Année politique Suisse 1977 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
 
Construction des routes
La construction des routes nationales ne s'est pas heurtée à des difficultés financières — en effet, le financement en est assuré par l'affectation obligatoire des droits de douane sur les carburants — mais, en revanche, à des oppositions relatives à la protection de l'environnement et à la politique générale des transports. Suivant le Conseil des Etats, le Conseil national s'est également rallié à la recommandation du Conseil fédéral qui avait proposé de rejeter l'initiative populaire «Démocratie dans la construction de routes nationales». Les conseillers nationaux furent surtout sensibles au fait qu'il n'est pas sage de vouloir décider, au moyen de scrutins nationaux, de problèmes régionaux ou locaux, tels que le tracé d'une autoroute. Cependant, l'argument du Conseil fédéral selon lequel le réseau des routes nationales est un tout qui ne saurait souffrir d'amputation n'a pas été entièrement admis par le Conseil national. C'est pourquoi celui-ci a adopté une motion qui demande au gouvernement de réexaminer de façon approfondie le réseau décidé en 1960. Les tronçons qui seront revus sont ceux dont la nécessité est contestée ou ceux dont la catégorie est remise en question et dont la construction n'a pas encore commencé. Il s'agit notamment d'Yverdon–Avenches (N1), d'Hardturm–Letten–Sihlhölzli à Zurich (SN1/SN3), de Müllheim–Kreuzlingen (N7) et de Corsy–Peraudettaz (N9, bretelle de Lausanne-Est) [26].
Les citoyens du canton de Zurich ont eu à se prononcer pour la seconde fois sur l'autoroute projetée en ville de Zurich (ce qu'on appelle l'Y). L'initiative déposée en ?974 par les Organisations progressistes (POCH) demandait qu'on renonce à construire les voies express urbaines. Elle fut rejetée par le peuple qui confirma ainsi son rejet, il y a trois ans, d'une initiative analogue. Fait remarquable: lors de ces deux votations les habitants de la ville de Zurich, directement concernés, se sont prononcés contre ces autoroutes urbaines [27]. Afin de protéger aussi bien que possible les citadins contre le bruit, le parti socialiste avait lancé en 1974, une initiative populaire qui avait abòuti et qui demandait la couverture de ces routes express peu populaires. Le gouvernement cantonal a repoussé cette exigence pour des raisons financières et a l'intention de lutter contre le bruit et les autres nuisances avec des moyens conventionnels (parois de protection) [28].
Le Grand Conseil bernois n'a pas pu adopter une position claire et tranchée au sujet du projet du tunnel du Rawil. En revanche, les explications des gouvernements bernois et valaisans ne laissent aucun doute sur leur ferme volonté d'atteindre ce but. Par contre, la position valaisanne en ce qui concerne sa propre autoroute (N9) est moins nette. Ce sont notamment les agriculteurs qui craignent une destruction des cultures intensives de la vallée du Rhône et qui, par conséquent, préconisent l'élargissement et l'amélioration de la route cantonale existante, variante qui, à leurs yeux, est largement suflisante [29]. Lorsqu'en pleine période de protestations contre les routes nationales, il se fait jour des initiatives en faveur d'une nouvelle liaison autoroutière, ce phénomène semble quelque peu anachronique. Pourtant, l'Assemblée constituante jurassienne a exprimé le voeu que la construction d'une «transjurane» permette de relier cette région au réseau des routes nationales. Cette requête n'est, au fond, pas étonnante puisque, sans cette nouvelle voie, le futur canton du Jura serait le seul, avec les deux Appenzell, à ne pas posséder d'autoroutes [30].
L'an dernier, les nouveaux tronçons d'autoroutes qui ont été ouverts furent plutôt rares. Le réseau atteint 1013,9 km, soit une augmentation de 37,4 km (1976: 23,1 km). Ce sont donc 55,2 % du réseau total qui sont en service. A la fin de l'année dernière, 351,4 km étaient en construction (1976: 364 km) [31]. Le contournement de la ville de Berne (N1/N12) a été achevé et ouvert à la circulation, ce qui constitue un élément important de la liaison entre la Suisse alémanique et la Suisse romande [32].
Le Conseil des Etats a estimé insuffisant l'élargissement, proposé en 1974 par le Conseil fédéral, de la participation extraordinaire de la Confédération en contribution générale aux dépenses d'exploitation et d'entretien des routes nationales. Il a donc suivi sa commission qui lui avait proposé le renvoi de cette affaire au Conseil fédéral, afin que celui-ci puisse englober dans un projet plus complet les problèmes du financement du réseau des routes principales, y compris les possibilités de trouver de nouvelles recettes (par exemple sous forme de taxe d'usager) [33].
