Année politique Suisse 1980 : Eléments du système politique / Elections
Elections cantonales
Lors des élections cantonales, la tendance observée depuis 1979 déjà s'est confirmée: les partis bourgeois, notamment le PRD et le PDC ont progressé ; le PS a connu des succès et des échecs qui s'équilibrent ; les groupes du centre et de l'extrême-droite ont continué à régresser. Si l'on fait la somme de tous les partis de gauche, on constate le plus souvent une croissance. La polarisation s'est donc poursuivie. Un phénomène analogue vaut pour les élections dans les villes importantes. La participation aux urnes a diminué presque partout. Schaffhouse a été le seul canton dans lequel elle s'est maintenue, et de loin, au-dessus de 50%.
Les élections les plus disputées ont eu lieu à Bâle-Ville où le renouvellement du mandat des sept membres du gouvernement fut le centre d'intérêt. Les socialistes ont tenté de reconquérir leur troisième siège perdu en 1976 à cause du dissident H. Schmid. Lors du choix des candidats, c'est F. Mattmüller de l'aile gauche du parti qui s'imposa. En 1972, il avait déjà été un candidat dissident. Outre le PS, l'Alliance des indépendants et les partis de l'extrême-gauche ont cherché à modifier la répartition des sièges. Tandis que les socialistes refusèrent de présenter, conjointement avec le POCH, une liste de quatre candidats, les radicaux, les libéraux et les démocrates-chrétiens se sont unis pour défendre la majorité bourgeoise, au sein de laquelle le représentant du Parti libéral L. Burckhardt se fit remplacer. Au premier tour, quatre anciens seulement ont atteint la majorité absolue. Au second tour, furent élus Schmid, soutenu par un comité largement bourgeois, et le socialiste K. Schnyder, chef du département de police, attaqué dans son propre parti pour sa ligne plutôt dure; il en fut de même pour le nouveau candidat libéral P. Facklam, qui distança nettement le troisième candidat socialiste. Ainsi la composition politique de l'exécutif n'a pas été modifiée.
Pour le renouvellement du
Grand Conseil, qui eut lieu en même temps, les changements les plus marquants furent, d'une part les gains du POCH, qui est devenu le plus important des partis non gouvernementaux, et d'autre part la défaite de l'Action nationale, qui a perdu plus de la moitié de ses sièges. Dans le camp bourgeois, le PRD a reconquis la première place qu'il avait perdue en 1968 et a ainsi relégué les libéraux au second rang. Les socialistes ont perdu une partie de leur avance de 1976
[5].
En Thurgovie également, l'élection du gouvernement fut disputée et elle donna lieu à des tensions au sein du PS. Pour succéder à A. Abegg, son représentant, le parti désigna son président U. Schmidli. Cette solution de compromis déplut aux milieux syndicaux, qui présentèrent un contre-candidat. Bien que celui-ci se pliât à la discipline du parti, le PRD refusa de soutenir Schmidli, ce qui ne l'empêcha pourtant pas d'être élu
[6].
Les élections parlementaires, qui eurent lieu trois semaines plus tard, reflétèrent la tendance à la polarisation puisque tant les radicaux que les socialistes ont légèrement amélioré leurs positions face aux deux groupes les plus forts du canton, à savoir les paysans et les démocrates-chrétiens
[7].
A Schaffhouse, la réélection des cinq membres du gouvernement n'a pas posé de problèmes; en effet, les candidats du POCH et de la LMR ne représentaient pas une concurrence sérieuse. Les résultats obtenus par les conseillers d'Etat sortants furent même sensiblement meilleurs qu'en 1976
[8].
Le renouvellement du Grand Conseil qui, là également, a eu lieu un peu plus tard, n'a pas apporté de grands changements, mais toujours est-il qu'on discerne une tendance d'abandon des petits partis au profit des grands. Une campagne des organisations de protection de l'environnement soutenait 15 candidats de différents partis et 10 d'entre eux furent élus
[9].
Un renforcement des grands partis est aussi apparu à St-Gall où il est de tradition d'élire d'abord le parlement puis le gouvernement. Le PDC qui avait obtenu en 1972 la majorité absolue au Grand Conseil est parvenu à la renforcer et atteindre quasiment le seuil de 50% avec le nombre de ses électeurs
[10].
Pour l'exécutif, les trois partis gouvernementaux avaient établi une liste commune, qui confirmait les rapports de force existants; ainsi, les démocrates-chrétiens continuaient à reconnaître la parité avec les radicaux. Pour remplacer G. Hoby, démissionnaire, ils ont désigné K. Mätzler comme candidat. Aucune candidature supplémentaire n'a empêché le succès de l'entente
[11].
A Schwyz et Uri, le PDC détient traditionnellement la majorité absolue parmi les autorités cantonales. Des sept conseillers d'Etat
schwyzois, trois ne se représentaient plus, mais les trois grands partis tombèrent d'accord, comme d'habitude, pour présenter une liste commune ne modifiant pas la répartition des sièges. Cette manière de procéder amena un groupe d'opposants à lancer une initiative pour l'introduction de la proportionnelle dans l'élection du gouvernement. En revanche, une liste «sauvage» comprenant des noms connus, mais dont ceux qui les portaient se distancèrent de cette «candidature», n'a pas obtenu de succès
[12]. Les élections parlementaires ont légèrement renforcé le parti dominant, tandis que, cette fois, le PS a surtout reculé
[13]. Les sept membres de l'exécutif
uranais se représentaient tous sur une liste commune, qui l'emporta faute de concurrence. L'élection du législatif n'a donné lieu qu'à des changements mineurs en ce qui concerne les partis politiques
[14].
