Année politique Suisse 1978 : Enseignement, culture et médias / Enseignement et recherche
 
Formation professionnelle
Dans le secteur de la formation professionnelle, on a pu constater que la sélection pratiquée par les maîtres d'apprentissage pendant les années de récession, compte tenu du nombre croissant de jeunes gens, s'est aggravée au détriment des élèves les plus faibles. Les efforts des employeurs ont toutefois abouti à l'enregistrement, en 1977, pour la première fois, de plus de 150 000 places d'apprentissage. C'est en partie grâce à la politique à l'égard des travailleurs étrangers qu'aucune course folle aux places d'apprentissage ne s'est produite [26]. Il est notoire, par exemple, que beaucoup de jeunes étrangers n'apparaissent pas sur le marché des places d'apprentissage, car ils sont confrontés aux problèmes qui naissent de la durée provisoire du séjour, des difficultés linguistiques et du manque de soutien des parents en matière scolaire [27].
La discussion parlementaire de la nouvelle loi sur la formation professionnelle avait, l'année dernière, laissé en suspens quelques points de friction qui ont été éliminés au printemps. Avant la fin même de la discussion projet par les Chambres, le comité fédéral de l'USS a décidé de lancer un référendum [28]. Il fut rejoint dans la lutte contre cette loi par tous les partis de gauche. Pour les opposants, les Chambres avaient exclusivement pris en compte les intérêts du patronat et les propositions des travailleurs avaient été repoussées en bloc. Les points centraux de leurs critiques furent: la reconnaissance légale de la formation d'auxiliaire, qui entraînerait une dégradation pour beaucoup d'apprentis; la troisième demi-journée d'école que la loi n'a pas prise en considération ; l'absence d'un délai fixé aux maîtres d'apprentissage pour participer aux cours introductifs obligatoires; le rejet de 'la participation des apprentis sur leur lieu de travail et l'absence de reconnaissance légale d'un contrôle systématique des entreprises d'apprentissage [29]. Les partis bourgeois et les organisations patronales ont défendu la loi, mettant en évidence les avantages d'une formation professionnelle axée sur la pratique. Les modérés, favorables au projet, ont relevé que bien qu'elle ne contienne rien de spectaculaire, la loi sur la formation professionnelle tenait le juste milieu entre les droits à une bonne formation, les intérêts des entreprises d'apprentissage et ceux des apprentis, et qu'elle laissait le champ libre à de nouveaux développements [30]. Le peuple a finalement adopté le projet le 3 décembre par 56% de oui contre 44 % de non. Une analyse de la votation a montré que, conformément aux prévisions, la jeune génération, les ouvriers et la gauche ont fourni la plupart des voix rejetantes. Il est en outre intéressant de constater que la loi sur la formation professionnelle s'est heurtée à une vive opposition non seulement en Suisse romande et au Tessin, mais également dans les cantons campagnards et plutôt conservateurs de la Suisse centrale [31].
De pair avec les critiques émises surie développement insuffisant de la formation de base, la revendication d'ateliers d'apprentissage publics a resurgi: dans le canton de Zurich, les petits partis de gauche (POCH, LMR), appuyés par différentes sections locales du PS, ont déposé une initiative populaire cantonale. Le but est d'empêcher que la formation professionnelle ne se déroule qu'ail profit des patrons [32]. Répondant à une interpellation parlementaire, le conseiller fédéral Honegger s'est prononcé contre l'ouverture d'ateliers d'apprentissage publics parce que la demande pressante sur le marché des places d'apprentissage fléchira sans autre d'ici 1981. Le goulet doit être surmonté en créant des places d'apprentissage supplémentaires dans les entreprises [33]. A Genève, une initiative des syndicats a été acceptée. Elle prévoit l'extension du système en vigueur pour la formation professionnelle. L'apprentissage combiné entre l'école et l'entreprise doit en particulier être généralisé, et l'échange d'apprentis entre les entreprises encouragé. Les radicaux et libéraux ont protesté sans succès contre la surcharge financière imposée unilatéralement aux patrons [34].
 
[26] Bund, 45, 22.2.78; BaZ, 85, 1.4.78; TA, 85, 13.4.78; 118, 25.5.78; CMV-Zeitung Aktiv, 14, 11.7.78; cf. APS, 1977, p. 138.
[27] Bund, 53, 4.3.78 ; TG, 72, 29.3.78 ; gk, 13, 30.3.78 ; BaZ, 117, 2.5.78; Brückenbauer, 34, 25.8.78 ; cf. Focus, 1978, no 93, p. 10 ss.
[28] Débat parlementaire: BO CN, 1978, p. 76 s.; 508; BO CE, 1978, p. 64, 212; cf. FF, 1978, I, p. 1125 ss.; APS, 1977, p. 142 s. Référendum : Gewerkschaftliche Rundschau; 70/1978, p. 97 ss. ; gk, 17, 27.4.78 ;18,11.5.78 ; 20, 25.5.78. 106 638 signatures ont été déposées à la Chancellerie fédérale (FF, 1978, II, p. 413).
[29] VO, 40, 20.2.78; 46, 28.2.78; 241, 27.10.78; 263, 23.11.78; Infrarot, no34, juin/juillet 1978; SMUV-Zeitung, 32/33, 16.8.78; Vorwärts, 41, 12.10.78; 48, 30.11.78; gk, 39/40, 9/16.11.78; CMV-Zeitung Aktiv, 23, 29.1 1.78.
[30] H. Thalmann, « Ein realistisches Berufsbildungskonzept » in Civitas, 34/1978–79, p. 97 ss. ; SAZ, 73/1978, p. 289; 529 ss. ; 769 ss. ; wf, Dok., 9, 27.2.78 ; 33–34,14.8.78 ; 43, 23.10.78 ; 48,29.11.78 ; NZZ, 99;29.4.78 ; 179, 5.8.78; 191, 19.8.78; 255, 2.11.78; 269, 18.11.78 (CF F. Honegger); 278, 29.11.78 (J.-P. Bonny, directeur de l'OFIAMT); Lib., 42, 18.11.78.
[31] Résultat : Voir la presse du 4.12.78; cf. Vox, Analyses des votations fédérales, 3.12.78.
[32] Vr, 168, 21.7.78; 183, 8.8.78; 206, 4.9.78; 208, 6.9.78; 229, 30.9.78; 301, 23.12.78; TA, 232, 6.10.78; (sda), 2, 4.1.79; Vorwärts, 41, 12.10.78; POCH-Zeitung, 2, 11.1.79.
[33] BO CN, 1978, p. 246.
[34] VO, 21, 27.1.78; 34, 13.12.78; JdG, 29, 4.2.78; 43, 21.2.78; 48, 27.2.78. Conditions d'apprentissages à Genéve: TG, 132, 9.6.78; 148, 28.6.78; JdG, 157, 158, 160, 162, 8.7–14.7.78.