons comptant plus d'une députée furent à nouveau : ZH 5 (3), SG 2 (2). Hanna Sahlfeld (ps, SG), épouse d'un pasteur allemand, démissionna un mois après sa réélection pour suivre son mari qui, ayant des difficultés professionnelles imputées en partie au mandat de sa femme, accepta un poste dans son pays (24 Heures, 283, 5.12.75).
[37] Ces chiffres apportent quelques corrections à ceux de l'APS 1971 (p. 39).
[38] A. Rasser (adi, AG), n'étant plus présenté par son parti, fit acte de candidature au Team 67 (TA, 43, 21.2.75 ; LNN, 154, 7.7.75), G. Breny (an, VD), résidant à Berne, eut des contacts sans succès dans son canton de domicile et finit par figurer sur la liste des dissidents républicains vaudois (24 Heures, 97, 28.4.75 ; 163, 15.7.75 ; 201, 30.8.75 ; 209, 9.9.75). W. Naegeli, dissident républicain thurgovien, fut présenté par l'Union démocratique fédérale de ZH. Sur les listes radicales jurassiennes, cf. supra, part. I, le (Question jurassienne).
[39] Cf. H. Stark, Steckbriefe der 200 Nationalräte, tirés à part du Bund, 1971 et 1975.
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