Année politique Suisse 1981 : Politique sociale / Population et travail
 
Politique démographique
Bien que 1981 s'est révélée comme une année relativement bonne pour l'économie suisse, les pressions que la concurrence internationale et les rationalisations ont exercées sur les travailleurs de l'industrie suisse sont malgré tout demeurées fortes. Certes, notre économie a connu le plein emploi, mais l'évolution des gains réels des salariés n'a guère été satisfaisante. Le renchérissement est devenu, à côté du problème du franc et des finances fédérales, l'un des thèmes principaux de la politique économique. Il a du reste été au centre des controverses, tant sur le plan politique que contractuel. Cependant, la paix du travail n'en a pas été affectée outre mesure, même si parfois — dans la fonction publique et semi-publique en particulier — des débordements ont été enregistrés [1].
L'absence de véritable politique démographique à l'échelon national a, une fois de plus, été dénoncée par un groupe de travail proche des milieux écologistes: l'Association suisse pour l'étude des problèmes démographiques (ASEPD). Inquiète des dangers pour l'environnement d'une croissance économique et démographique incontrôlée, l'association propose, par le biais d'un contrôle des naissances et de mesures encore plus restrictives sur l'immigration, de stabiliser progressivement la population résidante autour de 5,5 millions d'habitants. Si le maintien d'un environnement équilibré ne passe pas forcément par une diminution de la population — la notion de surpeuplement étant en définitive relative — les promoteurs ont néanmoins eu le mérite d'attirer l'attention du public et des autorités sur la nécessité de préserver au mieux l'équilibre de notre milieu [2].
Les premiers résultats définitifs du recensement fédéral 1980 confirment la tendance relevée en janvier 1981 déjà, à savoir celle d'une faible croissance démographique. En décembre 1980, la population résidant dans notre pays s'élevait à 6 365 960 habitants, progressant de quelque 96 200 unités (1,5%) par rapport à 1970. Cette évolution est imputable avant tout aux mesures de contingentement de la main-d'oeuvre étrangère prises au lendemain des premières initiatives «xénophobes» (déficit migratoire: 137 600 unités) ainsi qu'à une diminution importante des naissances (excédent: 230 800 unités), malgré la légère reprise de ces deux dernières années [3]. Par ailleurs, plusieurs régions ont connu une véritable hémorragie démographique. Il s'agit en particulier de celles situées le long de la chaîne jurassienne, fortement dépendante de l'industrie horlogère, et des régions textiles de la Suisse orientale. Cependant, sur le plan cantonal, c'est le demi-canton de Bâle-Ville qui a subi la plus forte saignée (– 13,2%), alors que Zoug (+11,7%) et Nidwald (+ 11,6%) ont enregistré la plus forte croissance. Enfin, à l'échelon communal, la tendance généralé montre que ce sont les localités de moins de 100 000 habitants qui évoluent de manière positive. En revanche, la population résidante des grandes villes continue à régresser et celle des villes moyennes, comme Bienne (–16,4%), marquent le pas [4].
 
[1] USS, 3, 27.1.82. En ce qui concerne la paix du travail et l'appréciation juridique du droit de grève, cf. infra, part. IIIb (Sozialpartner).
[2] ASEPD: presse du 24.11.81. Critiques: JdG, 276, 26.11.81; 302, 29.12.81; Bund, 297, 19.12.81. Voir également les diverses contributions sur le thème de la démographie présentées en mai à l'occasion de l'assemblée annuelle de la Société suisse de statistique et d'économie politique à Lugano : Revue suisse d'économie politique et de statistique, 117/1981, p. 213 ss.; NZZ, 120, 26.5.81.
[3] Les résultats provisoires de la statistique du mouvement de la population pour 1981 montrent que le nombre d'enfants nés vivants n'a progressé que de 0,1% (1980:2,4%) par rapport à l'année précédente. A l'inverse de ces dernières années, l'excédent des naissances a à nouveau diminué de 4,1 % pour tomber à 13 971 unités. Quant au nombre de mariages, il s'est accru de 0,1% (1980: 5,1 %). Cf. La Vie économique, 55/1982, p. 215 ainsi que APS, 1980, p.118. Voir aussi J. Menthonnex, «La fécondité du moment des Suissesses mariées depuis l'après-guerre», in Revue économique et sociale, 39/1981, p. 140 ss.
[4] Office fédéral de la statistique, Recensement fédéral de la population 1980, vol. I : Population résidante des communes, Berne 1981; Annuaire statistique de la Suisse, 1981, p. 14 ss. ; presse du 17.7.81 et 30.9.81. Cf. également La Vie économique, 55/1982, p. 275 ss. (données structurelles); NZZ, 116, 26.5.81; 24 Heures, 177, 3.8.81; SZ, 179, 4.8.81; R. Frey, Von der Land- zur Stadtflucht. Bestimmungsfaktoren der Bevölkerungswanderungen in der Region Basel, Bern 1981; APS, 1971, p.124; 1972, p.113; 1980, p.118 s.