Année politique Suisse 1981 : Politique sociale / Assurances sociales
 
Assurance-chômage
Entamer le débat relatif à la nouvelle loi sur l'assurance-chômage dans un climat économique détendu aura sans doute facilité les discussions [40]. Les escarmouches qui ont eu lieu au Conseil national ont pourtant mis en évidence l'ambiguïté d'une telle loi; l'exercice tient de l'art de la corde raide. En effet, le législateur a dû trouver un modus vivendi entre une garantie pécuniaire suffisante et les craintes de certains milieux politiques concernant le marché du travail, à savoir qu'une assurance étendue tendrait à prolonger la durée du chômage [41].
Les défenseurs des ouvriers dans leur ensemble ont relevé l'odeur de suspicion émanant de la loi. Pour les représentants des ouvriers, le chômeur n'est pas responsable de sa situation; il est victime de la conjoncture. L'USS a signifié cette méfiance, injustifiée à ses yeux, au travers du régime dégressif des prestations. «Lutte contre les abus ou pénalisation d'innocents?»
Le radical vaudois R. Junod a relevé, pour sa part, la nécessité de dispositions préventives. Selon lui la lutte contre les abus et la préoccupation de voir le travailleur retrouver rapidement un emploi devraient faire partie intégrante de la loi. En fait, tout au long des débats, les représentants du patronat se sont évertués à supprimer les côtés par trop attractifs du texte législatif, par l'insertion de mesures dissuasives. La question fort controversée des prestations dégressives reflète parfaitement cette position. Les députés bourgeois ont cherché à maintenir la diminution de 10% des prestations après 85 et 170 jours. Le Conseil national a finalement innové en rejetant ce principe de dégressivité [42]. Autre sujet d'affrontement, les dispositions concernant le chômage partiel. Le patronat a tenté d'obtenir un assouplissement des nouvelles règles. Selon les employeurs, le chômage partiel serait ainsi rendu trop onéreux pour les entreprises, ce qui pourrait les inciter à des licenciements néfastes pour la communauté. Ils n'ont pas été entendus [43].
Le retard pris par les travaux parlementaires a incité le Conseil fédéral à demander aux Chambres la prorogation du régime transitoire jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, mais au plus tard à fin décembre 1984. Nonobstant quelques protestations de I'USS indignée par la lenteur du processus législatif, la proposition du gouvernement n'a pas rencontré d'opposition auprès des deux Conseils [44].
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R.K.
 
[40] Cette situation économique relativement stable a incité l'OFIAMT à proposer au CF de réduire une fois encore le taux des cotisations chômage, de 0,5 à 0,3% dès le 1.1.1982. Le CF a accepté (presse du 2.6.81).
[41] Cf. B. Marelli, « La durée du chômage en Suisse de 1978 à 1980 », in La Vie économique, 54/1981, p. 717 s. et 755.
[42] BO CN, 1981, p. 601 ss., 629 ss., 659 ss., 824; presse des 10.6. et 13.10.81. Junod: BO CN, 1981, p. 601 ss. ; 24 Heures, 131, 10.6.81. PSS: Vr, 132, 11.6.81; USS, 25, 2.9.81. Voir également Tout Va Bien, 112, 12.6.81.
[43] Patronat: Ordre professionnel, 1766, 24.5.81; 1775, 20.6.81; RFS, 21, 26.5.81; 23/24, 16.6.81.
[44] FF, 1981, I, p. 753 ss.; BO CN, 1981, p. 848; BO CE, 1981, p. 402.