Dans le canton de Zurich, les citoyens ont dû se prononcer sur une initiative qui a abouti en 1974 et qui demande l'institution du référendum (facultatif dès 2 millions et obligatoire dès 20 millions de francs de dépenses) pour les constructions de routes. Malgré les objections du gouvernement, selon lequel pareille disposition rendrait impossible toute planification à long terme, les partisans de l'initiative, qui se recrutaient surtout dans les milieux de gauche, l'ont emporté en insistant sur le fait que, dans d'autres domaines, l'accomplissement des tâches cantonales est soumis au référendum et que cette garantie des droits du citoyen en démocratie directe n'a pas d'effets négatifs [34]. C'est également une extension des droits populaires que votèrent les citoyens du canton de Schaffhouse en adoptant le contre-projet opposé à l'initiative populaire de l'«Aktion Rhy». En effet, la nouvelle loi oblige le gouvernement cantonal à soumettre en votation populaire ses décisions concernant le tracé général des routes nationales traversant le territoire cantonal [35]. Dans le canton de Soleure, une initiative des POCH, s'opposant à divers projets d'accès d'autoroutes, a été massivement rejetée [36].
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Chemins pédestres
L'initiative populaire pour le développement des chemins pédestres qui vise à faire de l'aménagement et de l'entretien de ces chemins une tâche de la Confédération, est liée à la construction des routes. En effet, chaque année, plus de 1000 km de chemins pédestres sont sacrifiés à la construction de routes. Il est donc indispensable, aux yeux des initiateurs, que la Confédération, qui subventionne en majeure partie les constructions de routes, freine cette évolution en édictant des prescriptions appropriées. Cependant, le Conseil fédéral a estimé que, dans la situation actuelle, il n'était pas opportun d'accepter de nouvelles tâches et s'est déclaré convaincu que ce problème pourra trouver une solution plus efficace sur le plan cantonal. Le Conseil des Etats a partagé cette manière de voir, mais le Conseil national s'y est opposé. Il a, en revanche, approuvé un contreprojet de Martha Ribi (prd, ZH), selon lequel la Confédération est chargée d'établir des principes pour le réseau des chemins pédestres. Par contre, leur aménagement et leur entretien serait l'affaire des cantons, la Confédération pouvant toutefois apporter son soutien et effectuer la coordination. En outre, lorsqu'elle construit (notamment des routes nationales), la Confédération devrait respecter les chemins pédestres ou les remplacer [37].
 
[26] BO CN, 1977, p. 339 ss. Cf. APS, 1976, p. 103.
[27] Vr, 43, 21.2.77; NZZ, 58, 10.3.77; TA, 61, 14.3.77. L'initiative fut rejetée par 184191 non contre 135108 oui, mais la ville de Zurich l'accepta par 63234 oui contre 58835 non. Cf. APS, 1974, p. 94.
[28] NZZ, 233, 23.9.77. Cf. APS. 1975, p. 109.
[29] Bund, 27, 2.2.77; 33, 9.2.77; 39, 16.2.77; 64, 17.3.77; presse du 17 et 18.4.77; APS, 1976, p. 103 (N6). 24 Heures, 146, 25.6.77; Bund, 170, 23.7.77 (N12). La popularité du mouvement contre la N9 fut d'ailleurs démontrée par les 33000 signatures soutenant sa pétition (JdG, ats, 226, 28.9.77). En ce qui concerne les autres tronçons contestés, cf. TLM, 128, 8.5.77 (N1 ); NZZ, 81, 6.4.77; LNN, 141, 21.6.77 ; BO CN. 1977, p. 373 ss. (N4).
[30] TLM, 191, 10.6.77. Cf. également APS, 1973, p. 92. s.
[31] Rapp. gest., 1977, p. 47 ss.
[32] Presse du 7.12.77.
[33] BO CE, 1977, p. 469 ss. Cf. APS, 1975, p. 109.
[34] Ldb, 40, 17.2.77; TA, 54, 5.3.77; 61, 14.3.77 (172595 oui contre 142156 non). Cf. APS, 1974, p. 155 et infra, part. II, 1 g.
[35] TA, 111, 13.5.77; 113, 16.5.77 (16105 oui contre 8776 non). Cf. APS, 1976, p. 117 et infra, part. II, 4 f.
[36] NZ, 21, 21.1.77; SZ, 207, 7.9.77; 282, 5.12.77 (38870 non contre 17437 oui). Cf. infra, part. II, 4b.
[37] Ldb, 7, 10.1.77; APS 1974, p. 112; FF, 1977, I, p. 1083 ss.; BO CN, 1977, p. 965 ss. et 1585 s.; BO CE, 1977, p. 691 ss. Voir également l'initiative parlementaire du CE Dillier (pdc, OW) (Délib. Ass. féd., 1977, V, p. 13).