Année politique Suisse 1976 : Economie / Agriculture
 
Economie laitière
Les mécanismes de la régulation des ventes ont surtout été mis à l'épreuve par l'économie laitière [23]. Malgré les avertissements du directeur de la Division de l'agriculture, et alors que le compte laitier se soldait par un dépassement budgétaire de 50 millions de francs, la production laitière n'a cessé de croître, dépassant de 1,3 million de q la quantité de base admise (1974/75) [24]. En conséquence, le Conseil fédéral décida d'augmenter, dès le ler avril, la retenue sur le lait de 1,5 centime, soit de moitié, menaçant par la suite les agriculteurs d'introduire le contingentement laitier par voie d'urgence, une nouvelle surproduction devenant prévisible [25].
Cette mesure allait, dans un premier temps, entraîner de nombreuses protestations des organisations paysannes professionnelles et politiques [26]. Elle amena ensuite l'UPS à mettre sur pied plusieurs manifestations dont certaines provoquèrent l'intervention de la force publique [27]. Les sections romandes de l'UDC-PAI prièrent instamment l'exécutif de revenir sur sa décision, en vain cependant [28].
Bien que se refusant à introduire le contingentement par voie d'urgence, le gouvernement envisage, dans son nouveau projet d'arrêté sur l'économie laitière, son introduction et son renforcement. D'une part en demandant de pouvoir instituer un contingentement par exploitation et d'autre part en supprimant l'échelonnement de la retenue sur le lait [29]. La proposition de l'Union centrale des producteurs de lait de mise en place d'un rationnement par coupons du fourrage importé n'a pas été retenue, alors que celle du conseiller national P. Eisenring (pdc, ZH), la production sous contrat, pourrait s'appliquer à long terme [30]. Les réactions des organisations paysannes, mise à part l'UPS, semblent indiquer qu'elles n'ont pas d'autres solutions possibles que d'accepter, même si les réticences sont réelles, ce nouveau développement du dirigisme [31].
Le projet gouvernemental comporte également un train de mesures complémentaires qui visent une orientation de la production sur une base fourragère indigène, recherchant ainsi une adaptation de la production de lait et de viande à la capacité d'absorption du marché. Aux moyens actuels (limitation des importations, perception de suppléments de prix à la frontière, primes de cultures) viendraient s'ajouter l'obligation de prise en charge, par les importateurs, de fourrages produits dans le pays, ainsi que l'octroi de subsides aux détenteurs d'animaux (engraisseurs, aviculteurs) en fonction inverse de la dimension de leur cheptel [32]. Par là, l'exécutif rejoint les préoccupations exprimées dans les motions Thévoz (lib., VD) et Junod (prd, VD), transmises toutes deux comme postulats [33].
Dans le même domaine, les Chambres ont approuvé au printemps la modification de la loi sur le blé, qui introduit un subside à la surface pour les exploitations situées dans les régions où les conditions d'exploitation sont difficiles [34].
 
[23] D'autres interventions ont été faites pour vendre à prix réduit de la poudre de lait écrémé et du jus de raisin. La Confédération est également intervenue pour maintenir les prix sur le marché du bétail, à la suite de la sécheresse (Rapp. gest., 1976, p. 248 ss.).
[24] Lib. (ats), 146, 25.3.76 ; 24 heures, 71, 25.3.76. Avertissement : TA (ddp), 44, 23.2.76. Cf. également la réponse du CF à la question ordinaire Rüttimann (pdc; AG) : BO CN, 1976, p. 406. Pour 1975/76, le dépassement s'est élevé à 1,8 million de q.
[25] RO, 1976, p. 749 s. ; TLM (ats), 171, 19.6.76 ; 24 heures, 141, 19.6.76.
[26] Voir la presse durant la dernière semaine du mois de mars.
[27] 24 heures, 80, 5.4.76 ; TLM (ats), 115, 24.4.76 ; 125, 4.5.76 ; 126, 5.5.76 ; 127, 6.5.76 ; 132, 11.5.76.
[28] TLM, 130, 9.5.76.
[29] FF, 1977, I, p. 77 ss.
[30] Union centrale : NZZ, 86, 12.4.76 ; 24 heures, 95, 24.4.76. CN Eisenring : cf. sa motion, transmise comme postulat (BO CN, 1976, p. 505 s.) ainsi que son article in BüZ, 117, 19.5.76. Une même méthode a été préconisée par le gouvernement fribourgeois (Vat., 19, 24.1.76).
[31] Cf. les réactions de l’USP (Ostschw., 249, 23.10.76), de l'Union centrale des producteurs de lait (24 heures, 253, 29.10.76) et de l'UDC (LNN, 217, 17.9.76). L'UPS a pour sa part refusé le contingentement individuel (Vat., 280, 30.11.76).
[32] FF, 1977, 1, p. 181 ss.
[33] BO CN, 1976, p. 1348 ss.
[34] BO CE, 1976, p. 47 ss. et 107 ; BO CN, 1976, p. 234. Cf. APS, 1975, p. 96.