Année politique Suisse 1976 : Enseignement, culture et médias / Médias
 
Presse
La concentration de la presse en Suisse s'est accentuée [3] : dans le canton de Berne, la « Berner Zeitung » (journal rural hors partis, ancien « Emmenthaler Blatt ») et les « Tages-Nachrichten » ont fusionné le ler janvier 1977 : les « Berner Nachrichten » sont ainsi devenues le journal à plus fort tirage du canton de Berne. L'appel à la tête du journal d'Hermann Battaglia, chef de presse de la Direction générale des PTT et ancien collaborateur de journaux socialistes, a provoqué un étonnement de part et d'autre. Alors que cette fusion était soigneusement préparée, la fondation de la « Basler Zeitung » a créé la surprise, voire la consternation. Ce quotidien est né de la fusion, le 10 février 1977, de la « National-Zeitung », de tendance de gauche libérale assez prononcée il y a quelques années encore, et des « Basler Nachrichten », de tendance bourgeoise et proches des milieux économiques. Le rédacteur en chef des « Basler Nachrichten », qui s'est senti trompé, a dénoncé le procédé des éditeurs [4]. Les « Solothurner Nachrichten » proches du PDC ont perdu leur indépendance et paraissent maintenant en édition régionale du « Vaterland », journal démocrate-chrétien lucernois. En fin d'année, la « Schweizerische Bodensee-Zeitung » et l’« Oberthurgauer » ont aussi fusionné. Ils s'étaient livré un combat sans merci durant longtemps [5].
L'imprimerie du « Courrier » de Genève a fermé ses portes bien qu'elle ait été précédemment occupée ; le journal catholique est maintenant imprimé sur les presses de la « Tribune de Genève » et sa collaboration avec « La Liberté » de Fribourg a été renforcée. Ce dernier quotidien, autrefois rigoureusement conservateur-catholique, a racheté la majorité des actions de « La Gruyère » radicale, de Bulle [6]. A Lausanne, « 24 heures » et « Tribune - Le Matin », qui appartiennent au même groupe de presse, ont reçu un rédacteur en chef commun, qui coiffe des équipes de rédaction distinctes : c'est une originalité au sein de la presse suisse [7]. Le PS de la ville de Zurich a accepté de faire reparaître le « Volksrecht », organe du parti qui avait disparu, comme édition régionale du « Freier Aargauer ». Le lancement en mai a répondu aux attentes des responsables [8]. La « Tat » de Zurich — jusqu'alors proche de l'Alliance des indépendants — a pris en avril 1977 le nouveau visage d'un journal populaire d'un certain niveau. Roger Schawinski, l'animateur de l'émission TV à succès « Kassensturz », a été appelé comme rédacteur en chef. Le « Blick » s'est senti directement concurrencé et a mis sur pied en fin d'année, en guise de riposte, une édition spéciale pour la région de Zurich [9]. Les discussions sur les feuilles d'annonces locales, distribuées gratuitement, n'ont pas cessé et l'Association suisse des éditeurs de journaux (ASEJ) a demandé, au cour de la consultation sur les nouveaux articles constitutionnels concernant la presse, l'interdiction de ces moyens d'information. Elle s'est exprimée, en revanche, et à l'instar de la Fédération suisse des journalistes (FSJ, ancienne Association de la presse suisse), contre la compétence de la Confédération, proposée par les experts, de désigner les journaux méritant d'être soutenus [10].
Des licenciements ont causé une certaine effervescence. Le cas Meienberg est celui qui a eu le plus d'échos. Ce journaliste connu collaborait au magazine du « Tages-Anzeiger ». La direction administrative du journal a renoncé à la collaboration de Niklaus Meienberg parce que sa « manière d'écrire » n'était plus compatible avec l'« éthique journalistique » du « Tages-Anzeiger ». La majorité des membres de la rédactio,i s'étaient prononcés pour son maintien [11]. D'autres renvois sont restés dans l'ombre de ce cas : à Bâle, la « National-Zeitung » a congédié son collaborateur, le socialiste Arnold Künzli, professeur de philosophie. Un congédiement à l'Agence télégraphique suisse (ATS) a provoqué de violentes protestations dans les milieux journalistiques. L'auteur d'un reportage contesté sur l'équipement en Suisse de six hélicoptères allemands destinés à la police chilienne, avait rendu publiques ses divergences avec le rédacteur en chef, ce qui constitua la raison du licenciement. La démission anticipée du rédacteur en chef de l’ATS, C. Tchimorin, de son poste de président central de la Fédération suisse des journalistes (FSJ) fut exigée [12]. La FSJ a décidé lors d'une assemblée extraordinaire des délégués d'approuver la convention passée avec l'Association suisse des éditeurs de journaux. Aucune entente n'avait été réalisée l'année passée. La même assemblée a également approuvé le règlement pour la création d'un Conseil de la presse [13].
