Année politique Suisse 1981 : Politique sociale / Assurances sociales
 
Assurance-maladie
Dans une perspective purement constitutionnelle, l'assurance-maladie est de la compétence fédérale, la santé publique essentiellement du ressort des cantons. La nouvelle répartition des tâches entre la Confédération et les cantons entend redonner un sens à ce principe par une répartition des charges plus conforme aux compétences respectives. C'est en tous les cas un des buts du message du Conseil fédéral sur la révision partielle de l'assurance-maladie publiée en août 1981. Simultanément le projet veut respecter les exigences nouvelles de la santé publique, les nécessités d'une meilleure compensation sociale et celle d'une utilisation plus rationnelle des moyens. Il ne contient donc aucune modification fondamentale des structures existantes. Son ambition, plus modeste, vise à résoudre les problèmes urgents et tente de combler quelques lacunes manifestes [32].
Dans ce sens il n'est guère surprenant que l'assurance des soins médicaux et pharmaceutiques — traitement ambulatoire et hospitalier — n'ait pas été décrétée obligatoire. Toutefois, quelques améliorations substantielles, spécialement en faveur des catégories peu aisées de la population, figurent dans ce nouveau projet. Les familles moyennes à nombreuses bénéficieraient ainsi d'un important dégrèvement de cotisations en faveur des enfants. Les assurés à ressources modestes se verraient allouer des subsides cantonaux. En revanche, l'ensemble des mesures préconisées par le texte législatif signifierait une hausse des cotisations pour les adultes — en moyenne 5 à 10%. Les subsides fédéraux, quant à eux, devraient plafonner à leur niveau 1976 (900 millions). La contribution fédérale serait cependant révisable tous les trois ans par le parlement [33]. Toutes ces dispositions financières devraient être assorties de diverses mesures destinées à combattre l'explosion des coûts de la santé. L'assuré serait particulièrement sollicité dans ce sens [34].
Ce projet comble en outre quelques lacunes au niveau des prestations. Il a été ainsi prévu de supprimer la limitation dans le temps de la couverture du traitement hospitalier. Par ailleurs les examens préventifs, les soins à domicile, ainsi que les traitements dentaires pourraient être partiellement pris en charge par les caisses-maladie ou sous certaines conditions. Mais l'innovation la plus intéressante, introduite à l'occasion de cette révision, concerne l'indemnité journalière en couverture de la perte de gain. Celle-ci a été rendue obligatoire pour tous les salariés. Un prélèvement de 0.4% sur le salaire devrait être effectué par l'employeur qui ajouterait une somme identique. L'indemnité s'élèverait à 80% du salaire. Une importante coordination a été prévue avec les assurances-invalidité et accidents en cas d'incapacité de travail prolongée.
Les réactions des milieux ouvriers ont été négatives. Pour le PSS, le système de financement aurait dû être totalement repensé, sur un principe de solidarité généralisé. L'USS, pour sa part, déplore que l'assurance médico-pharmaceutique n'ait pas été rendue obligatoire. Elle aurait souhaité une modification du système de financement axé sur la proportionnalité du salaire et une participation fédérale plus grande. D'autre part, l'augmentation de la participation de l'assuré aux frais de traitement a été jugée inacceptable [35]. Du côté patronal, les réactions, tout en étant plus favorables, n'ont guère reflété l'enthousiasme. Pour le PRD et les milieux industriels, il aurait fallu avant tout chercher à juguler l'explosion des coûts. Dans ce sens, une politique agissant essentiellement sur les facteurs inflationnistes serait, selon eux, vouée à l'échec. Une amorce de solution consisterait à mettre des limites à l'extension inconsidérée des prestations. C'est également par une plus grande sollicitation de l'individu que l'on pourrait parvenir à lutter efficacement contre la hausse des frais. Le PDC, quant à lui, adhère pleinement aux thèses présentées par le Conseil fédéral. Il a notamment souligné l'effort réalisé en faveur de la famille [36].
 
[32] Message du CF: FF, 1981, II, p. 1069 ss.; cf. presse du 28.8.81. Pour la genèse du projet voir APS, 1979, p. 147 s.; 1980, p. 132. Sur la question de l'assurance-maladie, cf. T. Emi, Die Entwicklung des schweizerischen Kranken- und Unfallversicherungswesens, Freiburg 1980; P. Renschnick / G. Kocher, Chère médecine, Lausanne 1979. Voir enfin supra, part. I, 7b (Santé publique).
[33] Progressivement, les cantons seraient astreints à prendre en charge 50% des subventions aux caisses-maladie. Voir à ce propos supra, part. I, 1d (Confédération et cantons).
[34] Les assurés auraient ainsi à prendre en charge non plus 10 mais 20% des frais; toute franchise serait en revanche supprimée. En sus, chaque patient recevait une note détaillée des frais consécutifs à son traitement. Cf. Lib., 273, 28.8.81 (M. Savary); Tout Va Bien, 118, 4.9.81(« La java des cotisations »). Voir également supra, part. I, 7b (Santé publique).
[35] PSS: BaZ, 200, 28.8.81; SZ, 200, 28.8.81; TW, 200, 28.8.81; Vr, 251, 28.8.81; Tribune socialiste vaudoise, 127, 5.10.81. USS: USS, 25, 2.9.81 (communiqué); BaZ, 266, 13.11.81. PdT: VO, 35, 3.9.81.
[36] PRD: NZZ, 198, 28.8.81; SZ, 200, 28.8.81; Vat., 198, 28.8.81; Service libre d'information, 33, 10.10.81. Patronat: Ordre professionnel, 1779, 14.8.81; 1780, 28.8.81; RFS, 33/34, 25.8.81. PDC: Service de presse, 36, 26.9.81.