Année politique Suisse 1981 : Chronique générale
Résumé
En Suisse, l'année 1981 ne s'est guère caractérisée par de nouveaux développements. La situation économique fut satisfaisante, hormis dans certaines branches particulièrement sensibles. Les tensions internationales, quoique accrues, n'ont pas dépassé certaines limites. Toutefois, chez nous également, les préoccupations concernant la paix se sont grandement manifestées, surtout parmi les jeunes. Comme prévu dans le programme gouvernemental pour la législature en cours, le Conseil fédéral a entamé le processus d'adhésion de la Suisse à l'ONU.
La prorogation du régime financier de la Confédération ratifiée par le parlement et le peuple fut un enjeu crucial pour notre système politique. Les partis gouvernementaux, dont les divergences sont notoires à maints égards, parvinrent cependant à trouver un compromis qui a au moins eu le mérite de ne pas faire éclater au grand jour la crise financière de l'Etat. La minorité de citoyens qui se sont rendus aux urnes n'a pas rejeté cette prorogation, admettant ainsi sa nécessité inéluctable.
Comme pour les finances, presque tous les objets importants sont restés en suspens. Toujours est-il que le peuple a adopté les dispositions constitutionnelles sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes et sur la protection des consommateurs. Il a ainsi démontré que le renforcement de l'Etat social, au moyen d'innovations régulatrices, continue d'être réalisable, pour autant que cela réponde à une préoccupation largement partagée. En revanche, l'initiative «Etre solidaires», favorable à une amélioration du sort de la population étrangère pourtant dénuée de droits politiques, a échoué. L'opposition passionnée qu'elle a suscitée, combinée à des intérêts bien organisés, n'a laissé à ses partisans aucune chance de l'emporter. Même la nouvelle loi sur les étrangers, qui n'est que modérément réformatrice, a été contestée par des milieux de droite qui ont recouru au référendum. La gauche a également utilisé cette arme pour freiner le renforcement de l'ordre public par une extension du droit pénal que les milieux bourgeois s'efforcent d'obtenir. Parmi les autres lois importantes en chantier, seule celle relative à la prévoyance professionnelle (deuxième pilier) était en voie d'achèvement au terme de l'année grâce à un compromis sans grandeur.
Aux deux ailes de la coalition gouvernementale, on a constaté certaines dispositions au compromis. Il est vrai que les socialistes ont dû faire les concessions les plus importantes pour le régime financier de la Confédération, pour la loi sur les étrangers et pour le deuxième pilier. Pourtant, de leur côté, les radicaux ne s'en sont pas tenus trop strictement à leurs déclarations anti-étatiques. Ils ont ainsi approuvé une augmentation réduite de l'impôt sur le chiffre d'affaires et ont prêté la main à une amélioration du salaire réel en faveur de la plus grande partie du personnel fédéral. Leur attitude lors de l'élection du nouveau chancelier de la Confédération fut un geste en direction de la gauche, puisque c'est grâce à l'appui radical que le candidat socialiste triompha.
Tandis que l'élite politique s'efforçait de sauvegarder notre démocratie de concordance, les tensions sociales sous-jacentes n'ont pas changé. Preuves en sont les campagnes de protestation contre la démolition de logements ou contre la construction de nouvelles centrales nucléaires, ainsi que d'autres antagonismes violents au sujet de centres autonomes pour la jeunesse. Les partis bourgeois n'ont guère été touchés, alors que le PS l'a été puisque ses dissensions intestines se sont accentuées surtout à Zurich et à Bâle en raison du problème des jeunes. Les élections cantonales n'ont pas fait apparaître une tendance uniforme et pourtant, en Suisse alémanique, la faveur des électeurs a continué d'aller aux partis de droite.