Année politique Suisse 1977 : Economie / Agriculture
 
Economie laitière
Ayant paré au plus pressé, le parlement pouvait alors se consacrer à la discussion du nouvel arrêté sur l'économie laitière, qui dès 1978 devrait remplacer à la fois l'arrêté de 1971 et l'arrêté urgent de 1977 [17]. La définition du contingentement individuel y est toutefois beaucoup plus complexe que dans ce dernier. Comme le voulait l'exécutif, la quantité de base est fixée en tenant compte de l'évolution prévisible de la production et des ventes ainsi que des dépenses à la charge de la Confédération; de son propre chef, le législatif y a également ajouté les conditions de revenu dans l'agriculture. En outre, la quantité individuelle est à déterminer en prenant aussi en considération la superficie du domaine; les besoins de l'économie fromagère sont à respecter, tandis que les régions de montagne bénéficient d'un régime plus souple [18]. Un incident de procédure a empêché l'abrogation de certaines mesures concernant la distribution et la vente du lait contenues dans l'arrêté sur le statut du lait. En effet, alors que la majorité de la commission préparatoire du Conseil national, accédant au voeu de l'agrarien Hofmann (BE), proposait de ne pas entrer en matière, la Chambre se refusait à la suivre et renvoyait l'objet, afin que la commission puisse en préparer une présentation détaillées [19]. Les différentes mesures prises par le parlement, en particulier l'introduction du contingentement, n'ont pas laissé les milieux paysans insensibles. Acceptation mêlée d'une déception plus ou moins profonde dans les organisations « classiques» [20], mouvement plus offensif à l'Union des producteurs suisses (UPS), qui, avec l'appui des Comités paysans de Suisse alémanique et après plusieurs manifestations publiques, décida, fin octobre, de se saisir du référendum contre' l'arrêté sur l'économie laitière [21]. L'UPS lui reproche l'injustice qu'entraînerait son application, notamment dans les zones de montagne et des collines, le préjudice qu'il porte à la survie de la petite et moyenne exploitationagricole, ainsi que l'absence de mesures connexes limitant les importations de lait et réglementant l'utilisation des denrées fourragères [22]. Une récolte de signatures relativement rapide permettra de déposer les listes référendaires peu avant Noel [23].
La critique adressée par l'organisation paysanne dissidente à l'absence de mesures réglementant l'importation ainsi que l'utilisation des denrées fourragères semble être infondée. En effet, la révision de la loi sur l'agriculture prévue par le Conseil fédéral, dans un but d'orientation de la production sur une base indigène, propose d'étendre le contingentement des denrées fourragères importées et de redistribuer les suppléments de prix ainsi perçus sous la forme de contributions variables aux frais des détenteurs de bétail [24]. Ce projet rencontra l'opposition de l'Association suisse des fabricants d'aliments fourragers, dont la contre-proposition astreint au contrôle de l'autorité l'élevage de bétail (en particulier de porcs et de volaille), en rendant obligatoire l'obtention d'une autorisation. Par ce biais, les conditions d'exploitation pourraient être modifiées. La mise en place d'un fonds compensatoire pour la réduction de la taille des entreprises ou pour leur désaffectation est envisagée [25]. A partir de cette conception, la Division de l'agriculture élabora un projet, concurrent à celui du Conseil fédéral, qui soumet la création de nouvelles exploitations d'une certaine dimension, ou l'agrandissement d'exploitations existantes, à la remise d'une autorisation et impose une taxe aux détenteurs de troupeaux particulièrement nombreux [26] A mi-août, alors que l'USP s'était entre-temps clairement ralliée à la solution de l'exécutif, la commission préparatoire du Conseil national demandait au gouvernement de préciser le projet de la Division de l'agriculture, de le mettre ensuite en consultation et de rédiger un message supplémentaire à son propos [27]. L'assemblée des délégués de l'Union centrale des producteurs de lait, le 28 octobre, a pour sa part mandaté son comité pour lancer une initiative visant à réduire les importations d'aliments fourragers et à donner la priorité à la production indigène [28].
 
[17] FF, 1977, I, p. 143 ss.
[18] BO CN, 1977, p. 50 ss., 80 ss., 1043 ss. et 1368; BO CE, 1977, p. 420 ss. et 603; FF, 1977, III, p. 244 ss.
[19] FF, 1977, I, p. 173 ss.; BO CN, 1977, 1045 ss.
[20] BüZ, 7, 8.1.77; LNN, 16, 20.1.77; 240, 14.10.77; La Gruyère, 9, 22.1.77; TLM, 77, 18.3.77; NZZ, 99, 29.4.77; Vat., 221, 22.9.77. Cf. également APS, 1976, p. 88.
[21] Manifestations: TLM, 11, 11.1.77; 24 Heures, 53, 4.3.77; 107, 9.5.77. Référendum: NZZ (sda), 17,21.1.77; 252, 27.10.77; TLM, 34, 3.2.77; JdG, 61, 14.3.77; 289, 10.12.77; LNN, 252, 28.10.77.
[22] Union, 38, 21.12.77.
[23] FF, 1978, I, p. 250 s. La grande majorité des 32 798 signatures provient de la Suisse romande, le canton de Vaud en ayant fourni près de la moitié (14 499).
[24] FF, 1977, I, p. 181 ss.
[25] NZZ, 40, 17.2.77.
[26] LNN, 185, 11.8.77; Vat., 185, 11.8.77.
[27] USP: NZZ, 186, 11.8.77. Commission du CN: TA, 190, 17.8.77; Bund, 192, 19.8.77.
[28] TA, 252, 28.10.77; 127, 1.2.78; 24 Heures, 251, 28.10.77.