Lors des élections complémentaires au gouvernement de différents cantons, le seul changement de composition politique a eu lieu à
Genève. Là, le conseiller d'Etat et conseiller aux Etats socialiste Willy Donzé, chef du Département de la prévoyance sociale et de la santé publique, quittait, pour raisons de santé, le gouvernement une année avant les élections générales. Pour lui succéder, le PS a choisi comme candidat C. Grobet, dont le profil d'intellectuel de gauche est bien marqué. Cela suscita une contre-candidature des milieux bourgeois. A. Werner, professeur de médecine, n'appartient à aucun parti et n'a été officiellement soutenu par aucun d'eux. Cependant, un comité de personnalités bourgeoises connues a mené une coûteuse campagne en sa faveur. Grobet qui avait aussi l'appui du PdT fut battu de façon surprenante, tandis qu'un candidat de Vigilance est arrivé très loin derrière. Le PS, et par conséquent toute la gauche, ne dispose plus maintenant à Genève que d'un seul représentant au gouvernement, malgré son nombre relativement élevé d'électeurs, cas analogue à celui existant à Zurich depuis longtemps
[15]. La même situation de départ s'est présentée à
Neuchâtel où le socialiste de droite R. Meylan, lui aussi conseiller aux Etats, a quitté le gouvernement. Le PS a également choisi comme candidat un représentant de son aile gauche, P. Dubois, mais cette candidature n'a été contestée par personne
[16]. Les sièges radicaux à repourvoir dans les gouvernements bernois et uranais n'ont pas été menacés
[17].
[5] Elections du 20.1 et du 17.2: BaZ, 1, 3—5, 7, 9—12, 14, 2—17.1.80; 17, 21.1.80; 41, 18.2.80; NZZ, 10, 14.1.80. Cf. APS, 1968, p. 29; 1972, p. 30 s.; 1976, p. 31 ss.
[6] Elections du 2.3: TA, 13, 17.1.80; 30, 6.2.80; Vat., 18, 23.1.80; BaZ, 27, 1.2.80; SGT, 40, 18.2.80; NZZ, 52, 3.3.80.
[7] Elections du 23.3: SGT, 66, 19.3.80; LNN, 68, 21.3.80; presse du 25.3.80.
[8] Elections du 14.9: NZZ, 210, 10.9.80; 214, 15.9.80; Vat., 212, 12.9.80; TA, 214, 15.9.80.
[9] Elections du 26.10: TA, 246, 22.10.80; LNN, 247, 23.10.80; NZZ, 249, 25.10.80; Bund, 255, 30.10.80.
[10] Elections du 3.2: NZZ, 23, 29.1.80; 30, 6.2.80; TA, 23, 29.1.80; SGT, 28, 4.2.80; 29, 5.2.80; cf. APS, 1972, p. 30 ss.
[11] Elections du 2.3: SGT, 46, 25.2.80; 52, 3.3.80; Vat., 47, 26.2.80; Ldb, 49, 29.2.80.
[12] Elections du 27.4: Vat., 93, 22.4.80; 98, 28.4.80; LNN, 94, 23.4.80. Les nouveaux élus furent W. Gisler et P. Brandenberg (pdc) ainsi que M. Kürzi (prd) au lieu des démissionnaires J. Ulrich, H. Fuchs (les deux pdc) et R. Sidler (prd).
[13] LNN, 90, 18.4.80; 98. 28.4.80; Vat.. 98, 28.4.80. Cf. APS, 1976, p. 31 ss.
[14] Elections du 4.5: Vat., 97, 26.4.80; 104, 5.5.80; LNN, 104, 5.5.80.
[15] Election du 14.12: Suisse, 170, 18.6.80; 333, 28.11.80; 334, 29.11.80; JdG, 142, 20.6.80; 209, 6.9.80; 276,25.11.80;280,29.11.80;293, 15.12.80;295, 17.12.80 ; NZZ. 292, 15.12.80. Werner obtint 49.8% des voix et Grobet 43,8%, la participation n'atteignant que 27,4%. Pour ètre élu, un candidat a besoin d'un tiers des voix au minimum.
[16] 24 Heures, 289, 12.12.79; TLM, 76, 16.3.80; Bund, 66, 19.3.80; LNN, 130. 7.6.80. Il y a eu élection tacite.
[17] Pour le conseiller d'Etat bernois sortant R. Bauder a été élu H. Krähenbühl, la candidature d'un groupement de gauche (Alternative démocratique) restant sans succès (Suisse, 104, 13.4.80; Bund, 102, 2.5.80 ; 148, 27.6.80; 223. 23.9.80 ; 228, 29.9.80; TW, 102, 2.5.80). Successeur de R. Gamma au gouvernement uranais a été C. Dittli qui n'était pas contesté (Vat., 200, 29.8.80; 226, 29.9.80; cf. supra, Conseil des Etats). Dans les deux Appenzell, les élections de la Landsgemeinde ont confirmé les rapports des forces (Bund, 98, 28.4.80; NZZ, 98, 28.4.80).
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