 
[3] Cf. E. Bollinger, La presse suisse : structure et diversité, Bern-Frankfurt/M. 1976. Critiques : JdG, 146-149, 25-29.6.76 ; Ww, 28, 14.7.76.
[4] Cf. APS, 1969-1975, part. I, 8c. BZ/Tages-Nachrichten : BZ, 123, 28.5.76 ; 307, 31.12.76 ; NZ, 168, 31.5.76 ; Lib., 210, 12.6.76. NZ/BN : BN, 268, 16.11.76 ; 269, 17.11.76 ; 272, 20.11.76 ; NZ, 358-360, 16-18.11.76 ; 366, 23.11.76 ; NZZ, 269, 16.11.76 ; 270, 17.11.76 ; 275, 23.11.76 ; TLM, 321, 16.11.76 ; Ww, 47, 24.11.76 ; VO, 274, 26.11.76.
[5] Solothurner Nachrichten/Vat. : SZ, 74, 29.3.76 ; LNN, 75, 30.3.76 ; 131, 8.6.76 ; JdG (ats), 205, 2.9.76. Bodensee-Zeitung/Oberthurgauer: Ostschw., 297, 20.12.76 ; 300, 23.12.76 ; TA, 297, 20.12.76.
[6] Courrier : TA, 5, 8.1.76 ; (sda), 20, 26.1.76 ; 28, 4.2.76 ; 24 heures, 18, 23.1.76 ; (ats), 55, 6.3.76. La Gruyère : La Gruyère, 67, 10.6.76 ; Lib., 208, 10.6.76 ; Vat. (sda), 133, 10.6.76.
[7] TG, 6, 9.1.76 ; BN, 7, 10.1.76 ; TLM, 11, 11.1.76.
[8] FA, 25, 31.1.76 ; 1, 1.5.76 ; TW, 100, 1.5.76.
[9] Tat : NZ, 260, 21.8.76 ; 289, 16.9.76 ; 291, 18.9.76 ; 358, 16.11.76 ; TLM, 306, 1.11.76. Blick-Zurich : NZ, 349, 8.11.76 ; 350, 9.11.76 ; 376, 2.12.76 ; TLM, 314, 9.11.76 ; TA, 263, 10.11.76 ; JdG, 266, 13.11.76.
[10] ASEJ : Presse du 6.3.76. FSJ : La Presse Suisse, 1976, no 2, p. 2 ss. Cf. Ldb, 46, 25.2.76 ; APS, 1975, p. 150 s. Sur les feuilles d'annonces locales, cf. en outre TA, 41, 19.1.76 ; 212, 11.9.76 ; GdL, 161, 14.7.76 ; Bund, 189, 15.8.76 ; 24 heures, 206, 3.9.76. Sur l'avant-projet concernant la protection de la personnalité, vivement critiqué par les milieux de la presse, cf. supra, part. I, 1b (Menschenrechte).
[11] TA, 215, 15.9.76 ; 217, 17.9.76 ; 24 heures, 218, 17.9.76 ; 226, 28.9.76 ; NZ, 294, 21.9.76 ; 315, 9.10.76 ; TG, 222, 23.9.76 ; Konzept, 10, 20.10.76.
[12] Künzli : LNN, 240, 14.10.76 ; TW, 242, 15.10.76 ; NZ, 328, 21.10.76. ATS : TG, 212, 11.9.76 ; 216, 16.9.76 ; TA, 216, 16.9.76 ; VO, 221, 25.9.76 ; gk, 32, 30.9.76 ; La Presse Suisse, 1977, no 1, p. 38 ss.
[13] Cf. APS, 1974, p. 148 ; 1975, p. 150. La Presse Suisse, 1976, no 4, p. 38 s. ; VO, 145, 28.6.76.